Marchés : quelle direction pour les prix de maïs 2016/2017 ?

Les cours du maïs sur Euronext semblent atteints de paralysie depuis début septembre. Les cotations gravitent autour de 160 €/t, incapables de choisir une direction, à la hausse ou à la baisse. En 15/16, le prix moyen sur le marché à terme avait été de 165 €/t, ce qui correspond exactement à la moyenne 16/17 constatée depuis le début de l’été 2016 (campagne calée sur celle du blé). Pouvons-nous reproduire le même résultat sur l’ensemble de la saison, alors que les contrats sur les mois à venir sont en report avec une fin de campagne 10 €/t plus chère ? La pression de récolte qui commence à se faire sentir sera-t-elle limitée par des disponibilités françaises en recul, ou bien, comme en blé, verrons-nous le marché français obligé de s’aligner sur les marchés concurrents ? Un bilan français lié à l’exportation Si l’on considère seulement l’hexagone, il est vrai que les choses se présentent mal. Les conditions des cultures dans les régions clés (Aquitaine et Midi-Pyrénées) ne cessent de diminuer. La production s’annonce aux alentours des 12 Mt, ce qui représente un plus bas depuis 2003. Pour rappel, notre bilan en maïs grain est structurellement excédentaire, et nous exportons au moins 40 % de notre production, essentiellement dans l’Union européenne (Espagne, Pays-Bas et Royaume-Uni en priorité). L’utilisation en alimentation animale chez les fabricants français (FAB) varie entre 2,7 et 3,7 Mt, variable d’ajustement lorsque l’offre est réduite et que la disponibilité en blé fourrager le permet. Cette saison, nous pourrions descendre à 2,4 Mt chez les FAB, sans que cela ne soit un véritable problème puisque les céréales fourragères sont largement disponibles dans et hors de nos frontières. Cela permettrait de limiter notre recul sur le front des exportations et de conserver un stock de report stable (2,3 Mt). Un bilan européen déficitaire Si nous élargissons notre analyse au bilan européen, nous constatons que la production 2016 devrait dépasser le faible score de l’an dernier de seulement 1 Mt (59 Mt selon l’IGC*). Mais les stocks de départ étant plus faibles, l’offre totale est d’ores et déjà en recul de 1 Mt par rapport à la campagne précédente. Nous ne connaîtrons pas le niveau exact de cette offre avant fin novembre, la récolte étant en retard sur de nombreuses zones. Mais nous pourrions encore avoir des surprises sur le rendement final, impacté non seulement en France, mais aussi en Bulgarie et en Roumanie, c’est-à-dire chez les trois pays exportateurs de l’UE vers les pays tiers (Turquie, Égypte, Liban, etc.). Mais contrairement à la France, le bilan européen est structurellement déficitaire. Il donne lieu à des flux internes (est vers ouest) mais aussi à des importations en provenance d’Ukraine (pour plus de la moitié des volumes), du Brésil et de plus en plus, de Russie. Le niveau de concurrence entre ces pays aura donc un impact sur les prix intérieurs européens cette saison. Rappelons que le bilan mondial de maïs 16/17 semble particulièrement lourd, avec des stocks qui devraient atteindre 218 Mt (dont 112 Mt hors Chine). Les USA notamment, croulent littéralement sous le maïs avec environ 58 Mt, soit l’équivalent de la production européenne, qui resteront dans les silos en fin de campagne… Cela explique les cotations au ras des pâquerettes sur le marché à terme de Chicago (3,40 $/boisseau soit 120 €/t) et une agressivité à l’exportation malgré un taux de change peu favorable. L’Ukraine, quant à elle, devrait pouvoir aligner 2 Mt de plus à l’exportation cette saison, ce qui l’oblige à rester compétitive sur des marchés où elle bataille avec les États-Unis, l’Argentine ou le Brésil. Pour l’instant, la concurrence sud-américaine est en sourdine et ne reprendra qu’à l’été prochain. C’est donc via les USA et l’Ukraine, où les récoltes s’accélèrent et où la logistique de stockage reste problématique, que la pression sur les prix s’exprime actuellement. Un marché physique français lié à l’Ukraine Le marché européen voit sa demande à l’importation rester forte, et la pression de récolte devrait y être assez fugace. La situation financière des exploitations agricoles françaises demeure bien sûr très tendue, avec notamment le paiement des impôts fonciers et des fermages en novembre. Le besoin de vendre se fera sentir et la pression de récolte peut être réelle malgré les faibles volumes à venir. Après décembre, tout dépendra de l’activité export. Mais au-delà de décembre, la situation pourrait se tendre. Tout dépendra alors de notre activité export. Car c’est bien ce poste important et essentiel de notre bilan français, qui fait et défait notre marché physique en FOB*** Rhin et FOB Bordeaux (souvent déconnecté du marché papier d’Euronext). Et là, l’Ukraine dictera sa loi. Sur ce marché européen captif pour elle (non OGM, avantage fret), et face à des producteurs ukrainiens toujours soumis à une forte inflation, elle ne bradera pas nécessairement sa marchandise. De quoi apporter un soutien à Euronext, dans la limite de ce que le marché du blé fourrager et de l’orge lui permettra… *Conseil International des Grains. ** Loan rate (prix d’intervention) ***Free On Board (marchandise livrée dans le bateau)

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