Marché européen : L’Espagne, première puissance porcine

Première productrice de porcs de l’Union européenne, l’Espagne a bâti sa puissance sur les marchés extérieurs. En 10 ans, elle a multiplié par 8 ses exportations hors UE, portée par la demande asiatique. Une stratégie gagnante, mais fragilisée par la dépendance à ces débouchés et par les aléas sanitaires.

Un paysange de montagne ensoleillé avec un bâtiment d'élevage de porc et des silos à grain - Illustration Marché européen : L’Espagne, première puissance porcine
Élevage de porc 
au nord-est de l'Espagne. | © Paysan Breton - T. Dagorn

L’Espagne représente un quart des abattages de porcs de l’UE. C’est aussi le deuxième pays consommateur de porc de l’UE avec 2,75 millions de tonnes équivalent carcasse (tec) en 2024 et une progression de + 9 % par rapport à 2015. Le premier pays consommateur est l’Allemagne avec 3,25 millions de tec en retrait de – 22 % comparé à 2015. La France arrive en troisième position avec 2,16 millions de tec en recul de – 6 % sur les 10 dernières années.

La part des marchés tiers atteint 62 %

Le porc est la viande la plus consommée dans l’UE avec 50 % des volumes devant la volaille, 35 % et le bovin, 12 %. « La consommation de viande de porc est stable en Espagne à hauteur de 55 kg par habitant et par an, l’Allemagne est en recul à 39 kg/habitant/an et la France est juste derrière à 31 kg/habitant/an », rapporte Christine Roguet du pôle économie de l’Ifip.

L’export tire la croissance

« Depuis longtemps c’est l’export qui tire la croissance de la production en Espagne. En 2024, le taux d’auto-approvisionnement était de 178 %. En comparaison, l’Allemagne est à 134 % et la France à 105 %. Sur la période 2015-2021, la production espagnole a augmenté de 1,2 million de tec qui ont trouvé intégralement leurs débouchés sur les marchés d’export. Sur 2021-2024 la production a diminué du fait des problèmes sanitaires et l’export a reculé en lien avec les pertes de débouchés », décrit Christine Roguet. Le succès à l’export de l’Espagne se traduit avec une balance commerciale qui a augmenté de façon exponentielle en valeur. En 2024, l’excédent commercial en porc était de près de 8 milliards d’euros pour un excédent en volume de plus de 2,4 millions de tonnes.

Un portefeuille de clients très diversifié

La présence de l’Espagne à l’international s’est intensifiée et diversifiée. La part des marchés tiers (hors UE) dans les exportations totales était de 26 % en 2013, elle a atteint 62 % en 2021. Sur le marché intra-communautaire, le portefeuille de clients de l’Espagne est très diversifié avec des clients historiques comme la France, l’Italie et le Portugal tout en développant de nouveaux marchés à l’Est : Pologne, Roumanie, République tchèque… « Hors UE, c’est moins diversifié avec une forte dépendance au marché asiatique en particulier la Chine tout en saisissant des opportunités d’exporter vers le Mexique (2e pays importateur au monde), Canada, USA. Sur ces 3 destinations, les 10 dernières années, l’Espagne a multiplié par près de 8 ses exportations. »

Une meilleure valorisation des exportations

L’Espagne exporte vers l’UE principalement des pièces de découpe fraîches désossées et des jambons avec os (Italie et France) pour la transformation. Le volume des exportations désossées a doublé ces 10 dernières années. 10 % des exportations vers l’UE sont des produits transformés destinés aux marchés français et portugais. Sur les marchés asiatiques la demande en abats est forte en Chine, aux Philippines et au Vietnam. Le Japon, la Malaisie, la Corée du Sud et Taïwan sont plus demandeurs de pièces de découpe. « L’Espagne parvient à mieux valoriser ses exportations sur le marché intra-communautaire. L’écart de valorisation est notable avec l’Espagne qui était à 2,57 €/kg (tous produits hors vif) sur 2014-2021 quand la France était à 2,35 €/kg, les Pays-Bas et le Danemark étaient à moins de 2 €/kg. »

Nicolas Goualan

Les multiples défis de la filière espagnole

Opinion – Christine Roguet – pôle économie de l’Ifip

Le ciel de cette success story s’assombrit un peu. Les défis de la filière porcine espagnole sont multiples. Ils sont sociaux : les éleveurs vieillissent et la transmission des exploitations et le renouvellement des actifs ne s’annonce pas si simple que ça. Ils sont sociétaux, avec la montée des controverses et des oppositions entourant l’élevage intensif. Ils sont réglementaires avec l’entrée en application depuis 2022 d’une multitude d’applications pour réduire l’usage des antibiotiques, la biosécurité, la protection animale. Ils sont sanitaires avec le SDRP et la PPA. Mais ils sont aussi économiques avec la hausse des coûts de l’aliment, de l’énergie et du travail, ajoutés à la fermeture de débouchés et la concurrence à l’export.


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