viande--bovine - Illustration Mieux s’organiser en bovins viande

Mieux s’organiser en bovins viande

La réforme de la Pac va entraîner une forte chute de revenu chez de nombreux producteurs de bovins viande en Bretagne. À l’heure des interrogations, la notion de travail devient cruciale dans les élevages, pour pouvoir augmenter le cheptel chez certains, se diversifier chez d’autres… Mais au-delà, raisonner, rationnaliser le travail sur son exploitation permet de se libérer du temps et de se rapprocher ainsi des rythmes de vie des autres catégories professionnelles. La réflexion peut aussi permettre de gagner en sécurité, ou en confort de travail. Dans ce dossier, la parole est donnée aux éleveurs qui ne manquent pas d’idées pour améliorer leur quotidien, des petites astuces aux gros bouleversements. Chacun trouve ses propres solutions, adaptées à son exploitation et à ses priorités…

[nextpage title=”Beaucoup de variabilité dans le temps d’astreinte quotidienne”]

La majorité des élevages se situent entre 2 h 30 et 10 h d’astreinte par jour.

Un quart des éleveurs affichent le travail comme une forte préoccupation. C’est un chiffre issu d’une enquête réalisée il y a quelques années dans le cadre du réseau mixte technologique « Travail en élevage ». Aujourd’hui, ce chiffre serait certainement en hausse. L’étude montre que le volume de travail d’astreinte (quotidien) est très variable au sein même des systèmes spécialisés en bovins viande : 10 % des exploitations affichent moins de 1 000 h de travail d’astreinte par an, 10 % en ont plus de 4 000. Des marges de progrès existent donc, la majorité des élevages se situant entre 2 h 30 et 10 h par jour.

« Les éléments de variation du travail d’astreinte sur l’atelier peuvent être liés au type de bâtiment, à la politique de répartition des vêlages (mieux en vêlages groupés). Le rythme de distribution des fourrages a également une incidence directe. On observe par ailleurs un effet taille de troupeau, mais non linéaire », expliquent les responsables de l’étude. Les deux tiers du travail d’astreinte sont consacrés à l’alimentation, au paillage et au raclage.

Des solutions individuelles

Dans la démarche Tradibov, développée par l’Institut de l’élevage, les Chambres d’agriculture et la Fédération des Bovins croissance, des fiches ont été élaborées pour aider les éleveurs à mettre en place des solutions adaptées à leur élevage. Les réponses ne sont effectivement pas les mêmes selon que l’éleveur souhaite se libérer du temps quotidien, des journées, ou qu’il entend augmenter son efficacité, la sécurité ou réduire la pénibilité.

2/3 du travail d’astreinte sont consacrés à l’alimentation, au paillage et au raclage.

S’agissant de l’alimentation, modifier les rythmes de distribution, avec 3-4 repas par semaine, peut permettre de gagner jusqu’à 3 heures hebdomadaires et se libérer du travail d’astreinte le week-end. « Mais la limite essentielle réside dans la conservation des fourrages dans l’auge en été », précisent les conseillers. La ration complète peut être une autre solution, qui sera d’autant mieux rentabilisée que le troupeau est important. En cas de changement de matériel, se poser la question du nombre de distributions est opportun.

Plus d’efficacité avec le groupage des vêlages

Autre piste intéressante, le groupage des vêlages engendre un allotement efficace qui permettra de simplifier l’alimentation, les suivis sanitaires, et de réduire ou mieux prévoir les concurrences avec les autres tâches. « Mais cela demande de la rigueur, et conduit à une pointe de travail durant la période des vêlages, puis de mise en reproduction. » Le box de vêlage ou les équipements de contention amènent, quant à eux, davantage de sécurité, mais ils nécessitent de la place en bâtiment et doivent être bien conçus.
Un chien de troupeau bien dressé permet de gagner du temps et de l’autonomie. Mais la patience et la discipline sont de rigueur, et il faut savoir que le fidèle animal n’obéit en général qu’à un seul maître. Difficile alors de se faire remplacer auprès du troupeau. Limiter les manipulations de fumier, avoir recours à une pailleuse, organiser un remplacement entre éleveurs sont d’autres idées. À chacun de trouver ses solutions en fonction de ses objectifs, mais aussi de son système, de ses contraintes… Pas facile, mais stimulant, non ? Agnès Cussonneau
[nextpage title=”Un couloir central fonctionnel et polyvalent”]Dans son bâtiment, un jeu de barrières dessert un couloir central qui permet à Loïc Jézéquel d’assurer seul et rapidement de nombreuses tâches, en toute sécurité.

Loïc Jézéquel a longuement réfléchi à l’aménagement de ses anciens bâtiments. Et pourtant, il a finalement opté pour une stabulation neuve en 2005. Un choix qu’il ne regrette pas, au bout de 10 années d’utilisation. « Mon bâtiment est fonctionnel et me permet de réaliser seul des tâches auxquelles je ne pensais pas à sa conception », avoue l’éleveur.

Un lieu de service pour travailler à l’abri

Loïc Jézéquel a travaillé pendant 15 ans avec un bâtiment de vaches allaitantes avec courette extérieure découverte. La réflexion de ce nouveau bâtiment a été conçue autour du gain de temps, de la sécurité mais aussi du confort de travail. L’espace de service à l’entrée du bâtiment répond à cette exigence de joindre l’utile à l’agréable et de pouvoir travailler à l’abri. De même, vers la mi-juillet, quand commencent les 1ers vêlages des génisses, les lots sont rapprochés du bâtiment et rentrés la nuit. Des néons, avec une fonction veilleuse, facilitent la surveillance et les interventions de nuit si besoin. Le bâtiment est lumineux, avec de nombreux translucides. Et les néons en nombre, un au dessus de chaque case, permettent aussi de travailler à l’aube, en toute sécurité, pour l’embarquement des taurillons.

Gain de temps et de sécurité

Il a souhaité regrouper sous le même toit les vaches allaitantes et les taurillons. « Et si la plupart des bâtiments que j’ai visités ont des animaux de part et d’autre d’un couloir d’alimentation, moi je l’ai conçu différemment : les animaux sont dos à dos, séparés par un couloir de service central », décrit-il.

[caption id=”attachment_863″ align=”aligncenter” width=”300″]loic-jezequel-batiment-viande-bovin Loïc Jézéquel, sélectionneur de Limousines à Plounévézel (29), dans son couloir de service, placé au centre de son bâtiment, entre cases à taurillons et lots de vaches allaitantes.[/caption]

Ce couloir est adjacent aux cases des taurillons, facilitant le mouvement des animaux jusqu’au parc d’embarquement. Les taurillons, pesés tous les deux mois, avec la bascule électronique au bout du couloir, sont habitués à sortir de leurs cases. Et le jeu de barrières à 4 lices permet à la fois de sécuriser le travail de l’éleveur et la santé des animaux, « même si le risque zéro n’existe pas », relance prudemment l’agriculteur. De l’autre côté du mur, les deux lots de vaches allaitantes sont séparés par des cases à veaux, qui ont accès également au couloir central. C’est par cet accès que l’éleveur remplit les nourrisseurs. À terme, une vis flexible pourra les remplir directement du silo. Avec des vêlages d’été, les veaux sont pesés en décembre et avant la mise à l’herbe. La pesée est alors facilitée par ce couloir. « Néanmoins, cette pratique nécessite un à deux essais « à blanc », pour les faire sortir de la case et franchir le dénivelé de 50 cm ». Si cette étape se révèle être un investissement en temps, il est vite amorti sur la carrière de l’animal. Et dès le troisième passage dans le couloir, les 60 veaux sont pesés en contrôle de croissance en une heure, à deux personnes, « pour travailler sereinement ».
Les animaux étant habitués aux mouvements fréquents très jeunes, les vaches s’en souviennent quand elles reviennent dans le bâtiment. « Des tâches qui pouvaient être fastidieuses sont réalisées maintenant avec plaisir et sans appréhension. Plus on manipule les animaux, plus cela devient facile. »

[caption id=”attachment_866″ align=”aligncenter” width=”226″]plan-batiment plan du bâtiment[/caption]

Plus de 200 cornadis sur l’exploitation

Mais les moyens de contention ne se résument pas à ce couloir de service. Tri des réformes, IA et échographies… Toutes ces tâches sont assurées à une seule personne grâce aux cornadis. Il y en a plus de 200 sur l’exploitation. Carole David

[nextpage title=”Gain de temps sur l’alimentation et au vêlage”]Distribution d’aliment pour plusieurs jours, détecteur de vêlages, arrêt du maïs et du foin… Vincent Caillard a joué sur plusieurs tableaux pour se simplifier le travail sur son élevage naisseur engraisseur de 110 vaches allaitantes.

Vincent Caillard fait partie de ces éleveurs performants sur l’organisation du travail. Une thématique qu’il a d’ailleurs travaillée au sein du groupe Geda auquel il participe. Installé à Sens-de-Bretagne (35), il élève 110 vaches blondes d’Aquitaine, avec l’appui de son père et quelques stagiaires. Il produit également des jeunes bovins et engraisse toutes les femelles, la plupart étant triées après le premier vêlage. Sur plusieurs astreintes et travaux, le producteur parvient à gagner du temps au quotidien.

[caption id=”attachment_875″ align=”aligncenter” width=”300″]vincent-caillard-aliment-velage-vache-allaitante « Les taurillons sont alimentés deux fois par semaine », précise Vincent Caillard.[/caption]

Les femelles, alimentées tous les deux jours

« Les femelles sont alimentées tous les deux jours, avec une ration à base de paille et d’ensilage d’herbe, les taurillons deux fois par semaine, avec une alimentation à base de paille et d’aliment fait sur l’exploitation », explique le producteur qui dispose d’un bol mélangeur. Réalisé avec le même outil, le paillage, est par contre, effectué tous les jours. Sur la SAU de 97 ha, poussaient 78 ha d’herbe et 20 ha de méteil en 2014. Cette année, seuls 9 ha sont implantés en orge, le reste est en herbe. Les vaches profitent des prairies groupées autour du siège d’exploitation, gérées en pâturage tournant tous les 3 – 4 jours. L’eau arrive par tuyaux dans des bacs à niveau constant, et les veaux ne sont pas complémentés. Le producteur ne cultive plus de maïs. « La récolte d’herbe se fait à l’autochargeuse, je ne fais pas de foin. » Chaque année, 500 t de paille sont achetées. Disposant d’une Faf (due à un précédent Gaec), Vincent Caillard produit lui-même son aliment pour les taurillons et les femelles en engraissement, à base de luzerne, de pulpe de betteraves, de maïs grain, de lin, de tourteaux de colza et de mélasse.

Des poids lourds

Sur l’exploitation, la productivité est forte avec 805 kg produits/VA et 438 kg/UGB. À titre de comparaison, l’élevage cas-type breton naisseur engraisseur en Blonde d’Aquitaine sort 691 kg/VA et 355 kg/UGB. Les femelles sont au maximum vendues en Label, à des poids proches de 500 kg de carcasse. Les taurillons sont commercialisés à 20-23 mois, à près de 560 kg de carcasse. Un poids élevé qui correspond à un marché de niche auquel répond l’éleveur. La bonne performance de l’atelier permet d’obtenir en 2014 une marge brute de 1 569 €/ha SFP et de 1 325 €/VA. « 2014 était une bonne année pour l’herbe, avec moins d’aliment distribué, et pas de complémentation azotée aux femelles », commente Vincent Caillard.

Quatre capteurs pour détecter les vêlages

Sur l’exploitation, les vêlages (120 à 130 par an, à trois ans en moyenne) ne sont pas groupés, mais sont moins nombreux en hiver. « Je préfère des vêlages plus dispersés pour étaler le travail, mieux gérer le sanitaire et mieux répartir les ventes », note Vincent Caillard qui s’est par ailleurs équipé d’un détecteur de vêlage (SmartVel) il y a deux ans. « J’en suis très satisfait. J’ai quatre capteurs en tout qui sont posés de trois semaines à un jour avant vêlage, sur les primipares et les vaches. Cela me fait gagner du temps dans la surveillance des naissances. » Équipée en caméras de surveillance, une des trois stabulations de l’exploitation est dédiée aux vêlages, qui se font en bâtiment. Cinq cases de vêlage y sont installées.

[caption id=”attachment_876″ align=”aligncenter” width=”300″]vaches-allant-veler Les vaches allant vêler sont regroupées dans un bâtiment dédié.[/caption]

Quatre taureaux et pas d’IA

En monte naturelle uniquement, la reproduction est assurée par quatre taureaux, ce qui permet aussi à l’éleveur de gagner du temps. Dans le grand bâtiment de 100 m de longueur, qui loge les vaches suitées et les taurillons, l’alimentation est repoussée au téléscopique. Le curage du fumier des vaches est réalisé une fois par an, et deux fois par an pour les taurillons. L’éleveur progresse rapidement sur un autre point : la génétique, avec un Ivmat qui atteint aujourd’hui 103, alors que la moyenne de la race se situe à 98,5. Une orientation qui va dans le sens d’un gain de temps également. Agnès Cussonneau[nextpage title=”La caméra, troisième œil de l’éleveur”]Depuis plus de 10 ans, l’élevage de la famille Cornec, à Saint-Urbain (29), est sous surveillance vidéo. Depuis, ils ne font plus d’allers et retours inutiles à l’étable la nuit pour contrôler les vêlages.

« Je ne compte plus le nombre de vaches et de veaux que j’ai sauvés grâce à la surveillance des animaux par caméra », confie Bernard Cornec, éleveur en race blonde d’Aquitaine à Saint-Urbain (29) et aujourd’hui à la retraite. C’est Lionel Cornec, son fils qui a pris le relais sur l’exploitation familiale totalisant 100 mères et un atelier volaille de chair. Toutes les femelles sont gardées sur l’élevage et les mâles vendus en broutards.

[caption id=”attachment_879″ align=”aligncenter” width=”300″]lionel-cornec-remi-tertrais-video-surveillance Lionel Cornec, éleveur à Saint-Urbain et Rémi Tertrais, dirigeant de la société Detecvel, dans le bâtiment équipé d’une caméra de vidéo-surveillance.[/caption]

La caméra permet de lire une boucle de vache à 40 m

« Avant, le bâtiment des allaitantes était à côté de la maison. En 2004, la stabulation neuve a été construite à 2 km sur le site où se trouvent les poulaillers. Il fallait alors trouver une solution pour surveiller les vêlages de nuit sans avoir à se déplacer systématiquement », raconte Lionel Cornec. Les éleveurs décident alors d’installer une caméra dans le bâtiment pour pouvoir surveiller les vaches sur la télé dans leur maison. « Au départ, nous avons installé une transmission par antenne avec un relais permettant de contourner les arbres pour pouvoir garantir une image nette sur la télé », explique Rémi Tertrais, dirigeant de la société Detecvel ayant installé le matériel. La caméra qui tourne à 360° permet aussi de zoomer à l’endroit souhaité. « C’est impressionnant, on peut lire précisément une boucle sur une vache située à 40 m de la caméra », certifie Lionel Cornec.
L’installation a bien sûr évolué et la transmission se fait dorénavant par internet. L’éleveur peut se connecter à la caméra dès qu’il le souhaite sur son téléphone portable. « J’utilise mon téléphone en journée, mais le soir je préfère la tablette ou l’ordinateur portable, c’est tout de même plus confortable sur un écran plus grand. »

Conseils et tarifs

Rémi Tertrais, dirigeant de la société Detecvel conseille à ses clients d’opter pour une caméra couleur avec un bon zoom. Il faut compter 4 500 € d’investissement pour un système complet. Les éleveurs peuvent aussi louer le matériel, proposé à partir de 100 €/mois. La location offre l’avantage d’avoir du matériel performant renouvelé tous les 48 mois. « Je vends des capteurs et des caméras de la marque Sony, c’est du matériel très performant et d’excellente qualité. » Une bonne caméra équipée d’un zoom performant peut permettre de bien voir le bout des pieds du veau et ainsi de vérifier si ce sont les pattes avant ou arrières qui sortent en premier au moment du vêlage pour confirmer qu’il sort bien à l’endroit. Le spécialiste de la vidéosurveillance insiste : « Dans le cas d’une construction de bâtiment neuf, il faut passer un câble de fibre optique dans la tranchée qui relie le bâtiment au compteur électrique et à l’arrivée téléphone. Le passage en connexion internet par fibre optique permet des débits supérieurs et, par conséquent, des téléchargements plus rapides, une meilleure image qui sera compatible avec les nouvelles caméras et les différents écrans HD (haute définition). »

70 % des vêlages se passent la nuit

L’éleveur estime que, chez lui, 70 % des vêlages se passent la nuit. « La caméra est équipée de projecteurs qui s’allument la nuit pour pouvoir observer les animaux 24 h/24 », précise Rémi Tertrais. L’éleveur a choisi de grouper ses vêlages de fin septembre à novembre pour 70 % et les 30 % restant sur mars/avril. « Pendant ces périodes de vêlages, je regarde la caméra en me levant le matin pour m’assurer que tout va bien. J’active aussi régulièrement la caméra en journée sur mon téléphone portable. Ensuite, je vérifie le soir avant de me coucher et tous les 3 h. » Pouvoir observer les animaux sans qu’ils le sachent permet de surveiller leurs comportements. « L’autre jour, j’ai remarqué une vache qui se tapait le ventre avec une patte. Je suis allé tout de suite dans la stabulation pour la fouiller et j’ai senti une torsion de matrice.

[caption id=”attachment_880″ align=”aligncenter” width=”300″]lionel-cornec-video-surveillance Lionel Cornec observe plusieurs fois dans la journée le comportement des vaches prêtes à vêlées sur son téléphone portable.[/caption]

J’ai appelé le vétérinaire pour qu’il vienne faire une césarienne en urgence. » Il se souvient qu’une autre fois suite à un vêlage, il est rentré en pensant que tout allait bien. « J’ai quand même vérifié et j’ai vu que la vache avait fait un retournement de matrice, cela m’a permis d’intervenir rapidement. » Et des histoires comme celles-là, Lionel Cornec en a beaucoup d’autres, puisqu’il voit presque tous les vêlages sur son élevage. Nicolas Goualan[nextpage title=”Surveiller les limousines en voiture”]

L’organisation du travail est essentiel pour Loïc Lucas. Éleveur de Limousines à Carhaix (29), il trouve des petites solutions qui, mises bouts à bout lui facilitent énormément la tâche.

Maintenir des clôtures électriques en bon état, avec la tension électrique nécessaire au parcage de l’animal n’est pas simple en troupeau de vaches allaitantes, surtout quand l’alimentation est exclusivement composée de pâturage. Pourtant, Loïc Lucas veille sur ses animaux de façon simple grâce à des petites astuces qu’il a mises en place, pour « se simplifier la tâche », aime-t-il décrire.

[caption id=”attachment_882″ align=”aligncenter” width=”300″]surveillance-voiture-exploitant L’exploitant navigue entre les parcelles de la ferme en passant par ces rideaux électrifiés. ” Je surveille mes bêtes au chaud, au sec ! “[/caption]

« L’exploitation est coupée en deux par un axe routier entre Carhaix et Motreff », décrit l’éleveur. La hantise pour tout agriculteur qui possède un cheptel conséquent. Tous les matins, il vérifie par une ronde en 4 X 4 la bonne tenue des fils. Pour plus de simplicité, il a mis au point des rideaux électrifiés pour entrer et sortir à sa guise des champs. « L’exploitation compte une vingtaine de ces rideaux. J’ai beaucoup de talus boisés en bordure de champ, si bien qu’il arrive que les fils se cassent à cause d’une chute de branche », explique-t-il. Les animaux, habitués à ces visites quotidiennes, ne font plus cas de l’engin qui vient les voir. Ils n’essaient pas de franchir les rideaux : les fils verticaux, insérés tous les 13 maillons, dissuadent de prendre la poudre d’escampette.  « Avec ce système, je ne me demande plus si la clôture est fermée ou non ». Se tranquilliser l’esprit, un bon moyen pour se rendre disponible à d’autres tâches, ou pour réfléchir à d’autres astuces : l’exploitation regorge de produits facilitateurs.

Un smartphone pour bras droit

Pas de grosses technologies poussées ici pour gérer les clôtures. L’éleveur utilise les fonctions de son téléphone pour commander une prise électrique. « L’électrificateur est branché sur cette prise commandée. Quand je dois remettre les fils au champ, il me suffit de couper l’alimentation à distance via mon smartphone. Mieux, je peux visualiser le pourcentage d’isolement de la clôture ». Pour ce faire, l’ingénieux éleveur a placé une caméra qui retransmet l’image du Clos 2006 de chez Lacmé, modèle qui affiche le niveau d’électrification des fils sur un écran à cristaux liquides. En consultant son téléphone, il visualise l’image de cette caméra. Il suffisait d’y penser…

[caption id=”attachment_883″ align=”aligncenter” width=”300″]separation-veau-mere Pour séparer le veau de sa mère lors du bouclage, Loïc tire un fil entre les deux animaux pour travailler en toute sécurité.[/caption]

Loïc Lucas utilise également des témoins à LED pour vérifier la tension dans la clôture. « Quand je sors de l’exploitation, je sais si la parcelle est électrifiée grâce à ces lumières clignotantes. Placées judicieusement et dans mon champ visuel, je sais instantanément si le courant arrive ou non ».

Des idées plein la tête

D’autres points notables garnissent la ferme, comme les balles rondes de foin aux couleurs de ficelle différentes. « Je suis équipé pour récolter moi-même mon foin. Quand il est de moins bonne qualité, je change de bobine de ficelle sur la presse pour me rappeler l’origine de la botte pendant le stockage, afin de choisir la qualité de foin à la distribution ». La source des idées est loin d’être tarie, car Loïc Lucas regarde de près les drones qui se développent. « Il serait intéressant de surveiller le troupeau avec un drone, pour connaître les montes naturelles du taureau ».

Bouclage éclair

Il est essentiel de boucler les veaux au plus près de leur naissance, sous peine de longues poursuites à travers champ ou l’éleveur pourra juger de la vigueur de son animal. « Pour le bouclage, j’utilise une ceinture qui contient les pinces et les boucles. Je me rapproche de la mère et du veau, et les sépare rapidement par le fil d’un enrouleur de 60 m.

[caption id=”attachment_884″ align=”aligncenter” width=”300″]led-boitier Les LED clignotent en rouge si le courant passe dans le fil. Ces témoins sont placés judicieusement, tournés vers l’éleveur.[/caption]

Le veau et la mère n’ont pas le temps de comprendre ce qui se passe, les boucles sont déjà en place ». L’opération se faisait avant avec un simple râtelier sans fond que Loïc posait sur le veau, avec une caissette aménagée à l’intérieur si besoin pour le déplacer. « Il faut toujours veiller à sa sécurité, un accident peut vite arriver ». Simplicité, sécurité et travail agréable sont les maîtres-mots de cet élevage
biologique. Fanch Paranthoën[nextpage title=”Synchronisation rime avec organisation”]

Pour l’éleveur d’allaitantes qui choisit l’IA, synchroniser les chaleurs constitue une voie pour réduire l’astreinte liée à la détection des chaleurs et à l’insémination.

En termes de groupage des vêlages, on ne fait guère plus simple qu’avec un taureau : pas de temps d’astreinte pour détecter les chaleurs ; pas de travail pour ramener les vaches au box d’insémination. Mais quand on est attaché à la génétique et au choix individuel du taureau en fonction des qualités et défauts propres à chaque vache, cette formule « laissons faire la nature » n’est pas satisfaisante.

Grouper 40 vêlages en deux périodes

C’est aussi l’avis de Jean-Philippe Rigaud, éleveur d’une quarantaine de Blondes d’Aquitaine à Saint-Gildas, qui privilégie l’accouplement individuel des femelles de son troupeau. « Il y a d’abord l’aspect facilité de naissance. À ce niveau, je suis particulièrement prudent pour les primipares, mais aussi pour les vaches adultes. Puis, je suis attentif aux qualités maternelles et aux facilités de vêlage des futures reproductrices ». Procéder ainsi passe inévitablement par la case insémination.
Parce que l’insémination est relativement chronophage – « d’autant qu’une Blonde vient difficilement en chaleur quand elle est en stabulation ou l’exprime mal » –  Jean-Philippe Rigaud a choisi d’essayer la synchronisation des chaleurs en 2014. « En lien aussi avec le fait que j’ai trois productions (vache allaitante, porc à l’engrais et volaille label) sur l’exploitation et qu’il faut donc être organisé ».
« Mon idée est d’avoir deux périodes de vêlage, avec si possible plus de naissances en hiver-printemps pour optimiser l’occupation des bâtiments. En résumé, les vêlages de printemps ont lieu à l’extérieur et les broutards nés en hiver sont vendus avant la rentrée à l’étable ».

Conduite du troupeau

  • Objectif âge à l’insémination des génisses : 18-20 mois
  • Ration des génisses et des vaches en hiver : maïs ensilage (1 heure de consommation le matin), foin ou enrubannage, orge, correcteur (colza+ soja).
  • Pas de flushing en concentré ou minéral avant IA.

Pâturage :

  • prairies temporaires et permanentes sur deux sites (distants de 3 km).
  • RGI + trèfle incarnat entre céréales et maïs : pâturage à l’automne, suivi d’un pâturage précoce au printemps (avant le 1er avril).

Premiers essais convaincants

Le premier groupage a concerné 8 vaches en mars 2014. Premier essai concluant puisque toutes ont été remplies du premier coup. « Les vaches synchronisées sont toutes échographiées à 35 jours de gestation présumée », ajoute-t-il.
Un deuxième groupage a été effectué le 20 juin 2014. Avec moins de réussite puisque 8 vaches sur 15 ont retenu à la 1re IA. Le 3e lot synchronisé comptait 19 femelles dont 10 génisses. Résultat des courses pour ce lot : 16 femelles pleines à la 1re IA. Jean-Philippe Rigaud fait un premier bilan sur ces 3 lots : 32 femelles sur 42 pleines en 1re IA, soit un taux de réussite de 75-80 %.
Pour cet éleveur costarmoricain, le groupage doit contribuer à parvenir à l’objectif d’un veau par vache et par an. « Car le repérage des chaleurs en Blonde est parfois difficile. Elles ont des chaleurs fugaces et discrètes. Même en allant les voir deux fois par jour, on n’est pas sûr de toutes les observer ». Quant à l’échographie systématique, elle permet de relâcher l’attention sur la surveillance. « Sinon, on a toujours le doute d’un retour non vu », dit-il. Cette économie de temps compense bien l’investissement autour de 25 €/VA pour la synchronisation.

[caption id=”attachment_888″ align=”aligncenter” width=”300″]blonde-aquitaine Avantage de la synchronisation : des lots de veaux homogènes.[/caption]

Moins de manipulations

Reste la contrainte de la mise en œuvre du groupage souvent mise à l’index par certains éleveurs. « Personnellement, je ne trouve pas cela pénible. D’autant qu’en hiver, les vaches sont habituées à être bloquées tous les matins pour manger le maïs », observe l’éleveur qui met en parallèle le temps passé à rentrer le troupeau quand on pratique l’IA au coup par coup. « En groupage, il y a seulement 4 opérations sur 3 jours et ce, quelle que soit la taille du lot : la pose de la spirale pour bloquer les cycles (le mardi) ; l’injection de prostaglandines (le mardi suivant) ; l’injection de PMSG et le retrait des spirales (le mercredi) ». L’insémination étant pratiquée 56 heures plus tard, c’est-à-dire le vendredi. Didier Le Du

[nextpage title=”Dix ans sans césarienne avec les vieux taureaux”]Pour éviter les risques et complications liés à l’opération, Olivier Allain choisit toujours de vieux taureaux, « plus chers mais confirmés ailleurs ».

« Il y a environ 130 vêlages par an sur l’exploitation. Pourtant, je n’ai pas eu de naissance par césarienne depuis plus de dix ans », confie Olivier Allain, éleveur de vaches allaitantes à Corlay (22). Un résultat qui ne doit rien au hasard puisque la conduite de son atelier est basée sur le choix des reproducteurs et l’organisation de la mise à la reproduction.

Une vache opérée est déclassée

Chez lui, à l’heure de choisir un mâle, « la facilité de vêlage est le critère numéro un ». À cause de ses responsabilités professionnelles qui l’éloignent régulièrement de l’élevage compliquant la surveillance, « éviter à tout prix une césarienne est la priorité ». En fait, le producteur, perfectionniste, vivrait le recours à la chirurgie comme un « échec ». Pourquoi tant redouter, voire exécrer, l’opération ? « En élevage allaitant, en termes de rentabilité, ça ne colle pas. D’abord, il y a la facture de la césarienne. D’autant qu’il y a un risque de veau mort puisqu’on y a recours souvent pour de gros spécimens. Là, face à la dépense, il n’y aura pas de recette. » Avant de poursuivre : « Je vends beaucoup d’animaux en Label rouge. Or une vache ayant subi une césarienne est automatiquement exclue de la valorisation label. Il y a d’emblée, là aussi, une moins-value financière… » L’animalier note également « que la vache est un peu fragilisée après la chirurgie. Elle est moins maternelle, voire peut refuser son veau qu’elle n’a pas vu naître à cause de l’anesthésie. Ensuite, les jours de convalescence, les injections d’antibiotiques peuvent la rendre plus farouche. »

[caption id=”attachment_889″ align=”aligncenter” width=”300″]olivier-allain-eleveur-vache-allaitantes Olivier Allain, éleveur de vaches allaitantes à Corlay (22)[/caption]

Un vieux taureau, plus cher mais plus sûr

Le costarmoricain explique sa stratégie, « peut-être un peu atypique », pour éviter la naissance assistée. « Je n’achète plus de jeunes reproducteurs depuis 15 ans. Je ne choisis que des taureaux qui ont été testés et validés chez d’autres agriculteurs. » Les animaux sont repérés grâce aux petites annonces dans la presse agricole. « Je me rends sur place voir le mâle et ses produits. Et surtout discuter avec le propriétaire. » C’est cet échange basé sur « la confiance et l’expérience » qui compte le plus. Généralement, c’est un taureau, que le vendeur « a gardé 3 ans dans le troupeau, qui lui plaisait mais qu’il doit se résoudre à remplacer pour éviter les problèmes de consanguinité » avec l’arrivée des premières filles dans le cheptel. Pour le propriétaire, c’est aussi l’occasion d’empocher « 400 ou 500 € de plus en le commercialisant comme reproducteur » plutôt que de le réformer. « Je paie plus cher pour ces mâles que je garde 3 ans à mon tour. Ils ont de bons aplombs, je connais leurs performances, c’est une vraie assurance… », justifie Olivier Allain.
Au total, l’élevage compte toujours « cinq vieux taureaux ». Le 1er mai, jour de la fête du travail, c’est eux qui bossent : « Ils sont lâchés tous les ans dans les différents groupes de vaches. » Cela assure près d’une centaine de vêlages groupés au mois de mars suivant, « facilitant la surveillance et permettant de se dégager plus facilement du temps le reste de l’année ». Toma Dagorn

[nextpage title=”La mélangeuse a réduit l’astreinte”]L’introduction de la ration mélangée en septembre dernier a permis des gains de performances accompagnés d’une économie et de la souplesse en temps et de travail.

Au Gaec Le Rohan à Lanrelas (22), parallèlement aux activités laitière et porcine, un atelier de taurillons est mené depuis la fin des années 70 « pour diversifier encore davantage ». 60 places en bâtiment pour 35 à 40 animaux commercialisés par an. « Ce cheptel à l’engraissement est constitué de tous les mâles laitiers et de quelques achats de veaux croisés pour compléter les cases », explique Patrick Harivel, l’un des associés.
« Le but est d’atteindre un poids carcasse de plus de 350 kg à 18 mois, pour un départ à partir de 370 kg… » Si les taurillons partis début mai, « à l’âge de 20 mois », ont atteint l’objectif, « avant, nous n’étions pas dans les clous », avoue l’éleveur. Ces récents progrès ont une origine bien identifiée : « L’arrivée de la mélangeuse en septembre dernier sur l’exploitation » qui a poussé la désileuse de 4 m3 au placard… Les rations comme l’organisation de l’alimentation ont été remises à plat.

[caption id=”attachment_890″ align=”aligncenter” width=”300″]vaches-etable Depuis septembre, les taurillons reçoivent une ration mélangée. Les croissances se sont améliorées et l’astreinte du poste alimentation a baissé, notamment le dimanche. La mélangeuse à pales de 14 m3 est traînée par le tracteur de 55 cv de 1982 qui portait auparavant la désileuse-pailleuse. « Le plus frappant est que la mélangeuse réclame moins de carburant que la désileuse », apprécient les associés.[/caption]

Chez les jeunes, une ration préparée pour trois semaines

De l’âge de 3 semaines à 6 mois, les veaux mâles comme les génisses reçoivent désormais une ration sèche maison à base de paille, mélasse, pulpe de betteraves, maïs grain sec (autoproduit puis broyé par la coop), correcteur azoté et minéral. « Auparavant, à partir de 3 mois, les veaux étaient nourris au maïs ensilage apporté à la désileuse deux fois par jour. Grâce à la mélangeuse, nous préparons ce mélange sec, en une heure, toutes les trois semaines. En temps et en souplesse d’organisation, c’est un gain énorme pour nous », apprécie Erwan Harivel, installé avec son père. « Et puis, les croissances sont meilleures. Il n’y a pas photo. Si on prend le développement à 6 mois qui est un repère classique, la progression est nette. » Et Patrick Harivel d’ajouter : « Parallèlement, l’aspect sanitaire semble s’être amélioré avec le changement de régime. Nous avons beaucoup moins de toux sur les jeunes bovins. »
Après 6 mois, les taurillons initialement engraissés au maïs ensilage ont désormais un menu plus varié. La recette par tête : 700 g de paille, 20 kg brut de maïs soit l’équivalent d’environ 7 kg de matière sèche,
2 kg de correcteur azoté, 1,5 kg de céréales broyées, 180 g de minéral et 20 g de sel. « Ils poussent mieux, ont meilleur poil et partent plus jeunes… », synthétisent les associés qui ne regrettent pas un instant la révolution alimentaire qu’ils ont menée.

La ration sèche des 3 à 6 mois

Toutes les 3 semaines, 1,5 t de ration sèche est préparée et distribuée à volonté pour les animaux de 3 à 6 mois. Pour 100 kg de cette ration, comptez 22 kg de paille, 29 kg de pulpe de betteraves, 17 kg de maïs grain broyé, 17 kg de correcteur azoté, 13 kg de mélasse et 2 kg de minéraux. Avec 9 mois de recul, cette approche a fait « gagner du temps aux associés et de la croissance aux jeunes animaux ».

6 ou 7 ha de maïs économisés grâce à la pesée

Ce sont deux visites d’élevages laitiers utilisant la ration mélangée qui les ont décidé à investir dans une mélangeuse : « Nous avions été frappés par la quantité de lait produit à la surface grâce aux fourrages des exploitations. » Avec 9 mois de recul avec leur machine, les performances zootechniques ont également fait un bond chez eux : « L’investissement va se rentabiliser tout seul. Les vaches produisent 2 à 3 L de lait par jour en plus avec des taux améliorés. Cette année, le TP n’a pas chuté à la mise à l’herbe. » Mais ce qui surprend le plus Erwan et Patrick Harvel, « même sur l’atelier engraissement », est l’économie de fourrages réalisée « notamment grâce au système de pesée » qui équipe la remorque mélangeuse : « Cela nous pousse à être beaucoup plus précis. Les commerciaux annonçaient 20 %, mais nous n’y croyions pas car c’est une économie énorme. En fait, nous n’en sommes pas loin. Au final, ce sera l’équivalent de 6 à 7 ha de consommés en moins sur l’année. Et pour cela, il n’est même pas sûr qu’on ait apporté davantage de concentré à la tonne de viande ou de lait produite. » Ils apprécient aussi le gain de temps. « En attendant de mettre des vis en place pour charger directement les concentrés et d’avoir trouver le bon outil pour broyer et stocker des brins de paille de la bonne longueur, le plus long reste de couper les rounds dans la machine. L’astuce est d’y glisser un peu de maïs ensilage qui la compresse pour qu’elle se hache plus vite. Nous faisons tourner la mélangeuse le soir pendant la traite durant 20 minutes avant de la mettre à l’abri jusqu’au lendemain matin et la préparation des rations. » Et surtout, le dimanche, pour l’associé qui est d’astreinte, le travail ne dure plus que 2 h 30 contre 4 h auparavant, puisque les mélanges distribués le samedi soir n’ont qu’à être repoussés « en 30 secondes grâce au tracteur. » Toma Dagorn


Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article