Depuis des décennies, l’agriculture subit une déconstruction semblable à celle qu’a connue l’industrie dès les années 80. Parce que la France, à rebours de ses voisins tels que l’Allemagne ou l’Italie, a misé sur une économie tertiaire, reléguant les secteurs primaire et secondaire au rang de reliques d’un « vieux monde » dédaigné par des décideurs souvent hors-sol.
Bilan de cet abandon productif national, plus des deux tiers de ce que nous consommons aujourd’hui – biens industriels et de consommation – sont importés. Il est évident que ce n’est pas durable…
À l’image de l’exode rural des années 50-60, qui avait vidé les campagnes pour alimenter les usines en main-d’œuvre, les métropoles aspirent aujourd’hui les élites intellectuelles, contribuant à un nouvel appauvrissement des territoires. Ce phénomène, souvent illustré en France par la « diagonale du vide », n’épargne pas la Bretagne. Il est d’autant plus perceptible que s’y ajoute un « hiver démographique » rural, marqué par une baisse de natalité et des départs massifs à la retraite d’agriculteurs.
De nombreuses zones rurales vivent ainsi ce que les économistes qualifient de « retrait des forces productives ». Avec en corollaire, l’effritement de la cohésion sociale, autrefois cimentée par une population agricole, artisanale, commerçante, éducative, médicale, etc. Une population nombreuse et diversifiée qui faisait société dans les campagnes. La disparition programmée de 10 000 exploitations par an en France (si rien n’est fait) n’augure rien d’enthousiasmant pour la vitalité des campagnes, y compris en Bretagne.
Pour enrayer ce déclin, il faut sanctuariser une partie de l’agriculture, réinventer une politique agricole ambitieuse. Mais cela demande du courage politique qui ne se résume pas à sortir l’extincteur à chaque crise. Bref, il est urgent de reconstruire le tissu productif.