L’orange royale

Le signal est donné : le lilas s’apprête à fleurir. L’heure est à la plantation des patates. Les terres bretonnes vont regorger d’un bien de valeur. Ni racine, ni fruit, ce tubercule aux formes étranges avec ses germes courts et trapus, au goût parfois fade mais nourrissant s’appelait « l’orange royale » lorsqu’il était mangé à la table du roi. Des termes nobles dès le XVIIIe siècle, pour désigner ce « fruit de la terre », nécessaires pour courtiser un consommateur rebelle. Pour ce dernier, ce nouveau légume était à peine digne de nourrir les cochons, l’accusant de rendre les hommes malades, voire de propager la lèpre… Son adoption en Europe a été longue et difficile.

Ce « papa », doux nom dont l’affluaient les Incas de la Cordillères des Andes, d’où le tubercule est originaire, a un riche pouvoir : il a apporté la paix en Europe pendant plus de deux cents ans… Survivant grâce à ce légume lors d’une période d’emprisonnement en Prusse, Antoine Auguste Parmentier a en effet voulu développer cette culture, pour éradiquer les émeutes lors des disettes régulières les années de mauvaise récolte. Pour endormir la méfiance du peuple envers cette pomme de terre, l’agronome en fit la promotion lors de dîners mondains. Et dans les campagnes, les plants furent gardés nuit et jour par des soldats, leur donnant une valeur précieuse. Certes, la consigne voulut qu’on relâche la surveillance la nuit… De façon à permettre au peuple affamé de venir voler ce bien qui a ainsi pris place sur la table des pauvres.


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