Un effet microclimatique : Les haies, Des alliées à reconsidérer

C’est assez peu mis en avant. Pourtant, les haies sont des alliées économiques, climatiques et écologiques pour la rentabilité des exploitations agricoles.

Une haie bocagère sur une exploitation - Illustration Un effet microclimatique : Les haies,  Des alliées  à reconsidérer
Le bocage favorise 
la biodiversité, les auxiliaires aidant à lutter contre les ravageurs. | © Agnès Cussonneau Paysan Breton

Les atouts des haies pour le climat, la qualité de l’eau, l’environnement sont indéniables et reconnus. Mais elles peuvent aussi rendre de nombreux services aux agriculteurs, permettant par exemple de limiter l’érosion des sols due aux précipitations ou au vent. « En Bretagne, 18 % des sols présentent un aléa d’érosion élevé à très élevé. Sur une carte, on voit que cette érosion est corrélée avec des espaces peu ou pas bocagers », a indiqué Eva Stammler, conseillère en agroforesterie à la Chambre d’agriculture de Bretagne. Elle est intervenue lors d’une réunion dans le cadre de la session Chambre d’agriculture 35 du 21 novembre à Rennes.

Jusqu’à 7 °C de moins sous les arbres

Quand les haies sont perpendiculaires à la pente, elles permettent l’infiltration de l’eau freinant sa course vers les rivières puis la mer. Par ailleurs, l’arbre contribue à la réduction du stress thermique des animaux grâce à des effets parasol et brumisateur. Une étude réalisée par la Chambre d’agriculture dans le Nord-Pas-de-Calais montre des différences de température jusqu’à 7 °C entre une prairie en plein soleil et une autre agroforestière. En cas de stress thermique léger, une vache laitière produit 2,7 kg en moins par jour, la chute s’approche des 4 kg/j pour un stress modéré ou sévère.

Eva Stammler précise qu’il n’y a pas de baisse de productivité des pâtures quand elles sont en agroforesterie. « Une étude a montré que les légumineuses sont un peu moins présentes au pied des arbres plutôt qu’en milieu de prairie mais la qualité du fourrage est similaire partout. Par contre, sur les parcelles en agroforesterie, la pousse est plus tardive : c’est intéressant pour étaler la disponibilité de la ressource. »

L’érosion est corrélée à des espaces peu ou pas bocagers

Les cultures aussi bénéficient des bienfaits microclimatiques des haies. Plusieurs études, certaines anciennes, d’autres plus récentes, le prouvent. « Certes, le rendement est plus faible sur plusieurs mètres derrière la haie, mais le gain global de rendement est supérieur – de 5 à 30 % – grâce à de meilleurs résultats plus loin. » Par exemple, une haie brise-vent de 5 m protège la culture sur 50 m. « Il y a moins de verse, moins d’évapotranspiration. »

« Certains agriculteurs de notre réseau placent des bandes enherbées sur 6 m près des haies pour préserver leurs rendements et leurs marges de cultures », témoigne Vincent Berhault, de la Fédération Coat Nerzh Breizh (réseau qui œuvre à la valorisation du bocage géré durablement).

« Le bocage favorise aussi la biodiversité, les auxiliaires aidant à lutter contre les ravageurs », ajoute Eva Stammler. Sa régression entraîne « un déclin des espèces d’oiseaux spécialistes des milieux ouverts et bocagers ce qui laisse la place aux espèces généralistes tel que le pigeon ramier ou l’étourneau. »

La régulation naturelle chiffrée sur puceron

Des recherches sont menées par les Chambres sur les services rendus à la production agricole par la biodiversité. Des premiers résultats ont été obtenus. Une étude a mesuré une régulation naturelle des pucerons des céréales au printemps de 50 % via les auxiliaires dans le bocage breton… Une étude similaire en Vendée, en plaine céréalière, a montré une régulation naturelle deux fois moindre. Des formations sont aussi organisées pour apprendre à repérer et favoriser les auxiliaires.

Enfin, le bois de bocage peut être valorisé, en litière, en paillage horticole, en bois d’œuvre ou comme bois énergie, autoconsommé ou vendu. « Estimé à 35 €/MWh, le prix du bois déchiqueté est très peu cher par rapport aux autres sources d’énergie qui ont en plus l’inconvénient d’être très fluctuantes. Il peut diviser par deux voire beaucoup plus la facture énergétique sur les élevages avicoles ou porcins, à condition d’investir dans une chaudière », note Régis Le Carluer, responsable d’équipe énergie – climat – agroforesteries à la Chambre d’agriculture. Des chantiers clé en main sont aujourd’hui proposés aux agriculteurs sur l’ensemble de la Bretagne via plusieurs structures collectives à l’image de CBB 35 en Ille-et-Vilaine.

Mais la replantation est dans les faits peu envisagée sur les exploitations. « Trop de contraintes encadrent la haie. Il faut un réel intérêt économique vu le temps à passer », soulignent plusieurs agriculteurs. « Et certaines zones se végétalisent en Bretagne ce qui n’incite pas à la plantation. »

Agnès Cussonneau

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Opinion – Loïc Guines – Président de la Chambre d’agriculture d’Ille-et-Vilaine

Les haies et les arbres ont leur utilité. Si leur entretien était difficile autrefois, aujourd’hui, il existe des outils, des organisations facilitant leur gestion et leur valorisation. Mais il nous faut davantage d’études chiffrées sur leur intérêt, le temps de travail nécessaire, la valorisation… Les plaquettes doivent être vendues au juste prix. Côté implantation de haies, certains territoires sont à privilégier comme les bassins versants à enjeu de qualité d’eau. Des outils issus de l’administration existent aussi pour objectiver l’utilité des haies selon leur emplacement.


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