- Illustration Le prix payé au producteur déconnecté du prix de vente
Les jeunes producteurs légumiers étaient réunis vendredi 2 décembre à la station Lédénez de Pleumeur-Gautier pour expliquer les difficultés qu’ils rencontrent en ce moment sur les cultures de choux-fleurs.

Le prix payé au producteur déconnecté du prix de vente

Les jeunes producteurs de légumes du Trégor-Goëlo alertent sur la crise actuelle qu’ils traversent avec des ventes à perte de leurs choux-fleurs. Si rien ne bouge, ils envisagent de passer à l’action dans les jours qui viennent.

La déconnexion entre le prix du chou-fleur payé au producteur et son prix de vente dans les enseignes de la grande distribution est la goutte d’eau qui fait déborder le vase pour les jeunes légumiers du Trégor-Goëlo. « En ce moment notre chou-fleur nous est payé à 0,45 €/tête alors que notre coût de production se situe entre 0,70 et 0,80 €/tête. Nous retrouvons ce même chou-fleur dans les magasins à un prix qui varie de moins de 1 € à plus de 3,50 €/tête. En ce moment tous nos choux-fleurs sont achetés et vendus : lorsque l’on voit des prix affichés à plus de 3,50 €, on se dit qu’il y a des entreprises qui gagnent de l’argent sur notre production et malheureusement, nous, on en perd tous les jours en allant récolter nos légumes », s’indigne Jean-Baptiste Lec’hvien, un jeune producteur du secteur de Paimpol. Et Tanguy Rousseau, jeune légumier sur Trélévern de préciser : « Si nous trouvons des choux à moins de 1 € dans les magasins les jours prochains nous irons les sortir. Cela n’est pas normal de brader notre production quand nous travaillons à perte. »

1 000 ha de choux perdus en 10 ans

Un responsable de la coopérative des Maraîchers d’Armor précise que la surface en chou-fleur a diminué de 14 % cette saison, par rapport à la précédente. « En 2012, la Bretagne produisait autour de 130 millions de têtes de chou-fleur. Aujourd’hui, nous sommes à 80 millions de têtes. En 10 ans, nous avons perdu 1 000 ha de chou-fleur en Bretagne. » Les jeunes producteurs dénoncent aussi les pratiques de certains négociants qui achètent du chou-fleur bio moins cher que le conventionnel et le mettent dans le circuit conventionnel pour gagner encore quelques points de marge supplémentaires. « Depuis, nous avons décidé de commercialiser directement le chou-fleur bio dans le circuit conventionnel pour éviter ces pratiques », précise le responsable des Maraîchers d’Armor.
En 2022, les ventes des légumiers de plein champ sont en baisse de 10 millions d’euros sur le Trégor-Goëlo en raison d’une baisse de volumes liés à la sécheresse cumulée à des prix bas. Les productions d’artichauts et de Coco de Paimpol ont été particulièrement impactées avec un dossier calamités qui a été déposé. Dans le même temps les charges des producteurs augmentent.

Des charges qui explosent

« Nos plants de légumes ont pris + 12 %, l’engrais + 300 %, le matériel + 20 % sur 1 an, le carburant a presque doublé sans parler du centre de gestion qui est à + 10 % depuis le début de l’année », énumère Emmanuel Le Dantec, producteur à Pleubian. Les légumiers dénoncent aussi la part d’importation des fruits et légumes qui dépasse les 50 % en France. « Une large part de ces importations ne répond pas aux critères de qualité ou à la réglementation auxquels nous sommes soumis. » Ce ras-le-bol des producteurs risque d’avoir pour conséquence une baisse des surfaces en légumes au profit des céréales sans parler des jeunes qui ne vont pas vouloir s’installer dans ces conditions. « Nous attendons une réaction des pouvoirs publics et de la société en général pour sortir rapidement de cette ornière. » 

Chausser les bottes pour connaître le métier

Les producteurs du Trégor-Goëlo font remarquer que les négociants en légumes du secteur arrivent à l’âge de la retraite. « Ce sont des financiers qui reprennent les entreprises et ils n’ont pas la connaissance de l’histoire de notre zone légumière. Ils ne connaissent pas le terrain et nous avons l’impression qu’ils n’ont pas envie de chausser les bottes pour le connaître. » Pourtant « il est important pour ces intermédiaires, insistent-ils, de connaître ce métier de passion pour qu’ils puissent raconter à leurs clients d’où vient le produit et tout le travail qu’il nécessite avant d’arriver sur les étals et dans l’assiette.»


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