5570.hr - Illustration La Chine en manque durable de viandes

La Chine en manque durable de viandes

Les virus de la Covid et surtout de la peste porcine africaine ont rebattu les cartes du commerce mondial des viandes. Qui fournira la Chine en 2023 ? Des économistes d’Abcis* tentent de répondre.

La production porcine chinoise est sonnée depuis le passage du virus de la peste (PPA). L’équivalent d’un quart de la production mondiale s’est évanoui. « Le seuil le plus bas de la production chinoise a été atteint en octobre 2019. Depuis, elle se relève, mais lentement en raison d’une gestion sanitaire calamiteuse », indique Jan Peter Van Ferneij, de l’Ifip. La biosécurité externe est difficile à garantir dans des élevages ouverts, l’absence de service d’équarrissage et de stations de lavage des camions est problématique, l’interdiction d’alimenter les porcs avec des déchets de cuisines collectives est contournée, le personnel est peu qualifié. De fait, de nouveaux cas apparaissent dans les petits élevages qui représentent toujours 50 % de la production.

« Les grandes fermes de plusieurs milliers de truies permettront un retour à un bon niveau de production en quelques années mais, souvent proches des villes, elles seront source de nuisances difficiles à accepter pour la population ». En parallèle de ce développement attendu, les Chinois ont investi dans des pays amis, indemnes du virus, comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande ou le Brésil. Malgré les relations commerciales tendues, les importations de viande de porc des États-Unis progressent. L’opérateur Smithfield est désormais propriété chinoise. La suppression de la ractopamine dans l’alimentation des porcs au Brésil et aux USA est envisagée pour satisfaire le marché chinois. La viande de porc pourrait toutefois être concurrencée par la volaille ou la viande bovine, produite dans le pays ou importée.

Le poulet brésilien

La production de volailles est proche de l’autosuffisance. La génétique importée permet de fournir la grande distribution ; les races locales inondent les marchés en vif, encore très nombreux malgré les crises sanitaires successives. « En 2025, les grands élevages modernes fourniront l’essentiel de la production et les marchés en vif auront probablement disparu », indique Jonathan Hercule, de l’Itavi (annonces mais pas de date fixée). Les prix au détail ont augmenté depuis la crise porcine. La restauration hors foyer a remplacé le porc par la volaille, notamment le canard, très consommé. Un bémol toutefois : « La chaîne logistique (transport d’aliment et d’animaux) a été impactée par la crise de la Covid. La production a baissé de 4 %, par exemple, dans la province du Hubei. Des poussins ont été euthanasiés ».

Cette situation concerne essentiellement le premier semestre 2020. Pour le spécialiste, la filière connaîtra un pic de production en 2021, puis un léger repli avec le retour d’une production porcine plus soutenue. « La Chine importe beaucoup d’ailes et d’abats, essentiellement du Brésil qui exporte des filets vers l’Europe, assurant ainsi un équilibre carcasse. De nouveaux abattoirs français ont été agréés pour l’export. Il s’agit, pour la filière, d’une opportunité pour valoriser les ailes, les pattes et le foie en alimentation humaine ».

Le bœuf du Mercosur

La viande bovine est peu consommée (6 kg/habitant contre 24 kg en France). Avant la crise sanitaire porcine, son prix était trois plus élevé que celle de porc et de volaille. Elle est servie essentiellement en restauration hors foyer ; les particuliers ne savent pas la cuisiner. La production stagne depuis une dizaine d’années. Les importations légales et illégales, d’Inde notamment, représentent 27 % de l’offre totale. « La dépendance aux importations est forte mais ne constitue pas un problème politique car, contrairement au porc, ce n’est pas un produit de base », indique Jean-Marc Chaumet, de l’Idele.

« Son prix a progressé de 20 % au 2e trimestre 2020 mais l’écart avec la viande de porc a diminué (1,5 fois plus actuellement). Les importations sont en augmentation et tirent le marché mondial ». Les fournisseurs sont le Mercosur et l’Océanie. Certains pays ont une forte dépendance à ce marché : 75 % des exportations argentines de viande bovine vont vers la Chine. « Les prévisions tablent sur 1 à 2 % d’augmentation de production par an et les importations illégales seront freinées par de meilleurs contrôles aux frontières ». Les pays du Mercosur en profiteront.

*Abcis : société de services des instituts techniques : Ifip, Idèle, Itavi

Un approvisionnement plus fluide en porc après la crise Covid

L’offre de porcs et de porcelets vivants se rétablit depuis cinq mois consécutifs ; les charcutiers seront plus nombreux après juillet et augmenteront progressivement. Le nombre de truies augmente depuis 9 mois consécutifs et a progressé de 28,6 % par rapport à septembre de l’année dernière. Les importations de viande de porc devraient augmenter cette année de plus d’un million de tonnes par rapport à l’année dernière. Une fois la situation Covid-19 maîtrisée, le secteur de la restauration a repris ses activités. La consommation de viande de porc dans le secteur de la restauration continuera à augmenter. En général, les prix de la viande de porc ont tendance à augmenter de façon saisonnière de juin à septembre. Cette année, la croissance de la consommation post-pandémique s’ajoutera à ce phénomène, et la pression à la hausse pourrait être forte.


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