Les consommateurs français veulent manger des tomates toute l’année. Partis de ce constat, deux producteurs finistériens ont investi dans de l’éclairage Led, économe en énergie, pour répondre à cette demande. Savéol commercialise donc leur production même en hiver.
Depuis 2015, deux producteurs de la coopérative Savéol ont une particularité : ils produisent des tomates en hiver quand les autres n’en ont plus. Les serres illuminées par des Led renvoient une lumière rose/violette au bord de la RN 12 au niveau de l’aéroport de Guipavas. Les clients de la coopérative finistérienne étaient demandeurs de tomates françaises hors saison. C’est pour cette raison que les associés ont décidé d’investir dans cet éclairage économe en énergie.
3 millions d’euros d’investissement
Guillaume et Jean-Baptiste Kerjean cultivent des tomates sur 45 000 m2 de serres à Guipavas. « La situation foncière ne nous permettait plus de développer notre entreprise. Nous sommes coincés entre l’aéroport, la route nationale 12, une zone d’activité qui s’est fortement développée en même temps que l’aéroport et une zone humide. » L’investissement dans un système d’éclairage spécifique reproduisant le spectre lumineux du soleil a permis à Guillaume Kerjean et son cousin de produire des tomates en hiver pour donner de la valeur à leur entreprise sans s’agrandir.
Il faut une moyenne de 2 €/kg de tomate pour que cela soit intéressant par rapport au risque financier.
« Nous avions trois possibilités de choix pour l’éclairage : les lampes au sodium, solution la moins chère mais la plus énergivore ; le mixte sodium + Led ou alors le 100 % Led, le plus coûteux mais le plus intéressant au niveau consommation énergétique », explique Guillaume Kerjean. Ils optent pour un éclairage 100 % Led et montent la première installation de ce genre en France en 2015. Ils équipent alors une serre de 16 000 m2 avec cette technologie, et en 2017, ils poursuivent avec une autre de 11 000 m2. Coût total de l’opération : 3 millions d’euros financés sur 10 ans avec l’espoir d’un retour sur investissement en 8 ans selon les cours de la tomate.
Pour les producteurs, il faut une moyenne de 2 €/kg de tomate pour que cela soit intéressant par rapport au risque financier. « La construction d’une serre verre toute équipée et prête à produire coûte environ 120 €/m2, pour équiper nos serres avec cet éclairage Led, nous avons investi 180 €/m2. »
Un début de récolte fin novembre
En culture traditionnelle, les plants de tomates arrivent mi-novembre pour un début de production mi-février et une fin de culture en octobre. « Dans nos serres avec éclairage Led, les plants arrivent début octobre, nous récoltons les premières tomates fin novembre et les dernières mi-septembre », déclare Guillaume Kerjean. Avec deux cycles de production de tomates, le travail est moins saisonnier et s’étale mieux sur l’année. Les serres sont vidées, nettoyées, désinfectées puis replantées à des périodes différentes. L’entreprise est passée de 13 salariés en CDI en 2015 à 20 en 2018. « Avec les saisonniers nous arrivons à 29 emplois équivalent temps plein (ETP) sur l’année, quand en culture classique, une structure comme la nôtre se situe plutôt à 23 ETP. » Même si les producteurs font toujours appel aux saisonniers lors des pics de travail, la production toute l’année permet de fidéliser le personnel.
Une production plus technique
La production de tomate en hiver est équivalente à celle de l’été. « À la demande des clients, nous cultivons de la tomate grappe. Nous testons différentes variétés car elles ne réagissent pas toutes aussi bien à l’éclairage Led. Cette année, nous réalisons aussi un essai avec des petites tomates allongées pour l’apéritif. Nous arrivons à créer de la valeur sur ses variétés qui en font moins l’été. » La production hivernale est un peu plus technique, l’éclairage demande un accompagnement en chauffage pour l’équilibre physiologique de la plante. « Il faut être rigoureux pour maintenir cet équilibre entre l’énergie lumineuse et thermique. À cette époque, la température moyenne dans la serre est de 20 °C. »
Cette température associée à l’éclairage Led favorise l’implantation de la lutte biologique. « Deux à trois semaines après la mise en place des auxiliaires, nous trouvons déjà la nouvelle génération sur les plants. Un signe révélateur de conditions idéales pour le développement de la culture. » Par contre, les bourdons en charge de la pollinisation, se repèrent mal avec les Led. Par conséquent, ils travaillent moins car ils attendent la lumière naturelle en journée. D’ici 2020, d’autres producteurs de Savéol vont se lancer dans la culture de tomate hivernale avec éclairage Led pour une surface en culture totale estimée à 10 ha.
[caption id=”attachment_32791″ align=”alignright” width=”179″] Pierre-Yves Jestin, président de Savéol[/caption]
Une production entre conventionnel et bio
La tomate est le légume le plus consommé en France derrière la pomme de terre. Le consommateur français est donc demandeur d’une tomate de qualité et avec du goût toute l’année. Savéol connaît également les préoccupations des consommateurs en matière de nutrition, santé et environnement, et a toujours cherché à développer des solutions naturelles plutôt que de recourir aux pesticides. La coopérative ne cesse d’innover en proposant les 1res tomates non bio (car en production hors-sol) mais garanties sans aucun pesticide de synthèse. Savéol offrira en 2018 une gamme de tomates garanties sans traitement chimique de la fleur à l’assiette et affiche ainsi avec fierté ses méthodes de production, inédites au sein de la filière. Ainsi, nous pouvons affirmer proposer au consommateur une 3e voie de l’agriculture située entre le conventionnel et le biologique. Pierre-Yves Jestin, président de Savéol