La précision de l’autoguidage RTK à prix malin

Pierre-Henri Roussel, polyculteur-éleveur à Locoal-Mendon (56), a équipé deux tracteurs d’un système d’autoguidage low cost, utilisant un volant électrique et le signal de correction RTK Centipede.

terminal de guidage dans une cabine de tracteur - Illustration La précision de l’autoguidage RTK à prix malin
Le terminal dispose d’un grand écran tactile à l’affichage soignée et réactif. | © M. Portier

« Ayant goûté à l’autoguidage intégré sur mon tracteur de tête, j’ai rapidement perdu patience avec la barre de guidage que j’utilisais sur mes autres tracteurs », retrace Pierre-Henri Roussel, éleveur de Charolaises sur une centaine d’hectares à Locoal-Mendon (56). Réalisant en parallèle une activité de prestation de travaux (épandage, travail du sol et semis), il souhaitait gagner en confort de conduite et en précision. Après avoir étudié les différentes offres de guidage RTK à bas coût du marché, il opte à l’automne 2024 pour un équipement Sveaverken distribué par la société Intrax. Pour limiter l’investissement, Pierre-Henri Roussel n’achète qu’une console de guidage et une antenne GNSS qu’il transfère d’un tracteur à l’autre. « Avec le pré-équipement comprenant le volant motorisé, le câblage, le support d’antenne et le capteur d’angle, le tarif s’élève à 5 100 euros HT pour un tracteur. J’ai rajouté 3 200 euros pour équiper le second tracteur. » Autre façon de réduire la facture, l’agriculteur a réalisé lui-même le montage du système.

Le transfert entre les deux tracteurs ne prend que cinq minutes

Un kit installé en autonomie

« Après avoir reçu les différents composants du kit, je me suis laissé guider par les vidéos tutorielles. Cela n’a rien de compliqué, il faut compter une demi-journée de travail par tracteur. » L’éleveur a ainsi collés et vissés deux supports au toit des cabines, sur lesquels vient se fixer, à l’aide de quatre vis papillons, la platine supportant l’antenne. En cabine, le terminal est installé au moyen d’une boule RAM. « Le transfert d’un tracteur à l’autre ne prend que cinq minutes », apprécie Pierre-Henri Roussel.

La phase de montage la plus chronophage concerne la pose du volant motorisé et le passage des câbles. « Le volant électrique a été plus facile à adapter sur la colonne de direction du Renault 155.54 que sur celle du McCormick XTX 185. Au passage, il faut vérifier que le verrouillage du réglage d’inclinaison de la colonne supporte bien le poids conséquent du volant motorisé. J’ai passé un certain temps à trouver le bon cheminement des câbles dans les capitonnages de la cabine. J’aurais aimé avoir un peu plus de marge sur la longueur de celui reliant le capteur d’angle fixé sur le pont avant. »

Assistance et mise à jour à distance

Une fois le montage réalisé, restent deux étapes cruciales : le paramétrage et le calibrage du volant. « J’ai dû mesurer précisément plusieurs dimensions, comme l’empattement, la position de l’antenne par rapport à l’essieu arrière, la distance entre l’essieu et le relevage… » Quant au calibrage du volant selon le tracteur, il est mis en œuvre à distance par le technicien d’Intrax, grâce au modem intégré à la console, nécessaire à la réception du signal RTK Centipede. «La carte SIM est fournie gratuitement pour un an. Je devrai donc souscrire un petit abonnement mensuel à un opérateur de téléphonie, sauf si je fais le choix d’utiliser le partage de connexion de mon Smartphone. La prise en main à distance m’a aussi été très utile pour m’accompagner dans la découverte de quelques subtilités de réglage. Elle évite également le déplacement d’un technicien pour effectuer les mises à jour du système. »

Une tablette tactile intuitive

Utilisateur confirmé des système de guidage, Pierre-Henri Roussel n’a eu aucun mal à prendre en main la console Sveaverken. « Le grand écran tactile fonctionne à la manière d’une tablette. Les menus sont assez intuitifs. J’ai pu enregistrer mes outils et les différentes tâches effectuées sur chaque parcelle. J’y retrouve facilement les lignes de guidage définies. Pour créer les lignes, le mode mixant droites et courbes est particulièrement bien pensé. L’enregistrement de la surface travaillée est précis, les chevauchements étant bien décomptés. En points d’amélioration, j’attends une nouvelle mise à jour qui offrira plus de choix et de précision dans la dénomination des tâches et des outils. Il manque aussi un mode nuit dans la gestion de l’éclairage de l’écran. »

Obtenu gratuitement en se connectant à l’une des bases du réseau Centipede, le signal de correction RTK offre la précision attendue. « Je règle la largeur exacte des outils et je peux travailler en sautant des lignes. Le système est plus précis que le guidage intégré sur mon Fendt utilisant le signal RangePoint RTX pourtant payant. Malgré l’utilisation d’un volant électrique, je ne vois pas de différence dans les reprises de lignes. Et le gros avantage du RTK, c’est de pouvoir reprendre la même ligne de guidage à plusieurs jours d’intervalle, sans aucune dérive. »

Base Centipede à 15 km

Pierre-Henri Roussel reste cependant vigilant par rapport au signal Centipede. « J’ai débuté en me connectant à une base implantée à 6 kilomètres qui donnait d’excellents résultats. Mais celle-ci a cessé d’émettre du jour au lendemain ! J’ai dû me rabattre sur une base plus éloignée à 15 kilomètres. Heureusement, la précision reste amplement suffisante pour mes travaux. Dans l’avenir, je m’équiperai peut-être de ma propre base. »

L’agriculteur n’a pas opté pour la fonction des demi-tours automatiques disponible en option. « Cela me paraissant superflu compte tenu de la petite taille de mes parcelles. Les manœuvres s’effectuent sans effort. Il y a juste un petit délais à la reprise du volant pendant lequel la direction est dure avant que le guidage se désactive. Mais je peux l’éviter en désactivant le guidage au préalable via le terminal ou le bouton Bluetooth que l’on positionne où l’on veut. » Il compte, en revanche, valoriser la compatibilité Isobus de sa console pour la coupure de sections sur son pulvérisateur. « Cette fonctionnalité sera bientôt disponible », assure-t-il.

Michel Portier

Les offres low cost se multiplient

Le marché des systèmes d’autoguidage adaptables (sur tracteurs ou automoteurs) est en plein boom depuis l’arrivée de nombreux acteurs asiatiques. Leur tarif particulièrement agressif évolue entre 4 000 et 7 000 euros, selon les équipements et les fonctionnalités proposés. La plupart de ces offres sont constituées d’un kit comprenant une console tactile, un volant motorisé, un capteur d’angle pour le pont avant (utile pour des travaux à faible vitesse) et tous les accessoires de câblage et de fixation. Certains fournisseurs proposent également des systèmes à pilotage hydraulique directement raccordés sur le BusCan d’un tracteur prééquipé pour l’autoguidage. Ces solutions utilisent un récepteur GNSS disposant d’un modem permettant de capter gratuitement le signal de correction mono-base RTK du réseau Centipede. Les acteurs les plus en vue sont CHCNav, Farmtek, FJ Dynamics, Sveaverken, FieldBee ou encore AllyNav et Hi-Target. À tarifs et qualité de composant similaires, le choix sera guidé par le sérieux de la structure commercialisant le produit et la qualité de son SAV. Selon les fournisseurs, le kit peut être installé par l’agriculteur pour limiter les coûts. Mais la solution la plus radicale consiste à concevoir soi-même son kit d’autoguidage en utilisant le logiciel open source AgOpenGPS et des composants achetés sur le web. Certains s’en sortent pour moins de 2 000 euros. Une stratégie à réserver aux bricoleurs technophiles !

Le signal RTK démocratisé par Centipede

Lancé en 2019 par l’Inrae et divers acteurs publics et privés, le réseau collaboratif Centipede‑RTK repose sur un maillage de récepteurs à antenne fixe servant de références réparties sur tout le territoire. Ces bases se sont multipliées, l’Inarae en dénombrait 625 début 2025. Une partie d’entre elles a été installée par des agriculteurs ne disposant pas d’une base suffisamment proche de leur exploitation. Disponibles en kit, leur prix se situe aux alentours de 500 euros.Chacune de ces stationsfixes envoie 24 h/24 des corrections (format RTCM via Internet/NTRIP) captées, via le réseau de téléphonie mobile, par le modem associé au récepteur GNSS du tracteur. Les utilisateurs accèdent ainsi gratuitement à un signal RTK centimétrique dans un rayon de 10 kilomètres autour d’une base. De 10 à 20 km, la correction peut être perturbée par les conditions atmosphériques et dépend de la qualité du récepteur embarqué. Au-delà, la précision devient décimétrique.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article