- Illustration Le pédiluve dans les règles de l’art
Raphaël Gattéo considère que la plupart des pédiluves du marché ne sont pas assez longs pour assurer 3 ou 4 trempages du pied dans la solution désinfectante.

Le pédiluve dans les règles de l’art

« Aujourd’hui, les troupeaux indemnes de dermatite digitée sont en voie de disparition », explique Raphaël Gattéo. Il revient sur les moyens pour maîtriser cette maladie infectieuse pénalisante et notamment l’usage des bains de pieds.

« Face à la maladie de Mortellaro, il n’y a pas de solution miracle ou d’éradication possible. Il faut trouver un équilibre pour contrôler son incidence », démarre Rapahël Gattéo, de l’École vétérinaire de Nantes – Oniris. Il rappelle l’importance de mettre en œuvre « simultanément » plusieurs mesures de contrôle (hygiène du bâtiment, détection précoce et utilisation correcte des traitements individuels et collectifs).

Souvent trop courts et trop larges

[caption id=”attachment_38977″ align=”alignright” width=”169″]Rencontres Bov’idée de Synthèse élevage à Pacé (35), Tour de France ruminant Zinpro à Bruz (35), Journées 3R à Paris… Raphaël Gattéo d’Oniris est régulièrement sollicité pour parler de la maîtrise de la dermatite digitée. Rencontres Bov’idée de Synthèse élevage à Pacé (35), Tour de France ruminant Zinpro à Bruz (35), Journées 3R à Paris… Raphaël Gattéo d’Oniris est régulièrement sollicité pour parler de la maîtrise de la dermatite digitée.[/caption]

Souvent, le vétérinaire revient en détail sur un outil très répandu, le pédiluve, qui paraît tout bête. Et pourtant… « D’abord, les dimensions de la plupart des pédiluves du commerce ne répondent pas aux recommandations. Ils sont trop larges, trop courts et trop bas », explique-t-il. Les chercheurs (Cook et al., 2012) ont montré qu’un bac de 50 à 60 cm de large pour une longueur d’au moins 3 m de long et permettant une hauteur de solution de 28 cm avait les meilleurs résultats : « On considère que, pour que le produit tienne bien, il faut que le pied ait été trempé 3 ou 4 fois lors du passage dans le pédiluve. Or plus le bac est long, plus il y a d’immersions. »

D’autant qu’après le passage d’une centaine de vaches, on constate généralement que la moitié du volume de solution désinfectante a disparu. « Ce n’est pas une manucure : on ne cherche pas à mettre un peu de vernis sur le bout des onglons d’une vache stressée qui modifie ses aplombs en traversant très vite, mais bien que toute la peau du pied trempe dans le produit. La couleur du produit, jusqu’en haut du sabot à la sortie, doit aider l’éleveur à vérifier si la hauteur de trempage est encore suffisante. » À noter que certains modèles automatiques, plus coûteux, peuvent favoriser la conservation d’une solution désinfectante propre (remplissage et vidange automatique, déclenchement spontané au passage d’un animal).

L’hygiène avant le choix du produit

Les questions que posent d’emblée les éleveurs dont le troupeau est touché par la maladie concernent toujours le produit à utiliser et la fréquence. « Dans la littérature scientifique, il y a peu de données pour préférer un produit à un autre. On constate beaucoup de biais dans les essais et de design de pédiluves inadaptés. Sur l’efficacité, il y a en fait un réel besoin d’essais cliniques bien menés pour des traitements standardisés », explique le vétérinaire. Les études semblent montrer de meilleurs résultats avec une fréquence de bains de pieds plus intense : « C’est mieux, mais plus coûteux aussi pour l’éleveur. »

Avant d’enfoncer le clou : « Le risque de survenue de lésions est augmenté de façon significative par une mauvaise propreté des pieds. Le lavage est une prévention en soi. Alors pour caricaturer un peu, le meilleur produit, c’est l’eau ou plutôt l’hygiène. D’ailleurs, s’il n’y a pas les conditions pour que les pieds arrivent propres dans le pédiluve autant ne rien faire. » L’hygiène des pédiluves secs (poudres asséchante ou riche en flore bactérienne) doit également être régulièrement assurée.

Dans la pratique, Raphaël Gattéo recommande l’usage du pédiluve au moins 4 traites consécutives tous les 15 jours. « Mais cette fréquence est surtout à adapter à la prévalence initiale de la dermatite, à l’hygiène du sol, au stade de lactation, à la race… » Et surtout, les bains de pieds ne doivent remplacer ni le traitement individuel des animaux touchés, ni la correction des pratiques à risque (raclage, confort de couchage, ventilation…).
Surtout, les études montrent que l’efficacité bactéricide des désinfectants (seuil des normes européennes) est compatible avec 100 à 120 passages d’animaux. Au-delà, « on bascule vers le “merdiluve” » : la solution est contaminée par la matière organique (déjections) et son efficacité n’est plus suffisante. « Avec un grand troupeau, cela veut dire un renouvellement de la solution après chaque traite. »

Conditions pratiques d’efficacité du pédiluve

• Nettoyage des pieds avant désinfection.
• Respect de la dilution (en commençant par connaître le volume de son bac de bain).
• Renouvellement adéquat de la solution (moins de 120 passages).
• Des sols propres et secs au moins 30 minutes avant la désinfection.
• Une application suffisamment fréquente de 2 jours au minimum tous les 15 jours.
• Un matériel adapté (cuve d’au moins 3 m de long et 28 cm de profondeur, volume suffisant, remplissage et vidange faciles).
• Un emplacement bien choisi (éviter de placer le pédiluve après une marche, avant ou après un angle.


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