Œuf : La cage n’a plus la cote

oeuf-nicolas-dreano - Illustration Œuf : La cage n’a plus la cote
Alors que les éleveurs n’ont pas fini de rembourser les emprunts de la mise aux normes des cages en 2012, ils doivent déjà se projeter vers des systèmes de productions alternatifs. Un vrai casse-tête.

« Je n’ai pas le choix ; je dois produire mes œufs en cage jusqu’à 2027, sinon je vais vers le dépôt de bilan », confie Nicolas Dréano, éleveur de pondeuses à Ploërmel (56).  En 2012 il s’installe et investit 2 millions d’€ sur une durée de 15 ans pour construire un poulailler neuf de 80 000 poules.

Cages aménagées, encore 7 ans de prêts

À ce jour, il lui reste 1,28 million d’€ à rembourser d’ici 2027et son contrat de 5 ans avec son groupement arrive à son terme. « Avec le nouveau contrat revu à la baisse, je vais devoir décaler mes remboursements de prêts. » En France, il reste en moyenne 11 €/poule soit 7 ans à rembourser aux éleveurs qui ont effectué la mise aux normes bien-être et sont passés en cages aménagées. « En 2012, on est reparti dans le système cage. Nos organisations nous proposaient des contrats et leurs acheteurs (GMS et industriels) leur proposaient des débouchés. Aujourd’hui les nouveaux contrats vont de 1 à 3 ans et les œufs sont repris environ 15 % moins cher », indique Anne-Françoise Robin, éleveuse de pondeuse à Caro (56) lors de la journée filière œuf organisée par la Chambre régionale d’agriculture à Ploërmel le 23 février.

Avec les nouveaux contrats, les œufs sont repris 15 % moins cher

« Après avoir subi une grosse pression de certaines associations, les enseignes de la grande distribution communiquent déjà sur le retrait des œufs de code 3 de leurs rayons à partir de 2020 », explique Franck Picard, producteur et président du groupement Armor Œufs. Pourtant les producteurs sont unanimes sur l’importance de conserver des œufs de tous les codes (allant du bio à la cage) dans les rayons des magasins.

Ne pas dépasser 50 % d’alternatif

« Le consommateur a le droit de choisir. C’est sûr que tout le monde veut du bio mais lorsqu’il faut payer ce n’est plus une évidence », lance François Valy, de la FRSEA Bretagne. Passer à une production française de 50 % d’œufs alternatifs semble acceptable. « Au-delà, on s’expose à des risques sanitaires et commerciaux. Il est aussi très important de pouvoir assurer l’alimentation des Français », témoigne Franck Picard. Il rappelle qu’avec la problématique d’Influenza aviaire, les poules en systèmes alternatifs sont en claustration depuis 3 mois. « Quelle légitimité a ce mode de production si les volailles sont enfermées 6 mois par an », s’interroge le président d’Armor Œufs.

Réinvestir 500 millions d’€

Afin de s’adapter à la demande grandissante en œufs alternatifs la filière a proposé son contrat d’avenir sociétal. L’objectif est de basculer progressivement d’une production de 32 % d’œufs alternatifs à 50 % à horizon 2022. « Cela représente 10 millions de pondeuses qui doivent changer de mode d’élevage. Après avoir investi 1 milliard d’€ pour la mise aux normes en 2012, les éleveurs doivent encore réinvestir 500 millions d’€ », chiffre Franck Picard.

Il ne manque pas de rappeler que la grande distribution réalise 35 % de marge sur son rayon œufs. « Nous leur demandons donc de nous aider à hauteur de 100 millions d’€ pour accompagner le passage en système alternatif. Mais lorsqu’il faut payer, ils sont moins rapides que lorsqu’il faut communiquer sur un arrêt des œufs cage dans leurs enseignes. » Ce passage vers plus d’alternatif, Sébastien et Marie-Elisa Robic éleveurs à Radenac (56) y réfléchissent : « Nous élevons 15 500 poules plein air sur un site et sur un autre 32 000 pondeuses en cages. Il nous reste encore 2 ans de remboursement pour le bâtiment équipé de cages mais nous réfléchissons déjà à le passer en plein air. »


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