Pas de miracle en vue pour le colza

Alors que l’approvisionnement en tourteau de soja non OGM est devenu problématique, les alternatives ne sont pas légion, colza en tête. L’UE est structurellement déficitaire en graines de colza, et s’approvisionne depuis de nombreuses années auprès des trois grands exportateurs que sont le Canada, l’Ukraine et l’Australie. Ces deux derniers pays étaient traditionnellement privilégiés pour le caractère non OGM de leur colza, ce qui n’est pas le cas du canola canadien. Mais lorsque la marchandise est rare, on achète ce que l’on peut. Et les trois pays se répartissent assez équitablement l’approvisionnement européen (6,6 Mt) cette saison. Le marché en feu Face à la forte demande mondiale en huile, les réserves en graines de colza de l’hémisphère nord ont été siphonnées. L’Australie a pris le relais. Mais, en mai 2021, le marché est toujours en feu, et le Canada achète de la graine en Ukraine, qui elle-même s’approvisionne en Australie… C’est dire à quel point nous assistons à une course contre la montre pour alimenter les marchés mondiaux avant l’arrivée des prochaines récoltes européenne, ukrainienne, puis canadienne. Le contrat « juillet » sur le marché à terme de Winnipeg a franchi des sommets inégalés. À 1000 CAN$/t, son prix a doublé en un an. Cela équivaut à 680 € /t (825 $). Pas de comparaison possible avec le marché européen où il n’y a plus de marchandise à vendre. Sur la prochaine récolte, Euronext cote 540 €/t (contrat août) contre 500 €/t au Canada (735 CAN$/606 US$). Réserves divisées par trois au Canada L’avenir du marché du colza va dépendre avant tout de la demande, car côté offre, nous savons déjà qu’il n’y aura pas de miracle. La production mondiale 21/22 pourrait s’accroître (au mieux) d’1 Mt, ce qui ne sera pas suffisant pour compenser la baisse des stocks. Au Canada, les réserves sont divisées par 3 et malgré les prix actuels, les semis et surtout la sécheresse sur les Prairies, laissent augurer une baisse de l’offre. En Ukraine, on s’attend au mieux à un statu quo, car il existe des cultures encore plus rentables aujourd’hui. Même situation en Russie qui aligne désormais des volumes identiques à sa voisine, mais qui stagnera cette saison. En Australie, il est difficile d’envisager qu’en 2022 le pays puisse aligner des rendements aussi exceptionnels que cette saison. Rappelons que le pays a doublé sa production, ce qui limite les dégâts aujourd’hui. De nouveaux venus émergent sur le marché mondial, comme l’Uruguay et l’Afrique du Sud, mais pour des volumes encore confidentiels. Europe très dépendante des importations Pour l’instant, la production 2021 de l’UE 27 est attendue relativement stable, à 16,4 Mt, en espérant que les dégâts occasionnés par le gel et la sécheresse soient derrière nous. En Allemagne, les perspectives sont optimistes (3,7 Mt), tout comme dans les pays de l’Est où les rendements devraient revenir à la normale. Ce n’est pas le cas de la France où nous avons perdu 40 % des surfaces en 3 ans. Avec des stocks de report très bas, le bilan de l’UE s’avère d’ores et déjà tendu et nous laissera encore très dépendants des importations si l’on veut triturer autant que cette saison (22,1 Mt). Avec l’Ukraine de plus en plus captée par la Chine et le Canada qui aura moins à offrir, il faudra que l’Australie assure. Mais notre demande dépendra de l’appétit chinois en huiles, qui reste une clé du marché à ne pas perdre de vue. En effet, la demande européenne est en grande partie liée au secteur biodiesel mais a aussi trouvé un relais de croissance dans la demande chinoise (300 000 t d’huile de colza déjà livrées sur 20/21 contre 75 000 t en 19/20). De l’avenir de ces deux débouchés, dépendront les besoins d’importations en graines de l’UE en 21/22 et donc le niveau de trituration et de tourteaux mis au marché.

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