5916.hr - Illustration Du sans labour à l’agroforesterie
Des rangs d’arbres de haut-jet et des rangs de haies fourragères (près de Laurent Cornée) s’alternent, séparés de 30 mètres.

Du sans labour à l’agroforesterie

« Le sol, les arbres, la santé des animaux, le lait : tout est lié », déclarent Laurent et Anne-Sophie Cornée. Depuis plus de 20 ans, ils mettent en place des pratiques que l’on appelle aujourd’hui « agroécologiques ».

« Pour chacun de nos 3 premiers enfants, nous avons planté un arbre. Pour le 4e, nous en avons planté 1 000 », sourient les agriculteurs de Moutiers (35). En novembre 2018, ils ont en effet mis en place de l’agroforesterie sur 9 ha de leur parcellaire. Près de 1 000 arbres ou arbustes ont été implantés pour un coût avoisinant les 12 000 €, subventionné à 80 % par le Département d’Ille-et-Vilaine. Cette mesure fait partie du dispositif mis en place par le Département pour renforcer l’autonomie des exploitations par la réduction des charges et l’adaptation aux enjeux environnementaux.

« Je m’intéresse à l’agroforesterie depuis plus de 10 ans et j’ai décidé de franchir le cap. Cela va offrir de l’ombre pour les animaux au pâturage, de la biodiversité sur l’exploitation, des rendements éventuellement plus élevés sur les cultures, une meilleure résistance par rapport aux coups de chaleur… Les arbres vont chercher des nutriments en profondeur et se développent en complément des cultures », souligne Laurent Cornée.

Des haies fourragères comestibles pour les vaches

Particularité sur l’exploitation, des rangs d’arbres de haut-jet (châtaignier, chêne, merisier, tilleul…) et de haies fourragères (érable champêtre, frêne, noisetier…) s’alternent, séparés de 30 mètres : la largeur du pulvérisateur. « Les haies fourragères comprennent des espèces comestibles pour les vaches qui peuvent les prélever pour se soigner par exemple. » Sur le rang, les arbres de haut-jet sont placés tous les 6 mètres et les arbres fourragers tous les mètres. La plantation a été réalisée au GPS. En bout de parcelle, 30 mètres sans arbres permettent de tourner avec les outils. « Nous avons aussi implanté une parcelle de 50 ares en fruitiers greffés et sauvages : pommiers, cerisiers, pêchers… ».

Dans un premier temps, les producteurs vont pouvoir amender leurs parcelles avec du BRF (bois raméal fragmenté : broyat de jeunes rameaux ligneux de feuillus). « C’est une matière différente, intéressante, apportée au sol. Des copeaux pourront aussi être produits, ainsi que du bois d’œuvre pour les générations futures. » Pour le moment, les arbres sont jeunes : « Il n’y a pas eu d’impact sur la culture de blé semée entre les rangs. » Beaucoup d’arbres avaient été retirés sur l’exploitation par le passé : une autre époque. Depuis son installation en 1998, Laurent Cornée a réintroduit des haies autour de ses parcelles, entre 4 et 5 km.

10 800 kg/VL en moyenne

Il a aussi mis en place d’autres techniques agroécologiques au fil du temps sur l’exploitation qui compte une SAU de 160 ha aujourd’hui avec une production de lait de 620 000 L (60 VL au robot). « Nous cultivons du maïs ensilage et grain, du blé, de l’orge, de la féverole, de l’avoine, du lin, du colza, de la luzerne, du tournesol. Les vaches pâturent sur 15 ha. » La productivité du système reste une des priorités pour le couple d’agriculteurs. « La moyenne d’étable est de 10 800 kg/VL. »

Dès son installation, l’agriculteur a arrêté le labour pour des raisons de gain de main-d’œuvre et de carburant au départ. « Après 10 ans de techniques culturales simplifiées (TCS) avec des semis sous mulch, j’ai eu des problèmes de salissement des parcelles. À l’époque, il n’y avait pas d’accompagnement sur les choix de couverts, les rotations à adopter. Mais je ne voulais pas revenir en arrière car les bienfaits des TCS étaient bien visibles dans mes sols : davantage des vers de terre, de matière organique, moins d’érosion, meilleure résilience des cultures. »

12 ans sans aucun travail du sol

En 2008, le producteur est donc passé en semis direct avec l’implantation de couverts variés et une évolution des rotations. « Par exemple entre blé et maïs aujourd’hui, je commence par un premier couvert d’été de moha-trèfle d’Alexandrie puis je mets un méteil protéagineux qui va désormais être récolté avant le maïs. Mon objectif proche est de me passer de maïs ensilage et de ne faire que du maïs grain pour davantage d’autonomie, une alimentation plus saine pour les vaches et un apport en matière organique pour le sol via la paille de maïs grain. » Depuis 12 ans, aucun travail du sol n’a été réalisé sur le parcellaire. « J’utilise juste un rouleau Faca devant le semoir qui couche et blesse le couvert avec parfois un autre passage de rouleau pour rappuyer le sol. J’ai deux semoirs de semis direct en propriété, un à disques pour les céréales et couverts, l’autre en monograine. »

Vers moins de phytosanitaires

Laurent Cornée fait partie du Geda Sol vivant 35 qui travaille sur les TCS et le semis direct depuis sa création en 2011. « C’est plus facile d’évoluer en groupe. On ne passe pas d’un sol conventionnel à un sol vivant en un an… On peut avoir des échecs. Les 5 premières années sont plus compliquées et ensuite, ça va mieux », souligne l’agriculteur. Aujourd’hui, le groupe travaille sur la réduction des produits phytosanitaires. « Je teste notamment l’augmentation de la densité au semis du blé et l’association des cultures. »


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