17379.hr - Illustration Semer les graines de la formation en Guinée Conakry
De gauche à droite : N’Gaye Traoré et Stéphane Quéré.

Semer les graines de la formation en Guinée Conakry

N’Gaye Traoré aime sa nation d’origine, la Guinée Conakry. Installé en France depuis 2008, il veut mettre sur pied une formation agricole dans son pays natal, pour aider les paysans africains à acquérir plus de connaissances.

Le chemin de ces deux hommes était fait pour se croiser. Le  premier, maraîcher, éleveur et paysan boulanger à Cléder (29), possède de nombreuses cordes à son arc. Passionné de musique traditionnelle, Stéphane Quéré a plusieurs fois voyagé en Guinée Conakry pour écouter le son des percussions, notamment celles de Kouroussa, mondialement connues. Cette contrée africaine regorge de trésors musicaux. Le rythme des percussions guide les tâches quotidiennes, les danses traditionnelles reproduisent le geste auguste du semeur.

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Les premières planches sont en cours de préparation, sur la ferme de Guinée.

Le second, Guinéen en France depuis 2008 et à la tête d’un cabinet de conseil en évolution professionnelle, aime sa terre d’origine et voudrait développer des formations agricoles pour que la population de ce pays d’Afrique de l’Ouest puisse vivre et s’alimenter de sa propre agriculture. Aussi appelé le pays des muets car les autochtones ne parlaient généralement pas la langue berbère, la Guinée « est un paradoxe : c’est un pays vert, avec de la chaleur, de la pluie et des terres fertiles. L’espérance de vie en bonne santé n’est que de 47 ans ; l’espérance de vie tout court n’est pas beaucoup plus élevée. C’est une injustice de mourir si tôt », déplore N’Gaye Traoré. Des maladies liées à l’alimentation se multiplient comme le diabète ; les Guinéens importent une grande majorité de leur nourriture. « C’est un pays qui ne devrait pas tendre la main : on a tout sur place ». Les trois quarts des gens vivent à la capitale Conakry.  « 50 % de la production alimentaire est perdue entre les champs et les marchés. Le modèle agricole est ancien ; il a besoin d’un coup de pouce ». Le Guinéen veut marcher dans les pas de son père, aujourd’hui disparu, qui souhaitait apporter la formation agricole nécessaire à la bonne conduite d’une ferme. Hormis des diplômes d’ingénieur, il n’existe pas d’école agricole enseignant les rudiments de l’élevage et de l’agronomie. Un manque que le Franco-Guinéen veut absolument combler : « Plutôt que de donner du poisson à la population, je préfère leur donner des cannes à pêche et leur apprendre à pêcher », illustre-t-il.

Viande et légumes

N’Gaye Traoré a déjà acheté 30 ha de terre dans son territoire natal. Là-bas, à Kindia, le ciel donne 1 500 mm d’eau par an. Dans cette forte zone agricole, l’accès au foncier commence à être compliqué. « Quand on achète un terrain, il faut absolument le baliser, sous peine de voir les vendeurs venir reprendre les terres. Je retourne 2 fois par an sur mes terres ».

C’est un pays vert, avec de la chaleur, de la pluie et des terres fertiles

Sur ses parcelles, il souhaite cultiver des légumes « type ratatouille, des piments, du gingembre, des mangues à sécher. Avec une serre et un atelier de transformation, j’aimerais produire des conserves de tomate ou des pots pour bébés ». Aussi et en reprenant les pratiques de Stéphane Quéré, N’Gaye pense à faire du pain, « les Guinéens en mangent beaucoup. En revanche, ils ne consomment pas de lait ». Dans un système polyculture élevage, il pense à la même race bovine élevée par son copain breton. « La Salers est très rustique et est capable de vivre dans plusieurs endroits différents dans le monde ». Dans ce projet de ferme et d’apprentissage des techniques agricoles, N’Gaye espère développer un volet social. « Je souhaite au maximum embaucher des femmes, qui sont des piliers de la société, ce sont elles qui tiennent les foyers. Si elles ont plus d’autonomie, c’est toute la société qui en bénéficiera ».

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Démarrage des labours.

Le jeune homme reste lucide. « Je ne veux surtout pas transposer le modèle de Stéphane là-bas », résume-t-il, en pensant plutôt à emprunter des pratiques du maraîcher clédérois. « Je ne vais pas changer l’espérance de vie à moi tout seul ». Par philanthropie, il veut simplement « amener des produits plus qualitatifs, éveiller les consciences, faire prendre du recul ».

Un voyage pour bien choisir

En fin d’année, Stéphane et N’Gaye iront en Guinée, afin de réfléchir à l’agencement du terrain, au choix des matériels de traction ou de semis nécessaires à l’activité, pour penser à des solutions alternatives aux brulis. Déjà, des tomates et des aubergines poussent dans une placette expérimentale, « afin de voir comment le terrain se comporte ». Reste enfin à rédiger le contenu des formations agricoles qui seront dispensées. Pour cela, les 2 hommes s’appuient sur les compétences de Denis Amice, référent FOAD (formation ouverte à distance). « Nous allons créer une association qui nous servira de support pour les échanges entre les 2 pays, et qui pourrait servir de mise à disposition de moyens humains », conclut-il. 


10 commentaires

  1. Ousmane SOUARE

    Toutes mes félicitations M. TRAORE pour cet ambitieux projet.
    Dans tous ses volets, ce projet va non seulement booster les jeunes entrepreneurs locaux, mais va inspirer d’autres Guinéens comme vous, soucieux d’aider en leurs manières, les communautés guinéennes dans la qualification de leur niveau de vie.
    Bon courage cher compatriote !

    1. N'gaye TRAORE

      Merci

  2. Maryvonne Perramant

    Cet article m’a beaucoup plu
    Quand je travaillais dans le milieu de la pomme de terre, nous avons formé un groupe de femmes maliennes, un burkinabé dont le prénom est Mathurin et qui est venu plusieurs fois dans le Finistère pour monter un projet de semences de pommes de terre. Son problème principal était la conservation des semences. Ils avaient même monté un commerce où l’on vendait des frites et il y avait un accès internet. Je pense qu’il faut soutenir l’autosuffisance en production agricole. Dans le domaine de l’agronomie il y a une association France Afrique dont je ne me rappelle plus le nom. Les produits importés sont coûteux pour la population et parfois détourné avant leur arrivée dans les campagnes.
    C’est un beau projet et vu la détermination des protagonistes, il aboutira.

    1. TRAORE

      Merci

  3. Dramé

    Bonjour,
    Etant moi même ingénieur agronome d’origine guinéenne, installé et travaillant en France dans ce domaine, je trouve le projet d’une grande importance. une belle initiative. Je serai ravi d’avoir le contact de Mr Traoré pour voir dans quelle mesure, je peux apporter ma contribution sur ce projet de formation.

    Bien cordialement,

    1. TRAORE

      Bonjour Monsieur Dramé.
      Merci pour votre commentaire.
      Au plaisir d’échanger avec vous.
      tngaye@gmail.com ou 0634876456.
      A bientôt
      N’gaye

  4. PRIMO Yann, dirigeant de Drone Preview

    Quel plaisir de découvrir en dernière page du Paysan Breton cet article sur N’Gaye Traora et Stéphane QUERE.
    J’ai travaillé moi-même de 1989 à 1996 en Guinée-Conakry. Basé à Kindia, j’y étais chef des projets “Relance de la traction bovine dans la région de Kindia”, puis “Traction bovine et distribution de la traction animale dans la région de Dabola”. La photo du jeune laboureur représente la finalité de ces projets : “un homme, un attelage”. La race locale N’Dama est certes petite de taille, mais très adaptée à la sècheresse, tolérante au tripanosiase et assez rapide pour un labour peu profond. Durant ce projet, le Réseau Guinéen pour la Traction Animale (RGTA – une association de droit guinéen) a pris en charge la pérennisation des formations du dressage des bœufs et le suivi des stagiaires pour la réussite de l’application des techniques attelées (labour, hersage, binage, sarclage et transport) , avec l’appui de Trias-Guinée et des multiples bailleurs de fonds.

    1. TRAORE

      Merci monsieur Primo. A bientôt

  5. Fatoumata DOUMBOUYA

    Mr Ngaye parfait pour tout ce que tu as comme ambition deviendra réalité un jour. Tu aimes ton pays d ‘origine et tu comptes te servir de l’expérience des paysans de la Bretagne afin d’atteindre ton objectif.

    1. TRAORE

      Merci

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