Les fourrages et prairies de plus en plus « connectés »

Les objets connectés investissent le champ des fourrages. L’évaluation de la biomasse permet de mieux gérer le disponible, les capteurs sur les animaux au pâturage informent sur leur localisation ou leur comportement… Après l’humain, la vache laitière est l’animal le plus « connecté ». Le secteur laitier dispose aujourd’hui de plusieurs capteurs très utiles aux éleveurs comme pour la détection des chaleurs par exemple. Au niveau des prairies et fourrages, il n’existe pas encore d’outils aussi aboutis pour plusieurs raisons. « Ces productions sont diversifiées et, étant éloignées des bâtiments, elles peuvent rencontrer des problèmes de connectivité. Par ailleurs, le retour sur investissement peut être plus difficile à évaluer », précise Clément Allain. Mais les lignes bougent avec l’apparition d’initiatives intéressantes comme l’ont montré les Journées de l’AFPF du 24 et 25 mars intitulées « Fourrages et prairies 2.0 ». Logiquement, les technologies les plus développées ciblent l’estimation des quantités et de la qualité des biomasses disponibles sur les surfaces fourragères. « Aujourd’hui, les outils de mesure historiques comme l’herbomètre deviennent connectés. Le Grasshopper permet par exemple une mesure électronique et géolocalisée mais le déplacement reste nécessaire. » Par le ciel La télédétection (par satellite, avion ou drone) offre des possibilités de suivi de la hauteur de l’herbe et d’évaluation de la biomasse mais certains outils manquent encore de précision. Et les satellites ne fonctionnent pas en cas de couverture nuageuse par exemple. Mais de nouveaux capteurs arrivent aujourd’hui dans l’espace avec des « visites » plus fréquentes. Les acteurs du secteur se déplacent de la production d’images vers la proposition de services numériques. Le projet Herdect a abouti à des résultats intéressants pour connaître les quantités disponibles sur ses parcelles. « Les estimations de biomasse et hauteur d’herbe obtenues par le satellite Sentinel-2 ont été comparées à des mesures terrain, affichant une qualité de prévision utilisable en masse », souligne Élise Michel (Chambre d’agriculture). « Ce modèle satellite pourrait être utilisé dans un outil d’aide à la décision (OAD) comme Happy Grass. » Actuellement disponible pour les éleveurs, cet outil, intégrant des données météo, offre des indications sur la date de fauche, aide dans le choix des espèces à implanter, dans le raisonnement de la fertilisation… Il permet aussi d’enregistrer son calendrier de pâturage. Aujourd’hui, les capteurs sur les animaux peuvent fonctionner plus facilement en extérieur, ce qui permet d’envisager de nouvelles utilisations. Des traceurs utilisant le réseau satellitaire ont été testés dans 12 élevages en transhumance en été 2020. Disposant de batteries d’une autonomie de 4 mois, « ils ont permis aux éleveurs de localiser efficacement leur troupeau plusieurs fois par jour. Il suffit d’équiper un seul mouton. Le coût était de 350 € plus 150 € d’abonnement dans ce test. Neuf éleveurs souhaitent acheter ce dispositif permettant de réduire le stress et de gagner du temps », décrit Jean Beudou, de la Chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques. Les clôtures virtuelles testées en plaine En zone de plaine, des solutions de clôtures virtuelles (CV) sur génisses et brebis ont été testées au printemps 2020. « L’enjeu est important du fait du coût élevé et du temps passé pour les clôtures physiques », souligne Amélie Fischer, de l’Idele. « Les animaux sont équipés de colliers GPS émettant un signal sonore au rapprochement de la CV puis un stimulus électrique s’ils persistent. Ils se sont rapidement familiarisés avec ce dispositif mais malgré tout quelques génisses continuaient à franchir la CV. » Garder une clôture physique autour du bloc de pâturage semble donc indispensable, mais cette technologie « pourrait être très intéressante pour changer à distance les fils avant, arrière ou de subdivision. » Le coût de 400 €/génisse plus 0,2 à 0,6 €/j/capteur d’abonnement est aussi un frein. « Nous allons voir si l’équipement pourrait n’être utilisé que sur les animaux testeurs de limite. Mais il faut d’abord les caractériser… » La simplicité, une condition Souvent utilisés pour la reproduction, les capteurs sur les animaux au pâturage peuvent aussi donner des informations sur la localisation, le comportement ou le temps de présence pour faciliter la gestion des cahiers des charges « lait de pâturage » par exemple. Un large panel de possibilités se développe donc aujourd’hui, « mais pour être adoptées par les éleveurs, ces offres dispersées doivent communiquer et être intégrées dans des outils d’aide à la décision (OAD) plus complets. Les éleveurs ne veulent pas multiplier les applications ou avoir trop de données à saisir manuellement », souligne Clément Allain.

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