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Peu de marchés pour les animaux laitiers

Euphorique il y a deux ans, le marché français des génisses pleines et vaches en lait est en berne. Et à l’export, où les Allemands sont bien présents, la concurrence est rude alors que certains débouchés se resserrent.

Le marché local des animaux laitiers est presque point mort. « Effectivement, le prix n’est pas là. Le commerce est très compliqué, vu la conjoncture laitière en Europe », explique Gilles Serais, directeur commercial d’Ouest Génis’ qui commercialise 15 000 animaux par an. « Il y a 18 mois, des constitutions de troupeaux sur la Normandie ou le Massif Central créaient encore un peu de demande. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. »

Fragile bol d’air à l’export

Observateur privilégié du secteur, Gilles Serais parle tout de même « d’une bonne activité à l’export ». Les débouchés à l’étranger représentaient 50 % du volume de son entreprise il y a encore deux ans, « aujourd’hui, c’est plutôt 70 %. » Des vaches en lait partent vers l’Espagne, la Grande-Bretagne, l’Italie… « D’un côté, ces pays ont des outils à faire tourner, des investissements à amortir. De l’autre, ils ne produisent pas suffisamment de génisses pour assurer le renouvellement nécessaire soit à cause de la place donnée au croisement industriel, soit par manque de surface de bâtiment pour élever les jeunes dans les structures de grande taille. »

Par contre, les accroissements de troupeaux sont devenus rares, « exceptés quelques cas qui ont attiré du bétail en septembre vers l’Espagne ». Christian Berthet, à la tête de l’entreprise familiale basée en Rhône-Alpes et spécialisée dans le commerce de bétail, confirme. « Il y a toujours eu cette demande vers le sud du pays. Les Espagnols continuent d’acheter un peu. Pour un animal laitier négocié aujourd’hui entre 1 000 et 1 100 € par tête, ils ont certainement raison d’importer le renouvellement avec toutes les garanties plutôt que de l’élever avec les risques et les charges que cela comporte ».

Des Algériens plus regardants

Le traditionnel marché du Maghreb, l’Algérie en tête mais aussi le Maroc, continue de drainer quelques génisses pleines. « Mais, mois après mois, les prix baissent, regrette Christian Berthet. Aujourd’hui, une Prim’Holstein prête à vêler arrivée à destination se négocie à 1 500 €. En début d’année, on se situait au-dessus de 1 800 €… Pour une Montbéliarde, qui s’adapte mieux à la chaleur, c’est 100 € de plus. » La chute du prix du pétrole plombe les revenus immédiats de l’Algérie. Conséquence : « Les éleveurs sont moins aidés par l’État. » Ils sont également plus exigeants. « Comme il y a beaucoup d’offres, qu’ils sont très sollicités par les pays vendeurs, les Algériens opèrent actuellement un tri plus sévère. Ils choisissent leurs animaux. »

Rude concurrence allemande

Surtout, à l’international, les exportateurs français se frottent à une rude concurrence allemande. « Les Allemands présentent un plus grand réservoir d’animaux avec une origine contrôlée. Et à valeur égale, ils sont 50 à 100 € par tête moins chers que nous », rapporte Christian Berthet. Gilles Serais précise : « Ils arrivent à proposer d’un côté une gamme low-cost d’animaux issus de grands troupeaux de l’Est et d’un autre, une offre plus chère avec de la qualité venant plutôt de l’Ouest, près des Pays-Bas. Au final, les Allemands sont capables d’aller vers des pays où nous ne sommes pas présents aujourd’hui comme la Russie, la Turquie… »

1 100 €, la génisse pleine vers l’Espagne

Finalement, la violente volatilité du lait s’est propagée au marché du bétail. « En 2014, c’était l’euphorie. Les naisseurs nous confiaient toujours deux ou trois génisses par an de plus à élever. Un phénomène que nous avions du mal à absorber par manque de place », raconte Yvan Davenel, producteur de lait et éleveur de génisses pour le groupement Aneg 35 (12 naisseurs, 3 éleveurs de génisses) près de Vitré.

« Aujourd’hui, tout s’est inversé, il nous manque presque des animaux dans les lots. » Il vient de vendre une dizaine de génisses pleines à 1 100 € la tête vers l’Espagne. « Il y a deux ans, elles partaient pour 1 800 €. » Selon les clauses actuelles du contrat de son groupement, les naisseurs récupèrent leurs animaux à 7,5 mois pour 1 500 €. « En ce moment, c’est un prix au-dessus du marché, mais ils s’assurent de récupérer leur génétique, bien conduite, plutôt que de se risquer à rentrer du « tout-venant » acheté à l’extérieur. »

Que le prix du lait remonte
Le marché local est très calme. Et pourtant nos chiffres d’activité sont supérieurs à l’année dernière à la même époque car l’offre est beaucoup plus importante actuellement. Des producteurs de lait arrêtent, partent en retraite et vendent leur cheptel. Des troupeaux entiers parfois. Sur le terrain, on entend de tout : des bons prix mais aussi des prix très bas. Cela varie en fonction du contexte local, de la morphologie et de la qualité génétique des animaux… Quand l’atelier est bien tenu jusqu’à la fin, que les vaches sont inséminées en race pure, la valeur est supérieure. Seule une remontée du prix du lait redonnant des perspectives aux éleveurs peut relancer la machine. Gilles Serais, Ouest Génis


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