Parfois peu accessibles, souvent peu productives, voire désormais embroussaillées : les prairies humides ne cochent plus les cases des systèmes agricoles contemporains. En Bretagne, elles sortent peu à peu des itinéraires techniques, faute de rentabilité immédiate. Elles ne s’intègrent ni aux logiques hors sol, ni aux ateliers bovins misant sur la simplification du travail et la performance par animal.
Mais à l’heure où les politiques publiques veulent rémunérer les services rendus par l’agriculture au territoire, ces zones délaissées reviennent dans le jeu. Les PSE (Paiements pour services environnementaux) amorcent une reconnaissance de leurs fonctions naturelles : régulation hydraulique, stockage du carbone, accueil de biodiversité.
Une autre forme de valeur peut émerger
Ces fonctions, hier perçues comme des externalités, deviennent des leviers de revenu. Dans certains territoires pilotes, ces contrats permettent de maintenir l’ouverture des milieux, d’optimiser la gestion des eaux de ruissellement, et de redonner un sens agronomique à ces parcelles.
Il ne s’agit pas de bouleverser les systèmes, mais de réintégrer des zones longtemps perçues comme contraintes dans une logique multifonctionnelle. Dans ces champs où le potentiel agronomique est limité une autre forme de valeur peut émerger.
Les prairies humides ne relèvent pas du passé, mais d’un futur à inventer. Elles sont un espace de négociation entre production et régulation, entre performance technique et durabilité territoriale. Encore faut-il les relire non comme un poids, mais comme une pièce d’un système plus résilient.
La transition agricole ne passera pas uniquement par la technologie ou les labels. Elle passera aussi par la capacité à réintégrer ces marges dans une vision d’ensemble. Ce que nous faisons des prairies humides dit beaucoup de ce que nous voulons faire de nos campagnes.
