10098.hr - Illustration Réduire les phytosanitaires sans impacter la marge, Déphy réussi !
Les IFT totaux (hors traitement de semence) ont diminué de plus de 20 % en 10 ans selon une étude menée à partir d’un échantillon de 71 exploitations de polyculture élevage appartenant au groupe Dephy Ferme.

Réduire les phytosanitaires sans impacter la marge, Déphy réussi !

Optimisation des traitements, introduction de nouvelles techniques ou de nouvelles cultures, allongement des rotations… Depuis 10 ans, les élevages engagés dans le réseau Dephy testent différentes modalités pour baisser leurs usages de phytosanitaires.

Sur les 130 groupes Déphy Ferme au national, 9 groupes travaillent depuis une dizaine d’années en Bretagne pour réduire les traitements sur cultures. L’objectif consistait à faire évoluer les pratiques agricoles dans quelques exploitations support, à base de groupes d’échange collectifs constitués dans le début des années 2010, pour diffuser à terme des pratiques validées sur le terrain. Alors, 10 ans après, quels sont les premiers résultats ? « Les différents systèmes analysés, à partir d’un échantillon de 71 exploitations bretonnes de polyculture élevage, montrent une baisse de plus de 20 % de l’indice de fréquence de traitement, hors traitement de semences », indique Thibault Peyrard, stagiaire, lors d’une conférence digitale au Space. Pour ceux qui ont modifié leur assolement, en y intégrant des prairies temporaires et autres cultures annuelles que le maïs et le blé pour allonger la rotation, la baisse chute même à 30 % contre 17 % pour les autres. Dans le détail, l’IFT herbicide reste quasi stable alors que l’IFT non herbicide baisse de 45 %.

Forte baisse des traitements hors herbicide en blé

Les efforts les plus marqués dans les systèmes de culture bretons concernent le blé. L’IFT total baisse en effet de 14 points, mais avec une hausse remarquable de 34 % côté herbicide ! « Ceci est lié à deux éléments », mentionne David Bouillé, ingénieur territorial Dephy à la Chambre régionale d’agriculture. Il explique : « Les systèmes maïs/blé, déjà en rotations courtes, ont des difficultés à contenir le développement des adventices.
De plus, entre la situation initiale et finale, 10 ans plus tard, les stratégies de désherbage ont évolué d’un passage unique en sortie d’hiver à deux passages conseillés face au repérage de résistances aux molécules : le traitement à l’automne, suivi très fréquemment d’un rattrapage ciblé au printemps, contribue à l’augmentation de cet IFT. » Pour les traitements hors herbicide, la réduction d’usage est, quant à elle, très forte : – 43 %. « On peut mettre en avant les progrès en génétique, vis-à-vis de la septoriose notamment, et un besoin moindre des régulateurs. Les mélanges variétaux en blé permettent aussi de réduire les fongicides. D’autres agriculteurs font appel à d’autres leviers supplémentaires comme des semis décalés de 5 à 10 jours… », poursuit l’agronome.
Pour le maïs, très présent dans notre région, on observe une baisse de 5 % de l’IFT herbicide, grâce à la dynamique autour du développement du désherbage mécanique, « mais le maintien de rotations courtes continue à freiner l’évolution en requérant des stratégies de désherbages lourdes ».

Légère hausse du temps de travail en contrepartie

Dans l’échantillon breton, la marge semi-nette(1) montre peu d’évolution entre les années 2010 et 2020. Mais au niveau national, sur 557 exploitations, « la marge augmente pour les exploitations dont les IFT sont en baisse et inversement », note Mathilde Lefèvre, ingénieure territoriale Dephy à l’Adage 35. L’amélioration de la marge ne semble pas liée à une amélioration des produits, les gains proviendraient des charges (-20 % des charges en 10 ans avec une baisse de l’IFT, contre une augmentation de charge de 5 à 15 % si hausse de cet indice).

« L’évolution s’est accompagnée d’une légère hausse du temps de travail, passant de 5,7 à 6,3 heures/ha/an. Ceci peut s’expliquer par la multiplication des opérations de récolte avec l’intégration de prairies temporaires dans l’assolement et des dynamiques d’apprentissage sur de nouvelles pratiques comme le désherbage mécanique ». Le labour quant à lui semble en recul, en tout cas en ce qui concerne le labour systématique.

(1) Marge semi-nette = produits (hors aides Pac) – charges de mécanisation (sans les coûts de main-d’œuvre) – charges opérationnelles

Faire évoluer ses pratiques à plusieurs

Dans ce collectif Déphy Ferme que j’ai intégré en 2011, on a échangé et travaillé sur différentes pratiques débouchant sur des essais dans nos fermes, comme par exemple le mélange variétal en blé, limitant à un ou deux fongicides par an au lieu de trois auparavant. On peut citer aussi l’intégration de prairies temporaires pour allonger les rotations et augmenter l’autonomie alimentaire de mon exploitation. Ou le désherbage mécanique en maïs qui exige plus de temps de travail, mais comme tous les autres leviers cités, on s’y retrouve car on y gagne sur les coûts de production. Des freins existent cependant face aux changements de pratiques, il est important de se rassurer à plusieurs. Aujourd’hui, par exemple, même si aux yeux de certains les parcelles ne sont pas très propres, le salissement ne me gêne pas tant qu’il n’affecte pas le rendement en blé. Julien Collin, Agriculteur à Bédée (35)


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