Food power

Edito - Illustration Food power

La Russie montre les muscles en Ukraine. La Russie montre sa puissance alimentaire au monde. Depuis un an, le Kremlin a amplifié son narratif de puissance alimentaire. Ce récit de « food power » ne date pas du début de la guerre en Ukraine. Il prend racine à Moscou en 2010 avec la « doctrine sur la sécurité alimentaire ». L’objectif du pouvoir central est alors clair : atteindre la quasi-autosuffisance, mettre fin à sa dépendance occidentale et se rendre indispensable sur l’échiquier alimentaire mondial.

Cette reprise en main de l’alimentaire par le pouvoir russe s’est entre autres traduite par l’étatisation de la filière céréalière. Avec ce succès à la clé : le pays est devenu le 1er exportateur mondial de blé en 2017. Mais surtout, les vraquiers russes chargés de grains d’or qui rentrent dans les ports du monde ne sont pas de simples bateaux. Ils sont les étendards d’une machine communicationnelle destinée à montrer que la Russie nourrit le monde et que l’Occident n’est pas au rendez-vous alimentaire de la planète.

La récente menace sur la prolongation de l’accord sur les exportations de céréales des ports ukrainiens – finalement adoptée le 18 mars – tient de la même tactique de suprématie céréalière russe. Le torpillage actuel du potentiel agricole de l’Ukraine tient aussi du même dessein. Même s’il n’existe pas vraiment de statistiques fiables, la production ukrainienne de blé aurait déjà reculé de 50 % rendant les céréales russes encore plus incontournables. Les derniers chiffres confirment : les exportations russes de céréales ont été 90 % plus élevées en janvier 2022 qu’en janvier 2023. Et la Russie est le seul pays de la planète à avoir augmenté ses récoltes en 2022. Cette politique alimentaire omnipotente est une machine de guerre à part entière.


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