- Illustration Le veau laitier toujours en plein marasme
Le veau de boucherie consomme environ 50 % des veaux destinés à l’engraissement issus de mères laitières.

Le veau laitier toujours en plein marasme

Depuis le début de la crise du Covid-19, la viande de veau ne parvient pas à retrouver des débouchés suffisants. Dommage collatéral, le prix des veaux de 8 jours est au plancher.

Malgré le creux saisonnier des vêlages qui approche, le marché du veau laitier de 8 jours demeure en grande difficulté. Un effet ricochet du marasme que vit la filière veau de boucherie depuis le début du confinement. La semaine passée, les cours moyens des veaux Holstein de poids moyen ne dépassaient pas les 75 €. Parfois, les négociants sont même réticents à les acheter en ferme.

« Nous aurions dû être au maximum des cours en mars-avril, mais l’augmentation n’a pas eu lieu et on n’attend pas d’amélioration dans les semaines qui viennent », note Germain Millet, chef de projet conjoncture viande bovine à l’Idele. « Le veau de boucherie consomme environ 50 % des veaux destinés à l’engraissement issus de mères laitières. Les mises en place par les intégrateurs sont en fort recul. Même si l’Espagne en absorbe un peu plus, il n’y a pas de hausse des cours des veaux de 8 jours en perspective. »

La chute d’activité du marché du veau de boucherie s’explique par l’arrêt quasi total des commandes passées par la restauration commerciale. Cette dernière pèse plus de 20 % des débouchés habituels de la filière. En GMS, la simplification de gamme est toujours de mise. « La distribution rechigne à mettre en avant le veau de boucherie. Dans certains magasins, il n’est même pas proposé », souligne Sébastien Sachet, responsable veau de la FRSEA Bretagne.

De longs vides sanitaires

« De longs vides sanitaires sont annoncés par les entreprises aux éleveurs. Et la Commission européenne n’a pas autorisé les mesures de stockage privé pour cette filière… ». Selon la réglementation européenne, le veau est un bovin de moins de 8 mois. « Les veaux ne peuvent pas être ‘stockés’en ferme en attendant que la situation s’améliore. » Déjà, depuis le début de l’année, les intégrateurs avaient augmenté les vides sanitaires suite à une année 2019 difficile, les Pays-Bas ayant fortement augmenté leur production.

À moyen terme, une diminution du nombre d’élevages est pressentie par la filière avec possiblement, après l’été et le déstockage des pièces actuellement en stock, un manque de viande de veau lorsque la restauration en aura besoin. « Afin d’éviter ce scénario inverse à la volonté de manger français, il faut que tous les acteurs réagissent immédiatement. Les distributeurs doivent proposer du veau dans les magasins, en faire la promotion en vue de la Pentecôte », soulignent la FRSEA et JA Bretagne.

« Obtenir des mesures de gestion de marché »

« Il faut aussi que le gouvernement retourne au combat à Bruxelles pour obtenir des mesures de gestion de marché. Enfin, à la réouverture des cantines et restaurants, l’origine France devra être privilégiée. » Les syndicats rappellent aux éleveurs qui subissent des vides sanitaires qu’ils peuvent réclamer à leur entreprise l’indemnisation prévue par les contrats-types. « Elle ne compensera pas tout, mais amortira un peu les secousses en attendant une situation meilleure. Nous appelons les entreprises à ne laisser aucun éleveur en difficulté, même lorsque le contrat est en cours de renouvellement. L’esprit de solidarité de la filière doit prévaloir dès aujourd’hui pour garantir demain. »

L’offre limitée en broutards maintient les cours

« À l’inverse du veau laitier, les cours des broutards ne sont pas dégradés. Ils sont un peu inférieurs à ceux de 2019, mais se tiennent bien », précise Germain Millet. Explication peu satisfaisante toutefois : « C’est l’offre limitée qui soutient les cours. De janvier à juin, nous sommes au creux des disponibilités et de plus les animaux en ferme sont moins nombreux. Depuis 2016, il y a une chute du cheptel des vaches allaitantes et donc une baisse des naissances. Sur 2019, cette baisse des naissances est de 5,5 % par rapport à 2018 et de 10 % par rapport à 2016. » Autre observation, les stocks d’animaux prêts à partir à l’export sont en net recul (la majorité des animaux sont exportés entre 8 et 12 mois).

« Au 1er avril, le nombre de mâles de 6 -12 mois était en repli de 4 % par rapport à 2019. La baisse est davantage marquée en Charolaise et Blonde d’Aquitaine, à 7,5 %. » D’un autre côté, les exportations se sont bien tenues sur le 1er trimestre de l’année, y compris sur mars. Le nombre de femelles exportées a notamment augmenté. « Depuis le début du confinement mi-mars, des envois réguliers équivalents à 2019 ont été réalisés sur le marché italien avec 18 500 bovins par semaine. Les rotations dans les ateliers italiens ont été favorisées par les achats en GMS qui se sont bien tenus. Mais cette dynamique est menacée par le ralentissement des achats et l’importation grandissante de viande par ce pays. »

Du fait de la dégradation des ventes de jeunes bovins par l’Espagne, les exportations vers ce pays ont par contre été plus compliquées, à 7 900 bovins par semaine en moyenne de mi-mars à début mai (9 500 animaux en 2019). Dans ces exportations, selon les premiers retours des opérateurs, il y aurait une part en hausse des veaux laitiers. « Sur les pays tiers, les envois restent très concentrés sur l’Algérie. Une inquiétude liée à l’effondrement des cours du pétrole existe. »


Tags :
Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article