- Illustration Le sevrage des porcelets, une aubaine pour les colibacilles

Le sevrage des porcelets, une aubaine pour les colibacilles

Une fenêtre de tir pour Escherichia Coli. Le stress des changements, conjugué à l’immaturité physiologique, fait des porcelets mal préparés au sevrage une cible idéale pour les pathogènes.

Les E. Coli possèdent des particularités qui leur permettent de s’accrocher aux cellules de l’intestin. Les bactéries ainsi « attachées » produisent des toxines responsables soit de diarrhées lorsqu’il s’agit d’entérotoxines, soit d’œdème (paupières, front, oreilles) lorsqu’il s’agit de la shigatoxine. Le moment du sevrage est une période favorable pour le développement des pathologies liées à cette présence, plus ou moins importante selon les règles d’hygiène développées dans l’élevage. Le stress du changement de salle, d’aliment, de la séparation de la mère s’additionne au fait que le système immunitaire des porcelets est encore immature.

Tempête dans l’intestin

La fonction de barrière intestinale commence à se développer entre deux et quatre semaines de vie. Problème, « juste après le sevrage, les villosités intestinales s’atrophient, le poids de l’intestin grêle diminue jusqu’à 20 %, (deux jours après sevrage). Au même moment, l’activité des enzymes intestinales a régressé d’environ 20 % pour la lactase, de 15 % pour la maltase (céréales) et de 50 % pour les protéases », indique Lucile Montagne, chercheuse à Agrocampus Ouest, intervenant à une journée technique organisée par IDT Biologika. Le porcelet modifie son profil d’enzymes en fonction de la nature de sa ration. La maltase revient à son niveau initial (au moment du sevrage), quelques jours après celui-ci. La lactase continue de diminuer (avec l’absence de produits laitiers) et la production de protéases reste faible quinze jours après sevrage. « L’ensemble implique une détérioration de l’intégrité anatomique et fonctionnelle ».

On le voit, la baisse de la capacité d’absorption des nutriments et l’altération de la fonction de barrière intestinale sont maximales deux jours après le sevrage. « En parallèle, la protection passive via le colostrum diminue comme l’apport des constituants bioactifs du lait maternel, notamment la lactoferrine (aux effets bactériostatiques et bactéricides). Le microbiote des porcelets évolue, avec un développement bactérien anarchique ». La réponse au sevrage est donc aiguë. La croissance ralentit plus ou moins selon les individus. Petit à petit, chez les animaux en bonne santé, la restauration de la muqueuse intestinale s’opère, le système immunitaire se développe, les capacités anti-oxydantes augmentent et une flore stable et diversifiée se met en place (microbiote digestif).

Âge au sevrage

L’augmentation de l’âge au sevrage permet au porcelet de bénéficier d’un système immunitaire plus développé et d’une meilleure efficacité de la fonction barrière au niveau intestinal. « Il y a toujours un stress. Le sevrage doit être géré en approche globale de conduite d’élevage : poids de naissance, qualité du colostrum, gestion du transfert en post-sevrage…. Le facteur le plus à risque est sans doute le passage d’un sevrage 28 jours à 21 jours ». Quand la maladie est installée, il est essentiel de réaliser le bon diagnostic, de revoir les éléments zootechniques et nutritionnels et d’utiliser le protocole vaccinal adapté.

Le cochon n’est plus accro aux antibiotiques

Les porcs en post-sevrage sont toujours les plus exposés aux antibiotiques. On constate une baisse très nette de la durée d’exposition sans report des usages sur les autres catégories d’animaux (engraissement). En PS, la baisse est de 66 % en 6 ans. L’usage de pré-mélanges (dans l’aliment) a fortement chuté (80 %), sans report sur les solutions orales ou injectables. La colistine (spectre digestif) est de moins en moins utilisée (- 75 % en 6 ans), là encore sans report sur les autres catégories d’antibiotiques et sur l’oxyde de zinc. Les mesures préventives (vaccinations, solutions nutritionnelles, conduite) sont à la base de ces résultats. Les dépenses vaccinales ont augmenté de + 30 à 40 % en une dizaine d’années. Dans les prochaines années, la diminution du recours aux antibiotiques devrait se poursuivre, à un rythme moindre. Anne Hémonic, vétérinaire Ifip


Tags :
Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article