L’image est impressionnante. Après les céréales en automne, Laurent Cornée sème désormais son maïs « directement dans des couverts vivants ». - Illustration “En semis direct, j’ai plus de temps pour observer mes cultures”
L’image est impressionnante. Après les céréales en automne, Laurent Cornée sème désormais son maïs « directement dans des couverts vivants ».

“En semis direct, j’ai plus de temps pour observer mes cultures”

Laurent Cornée, du Gaec Bonnelière à Moutiers (35), travaille en semis direct. Il implante notamment maïs et céréales dans des couverts vivants à la recherche d’un sol tout aussi vivant.

Chez Laurent Cornée à Moutiers (35), la clé de voute du système de cultures s’appuie sur un trépied « rotation – couverts à base de légumineuses – non travail du sol ». Le producteur de lait a pratiqué les Techniques culturales simplifiées (TCS) pendant une décennie avant de se tourner, il y a 9 ans, vers le semis direct. « Je crois que j’étais arrivé au bout des TCS. J’avais des problèmes de désherbage, surtout du brome et du vulpin dans les céréales, et je passais beaucoup de temps sur le tracteur », explique le membre du groupe d’agriculteur Sol Vivant 35.

« Ne plus rouler sur un sol nu »

Ce printemps, le Brétillien a accueilli un nouveau semoir monograine (Prosem chez Sola) acheté d’occasion à 20 000 € pour les maïs et les colzas. « Et peut-être un jour pour du soja, une culture à tester qui m’attire dans une optique d’autonomie alimentaire du troupeau laitier… » Fin avril, l’outil lui a déjà permis par exemple d’implanter du maïs dans un couvert en mélange. « Je n’aime plus rouler sur une terre nue. Un sol nu, c’est à la fois un risque d’érosion et beaucoup de place laissée au développement des adventices avec la nécessité de rattraper ensuite avec des traitements chimiques », tranche Laurent Cornée.

[caption id=”attachment_27984″ align=”aligncenter” width=”463″]La parcelle de maïs semée sous couvert vivant après la levée. Un seul désherbage a été effectuée à 3 feuilles avec Mondine à 0,4 L/ha et Biathlon à 35 g/ha. La parcelle de maïs semée sous couvert vivant après la levée. Un seul désherbage a été effectuée à 3 feuilles avec Mondine à 0,4 L/ha et Biathlon à 35 g/ha.[/caption]

« Chez moi, le semis de céréales d’automne sous couvert vivant est déjà validé. Au tour des maïs déjà testé sur quelques hectares en 2016… » C’est impressionnant d’observer ce semis réalisé dans une telle biomasse. À l’avant du tracteur, un rouleau couche la végétation. À l’arrière, le semoir dépose les graines en terre sous ce mulch d’avoine et de féverole, ainsi que de l’urée 46 à 5 cm du rang (à la dose de 100 kg/ha) et un stimulant racinaire en semoulette (TMS chez TMCE). Autre détail, la semence a été préalablement enrobée par un stimulateur de germination liquide (TMF).

« Les couverts sont des cultures »

« Il faut mettre les moyens pour réussir ses couverts comme n’importe quelle autre culture », estime Laurent Cornée. Les premières années, il raconte qu’il ne les a pas toujours réussis. « Pas le bon mélange d’espèces, pas assez d’azote, semis trop tardif… » Pour lui, il est impératif de se préparer pour pouvoir les semer tôt. « En mai, je pense à mes couverts. En juin, je prépare mes mélanges de semence et règle mon semoir (Semeato). Comme ça, à la moisson, je suis la batteuse. Un colza semé fin août, c’est trop tard… »

Dans ses choix, il cherche à associer des plantes aux facultés différentes. « La féverole et sa racine pivotante et la phacélie et son sytème racinaire fasciculé forment un beau mariage en faveur de la structure du sol. Le radis chinois fait remonter du potassium pour le maïs. Le sarrasin du phosphore. Les trèfles sont très couvrants. »

[caption id=”attachment_27982″ align=”aligncenter” width=”680″]La graine est posé dans le sillon, sous un mulch d’avoine et de féverole qui sera roulé et puis désherbé après le semis. La graine est posé dans le sillon, sous un mulch d’avoine et de féverole qui sera roulé et puis désherbé après le semis.[/caption]

Limiter le glyphosate

Le lendemain, un passage de rouleau Cambridge permettra de bien plaquer le couvert et de refermer les sillons. Le couvert sera ensuite détruit par un passage de glyphosate dans les jours suivants. « En semis direct, le glyphosate, on ne peut pas s’en passer aujourd’hui », confie le producteur. « Mais on peut réduire les doses. »

Pour cette parcelle, il prévoit un dosage à 1,5 L/ha accompagné de sulfate d’ammoniac, « un mouillant qui corrige l’eau et améliore l’efficacité du désherbant », car des « dicotylédones embêtantes » sont présentes parmi l’avoine et la féverole. Dans certains cas favorables, Laurent Cornée parvient à faire sans. « J’ai déjà semé un maïs dans une culture de féverole pure et ça a bien fonctionné. La condition est que la légumineuse ait fleuri, une fois la sénescence atteinte, elle ne repart pas. À l’automne, je sème aussi du blé sans recours au glyphosate si le couvert est bien propre. »

Rotation à l’américaine

« Je ne sème jamais blé sur blé. Mais une avoine derrière un blé, si », explique Laurent Cornée. Pour son système de cultures, ce dernier s’inspire « de la rotation 2 – 2 à l’américaine » pour vraiment couper le cycle des adventices. « Tout est plus simple. Lors de la succession de dicotylédones, maïs puis féverole par exemple, on gère les graminées adventices. J’accepte aussi un peu d’adventices, mais quand j’ai un problème de désherbage, j’implante généralement un maïs qui permet de bien nettoyer une parcelle. Puis lors de l’enchaînement de monocotylédones, blé puis avoine, on gère les mauvaises herbes dicotylédones… » Mais le producteur de lait précise tout de même que, dans la réalité, l’assolement est un peu plus compliqué à mettre en place chaque année puisqu’il ne faut pas, par exemple, revenir avec une féverole avant 7 ans sur la même parcelle.

Moins de carburant

Avec du recul, il apprécie vraiment la technique du semis direct. « C’est moins de passages, moins de carburant, moins de temps sur le tracteur, moins de pièces d’usure à acheter et changer… Là, j’implante à 5 km/h un maïs en un seul passage en consommant 6 L de fuel/ha. Dans un système traditionnel avec travail du sol, certains utilisent 100 L de fuel et passent des heures sur le siège. Le semis direct me ménage beaucoup plus de temps pour observer mes cultures. » Même s’il n’oublie pas de préciser que les premières années ont été les plus délicates.

« Au passage au semis direct, je manquais d’expérience et j’étais seul. Les cinq premières années ont été les plus compliquées. Les rendements ont d’abord baissé. Le sol n’était pas encore autofertile. Il fallait adapter la fumure en apportant un peu plus d’azote le temps que les légumineuses implantées paient et que le sol devienne fonctionnel et relargue ses éléments. » À l’avenir, il espère que le semis direct auquel il croit beaucoup se développe davantage autour de lui. « Celui qui veut faire des essais peut louer mon nouveau semoir », sourit-il pour conclure. 

3 variétés de maïs dans la parcelle : Avec son semoir six rangs, Laurent Cornée implante deux rangs de 3 variétés différentes de maïs par parcelle. « L’objectif est de récolter des amidons différents, aux digestibilités différentes, pour obtenir un ensilage équilibré et efficace pour les vaches. » En blé, il associe également 7 ou 8 variétés.


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