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Présidentielle 2017 : deux programmes agricoles aux antipodes

Le second tour de la présidentielle oppose dimanche 7 mai Marine Le Pen, qui prône un modèle agricole familial et une politique commerciale protectionniste, à Emmanuel Macron qui défend une agriculture compétitive sur tous les marchés avec des soutiens à la modernisation.

La première différence entre les deux candidats élus au premier tour de la présidentielle 2017, Marine Le Pen et Emmanuel Macron, réside dans le cadre dans lequel ils envisagent leur politique agricole : européen d’un côté, national de l’autre. Marine Le Pen envisage de lancer un référendum sur la sortie de l’Union européenne et de se retirer si le non l’emportait. Dans le secteur agricole, cela se traduit par la transformation de la Pac en politique agricole française ou Paf. Sur le plan budgétaire, elle s’engage à « maintenir le niveau des aides » au cours de cette renationalisation.

Frexit contre une Europe protectrice

À l’inverse, le projet de politique agricole d’Emmanuel Macron est résolument européen avec « une Europe forte et protectrice » et la volonté de maintenir le budget actuel. Il souhaite modifier l’application par la France de la Pac actuelle, et proposer des orientations pour la prochaine réforme. On peut retenir qu’Emmanuel Macron souhaite augmenter certains budgets (modernisation, environnement) et développer les outils de gestion de risque. La proposition la plus marquante de son programme agricole consiste en « un plan de transformation agricole de 5 milliards d’euros sur 5 ans », cofinancé par l’Europe et les régions. Cela consiste à multiplier par quatre des crédits nationaux du plan de modernisation (PCAE) actuellement d’un milliard d’euros sur 5 ans, et par l’augmentation des crédits dédiés à l’innovation et au développement rural (P3A, Casdar). Il propose également de créer des « paiements pour services environnementaux » (PSE) pour 200 millions d’euros par an.

Modèle familial contre réponse aux demandes du marché

La vision de l’exploitation agricole divise également les deux candidats. Marine Le Pen défend plutôt l’idée d’un « modèle agricole familial » et d’une limitation de l’agrandissement. Toutefois, la stratégie du FN pour maintenir ce type d’exploitations reste floue : « Chaque filière doit être libre de décider pour elle-même la façon dont elle veut être soutenue », expliquait-elle devant les congressistes de la FNSEA, il y a quelques semaines.

Elle lie toutefois la taille et le modèle d’exploitation à la question environnementale. À l’inverse, Emmanuel Macron ne veut défendre aucun modèle en particulier, mais plutôt la capacité des exploitations agricoles à conquérir tous les marchés. « Il faut arrêter de vouloir traiter systématiquement l’agriculture à travers la question des modèles de production », explique-t-il. Il faut reconnaître la diversité de l’agriculture française.

Protection du marché national contre convergence européenne

S’agissant de la concurrence internationale, deux visions s’opposent également. Emmanuel Macron est le seul candidat à la présidentielle à avoir défendu la signature de l’accord de libre-échange avec le Canada (Ceta). Il est globalement favorable aux accords de libre-échange, auxquels il souhaite intégrer des « clauses sociales et environnementales contraignantes, en abaissant en priorité les tarifs douaniers sur les biens et services propres ». Marine Le Pen revendique une politique économique protectionniste au niveau national et le rétablissement d’une monnaie nationale : « Nous plaidons pour un protectionnisme intelligent, encore plus en matière agricole car celui-ci doit préserver la sécurité et la qualité des produits, qui sont aussi des atouts primordiaux à l’export. »

Elle plaide par exemple pour « interdire l’importation et la vente de produits provenant de l’étranger qui ne respectent pas les normes imposées aux producteurs français en matière de bien-être animal et d’environnement notamment ». La dévaluation monétaire est aussi un élément du programme, peu mis en avant par le FN, de nature à relancer la compétitivité. Chez Emmanuel Macron, la protection des agriculteurs européens passe par une « convergence sociale et fiscale au niveau européen ». Même idée sur les normes environnementales. Dans une lettre adressée aux agriculteurs le 21 avril, il explique que « les règles doivent être les mêmes partout en Europe » dans leur définition et dans leur application. Ainsi, il veut revenir sur toutes les sur-transpositions des normes par la France « dès cet été ».

Concernant les négociations commerciales, Emmanuel Macron prévoit d’organiser des « États généraux de l’alimentation » pour « définir un partage équilibré de la valeur ». En cas d’échec de cette grande table ronde, il propose une réforme de la loi de Modernisation de l’économie (LME). Il propose aussi le renforcement des organisations de producteurs et leur généralisation. De plus, il défend une « dérogation au droit de la concurrence pour le secteur agricole ». Marine Le Pen se distingue par une forte intervention de l’État. Elle plaide pour « une négociation de prix et de volume par filière entre producteurs, transformateurs et distributeurs », dans laquelle l’État serait présent. Elle souhaite mettre en place « un coefficient multiplicateur » et de « l’appliquer sur les produits alimentaires afin de fixer une marge à la grande distribution.»

Flou sur les outils en gestion des risques

La gestion des risques de marché ou climatiques est une demande forte de la profession agricole. Emmanuel Macron plaide « pour la mise en place d’outils de régulation adaptés à chaque filière » et pour des « outils de gestion des risques ». Il cite par exemple l’épargne de précaution ou l’assurance climatique, sans précision sur les budgets alloués à ces politiques. Il est favorable aux aides contra-cycliques. Marine Le Pen a beaucoup fustigé la fin des mesures de régulation des prix et des volumes. Elle souhaite un retour à la régulation publique, sans pour autant préciser les modalités.


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