insemination-porcine - Illustration Techniques d’insémination porcine

Techniques d’insémination porcine

Acte essentiel dans la conduite d’élevage, l’insémination a connu, ces dernières années, des évolutions technologiques, avec des degrés divers de réussite. L’auto-insémination, l’encapsulation, l’insémination intra-utérine ou le multidoses, pour le prélèvement à la ferme, en sont des exemples. Les centres d’insémination rivalisent pour offrir le meilleur service aux éleveurs. Améliorer les performances, gagner du temps, baisser les coûts et sécuriser le niveau sanitaire, les services de recherche et développement s’activent. Certains investissent dans la recherche génomique où le monitoring (enregistrements de données physiologiques), en lien avec les OSP (Organismes de Sélection). Des témoignages d’éleveurs, pratiquant l’une ou l’autre de ces méthodes, et des avis de spécialistes de la production porcine nous permettent de faire le point, dans les pages suivantes, sur les techniques actuelles et futures de l’insémination porcine. Bernard Laurent[nextpage title=”Un moment d’ovulation très variable pendant les chaleurs”]

Même s’il est admis que la position moyenne de l’ovulation se situe aux 2/3 de l’œstrus, la variabilité est importante.

Bien déterminer le moment optimal pour réaliser les inséminations artificielles des truies est essentiel à la réussite de la reproduction. La fertilité et la taille de la portée sont optimales lorsque les IA sont réalisées dans les 12-24 heures précédant l’ovulation. Ce moment est malheureusement peu prédictible en conditions d’élevage ; les truies sont donc inséminées de façon répétée, 2 à 3 fois pendant toute la durée de l’œstrus. Ceci augmente les coûts et les risques associés aux interventions tardives post-ovulatoires telles que les petites portées ou les infections génitales. Une étude présentée aux dernières Journées de la recherche porcine, réalisée par l’Ifip et MSD Santé animale dans 4 élevages bretons, confirme la variabilité des moments d’ovulation spontanée et identifie certains facteurs d’influence de ces venues en chaleur.

[caption id=”attachment_4148″ align=”aligncenter” width=”300″]porc-insemination-porcine Insémination porcine[/caption]

44 heures, en moyenne, après le début des chaleurs

Le statut ovarien a été évalué toutes les 24 heures, entre 4 et 8 jours après sevrage, le matin, par échographie abdominale transcutanée (sondes). L’ovulation était qualifiée par la diminution du nombre de gros follicules pré-ovulatoires. En parallèle, les éleveurs travaillaient selon le protocole habituel de détection et d’insémination établi dans leur élevage.

97,5 % des truies sont venues en chaleur et ont ovulé dans les 8 jours suivant le sevrage. 2,5 % étaient en anœstrus et une truie a ovulé silencieusement. Les chaleurs duraient de 35 à 108 heures selon les truies. L’ovulation s’est produite à 44 heures, en moyenne, après le début des chaleurs, avec d’importantes variations, (où encore 147 heures, en moyenne, après le sevrage). « La position moyenne de l’ovulation aux 2/3 de l’œstrus est cohérente avec des études précédentes. Nos résultats confirment des fréquences élevées d’ovulation précoces ou tardives. Une variabilité à prendre en compte pour bien positionner la 1ère IA ».

[caption id=”attachment_4149″ align=”aligncenter” width=”300″]Position ovulation Position ovulation[/caption]

Éviter les lactations de moins de 18 jours

La plupart des critères liés à l’œstrus et à l’ovulation varient significativement selon les élevages et les caractéristiques des truies (rang de portée, durée de lactation précédente, épaisseur de lard dorsal (ELD). Dans cette étude, la taille de la portée sevrée n’impacte ni le délai ni le moment de l’ovulation suivante. Par contre, les lactations courtes (< 18 jours) retardent significativement l’œstrus et l’ovulation. Compte tenu des risques de problèmes utérins et d’infertilité, il est important de bien contrôler la durée de lactation en amont, en groupant les mises bas et les IA. L’ELD à l’IA n’a pas d’effet sur les critères d’œstrus et d’ovulation chez les truies sevrées, du moins dans ces troupeaux. La fertilité serait moindre chez les cochettes les plus maigres (ELD<13 mn), même si l’intervalle fin de Régumate-ovulation est un peu plus court.[nextpage title=”Vers une seule insémination ?”]

L’injection d’une hormone aux truies et aux cochettes, la buséréline, pourrait permettre de se passer de la détection et de la répétition des IA. Le protocole nécessite beaucoup de rigueur.

Une injection de buséréline, aux truies, 86 à 89 heures après sevrage, suivie d’une IA unique 30 à 33 heures plus tard et le tour est joué. Le laboratoire MSD Santé animale met sur le marché une hormone analogue à la GnRH qui pourrait révolutionner le petit monde de l’insémination. Gain de temps et même d’argent.

Le procédé permet de réduire le nombre de doses de semence et de simplifier l’organisation du travail au moment des IA mais aussi plus tard en maternité. Les mises bas sont naturellement groupées, ce qui pourrait permettre d’avoir des porcelets et pourquoi pas des  charcutiers plus homogènes. La buséréline, capable d’induire chez les truies une ovulation sur commande en libérant un pic de LH, l’hormone initiatrice de la phase folliculaire précédant l’œstrus, a tout pour plaire. « D’après les publications scientifiques, le procédé fonctionne », confirme Sylviane Boulot, de l’Ifip. « Le système est désormais à l’épreuve du terrain.

[caption id=”attachment_4150″ align=”aligncenter” width=”300″]Sylviane Boulot Sylviane Boulot, de l’Ifip[/caption]

Il faut cependant beaucoup de rigueur de la part de l’éleveur pour utiliser cette technique (respect des doses et surtout des délais d’injection et d’IA) et quelques modifications dans l’organisation du travail ». À commencer par le changement du moment du sevrage, à faire dans l’après-midi pour ne pas avoir à injecter l’hormone pendant la nuit. Si on sèvre le mercredi en début d’après-midi, l’injection est effectuée le dimanche matin de bonne heure, et l’IA unique, le lundi en début d’après-midi. Un sevrage du jeudi après midi, éviterait l’injection du weekend, mais décalerait les mises-bas suivantes dans la semaine… « Dans les protocoles classiques, toutes les IA (entre 2 et 3) contribuent à la portée. Les essais réalisés avec de la semence de verrats de différentes couleurs l’ont bien démontré. Avec une seule IA, il n’y a donc pas de marge d’erreur. L’insémination doit être bien réalisée, sans reflux, avec une semence de qualité et bien conservée ».

L’encapsulation de la semence n’a pas dit son dernier mot

Le procédé d’encapsulation était prometteur. Il est actuellement en stand-by. Dans une dose, une partie de la semence est diluée de manière classique. Elle est donc disponible immédiatement dès son introduction dans l’utérus de la truie. L’autre partie est encapsulée et protégée dans des petites billes d’alginates. Celles-ci se désagrègent progressivement après une douzaine d’heures, libérant ainsi les spermatozoïdes à la motilité intacte. Le fait d’éviter la troisième IA, parfois réalisée quand les truies ne sont plus en chaleur, est une sécurité au niveau sanitaire. Elles ne sont plus, à ce stade, en état de se défendre contre d’éventuels agents pathogènes introduits dans le vagin. Le problème, c’est qu’il fallait toujours les deux IA pour sécuriser la fécondation. Une de trop pour séduire les éleveurs et asseoir définitivement la technique dans les verrateries. Le procédé d’encapsulation n’a pourtant pas dit son denier mot. La recherche se poursuit pour améliorer son efficacité. Ce procédé naturel pourrait révolutionner les chantiers d’IA et menacer les hormones…

Truies en état

Le passage du verrat reste conseillé après sevrage pour stimuler les truies. Quant aux retours, ils doivent être traités de manière classique. « L’hormone déclenche et synchronise l’ovulation, mais l’ovaire doit être fonctionnel et l’utérus en bonne santé. Les truies doivent être en état au sevrage ; c’est difficile de  réveiller un ovaire qui ne fonctionne pas ! ». La conduite d’élevage reste primordiale. Le système fonctionne aussi pour les cochettes, avec un protocole légèrement différent  et seulement si elles sont synchronisées par un progestatif (Régumate). Le succès de la technique dépendra de la capacité des éleveurs à respecter strictement les protocoles  avec des injections  matinales le week-end et des plages horaires étroites.

À l’étranger….

Le produit a reçu une autorisation de mise sur le marché dans les pays européens. « L’intérêt pour ce type de démarche  ne sera sans doute pas le même dans les différents pays. Aux Pays-Bas, la détection, très pointue, permet aux éleveurs de n’effectuer qu’une IA et demie, en moyenne, avec une très bonne prolificité, sur des chaleurs naturelles. Ils seront peut-être moins motivés par cette technique. Dans certains pays nordiques, les hormones sont peu utilisées car réservées à un usage vétérinaire ». Aux États-Unis, une autre GnRH, est actuellement à l’essai, en conditions de terrain. « Il s’agit d’un gel à appliquer dans le vagin de la truie à l’aide d’une sonde ». Un procédé qui paraît plus souple d’utilisation. Pour les deux méthodes, la vérité du terrain parlera… Bernard Laurent[nextpage title=”34 porcelets par truie et par an, en toute simplicité”]

Pas de technique sophistiquée autour de l’insémination à la maternité collective de la Planchette. Juste un protocole bien appliqué. Les résultats sont là : 97 % de fertilité et 16,72 nés totaux par portée.

Peuplée en 2012, la maternité collective de la SCEA de la Planchette tourne désormais à plein régime. Les 550 truies Adenia, conduites en 10 bandes avec un sevrage à 21 jours, ont produit 34,09 porcelets chacune, sur la dernière année. La marque d’un excellent statut sanitaire mais aussi d’une extrême rigueur dans la conduite du troupeau. « À la fin des mises-bas, nous injectons de la sergotonine à toutes les truies puis du dynolitic, 36 heures plus tard », explique Dominique Quellard, responsable d’élevage.

[caption id=”attachment_4151″ align=”aligncenter” width=”300″]Dominique Quellard, responsable de l'élevage et Amélie Cottard, salariée Dominique Quellard, responsable de l’élevage et Amélie Cottard, salariée.[/caption]

Dans la semaine qui précède le sevrage, une cure de vitamines et d’oligo-éléments est administrée avec 700 g de sucre (sur 4 jours ; 175 g/jour). « L’objectif est de stimuler la sécrétion hormonale. Les truies sont plus toniques ». Le sevrage a lieu le mercredi à 16 heures, les animaux sont douchés dans la foulée. « Avec un sevrage du mercredi matin, j’avais trop de truies à inséminer le dimanche ». Deux verrats souffleurs sont sollicités pour la détection des chaleurs. L’un d’entre eux passe, dès le jeudi, devant les truies. Il reste une heure dans le couloir. Les jours suivants, il passe matin et soir. « La détection des chaleurs débute le dimanche matin, pour des inséminations du soir. La seconde IA est réalisée vers 10 h 30, le lundi en même temps que la première IA des truies détectées le dimanche soir; la troisième est effectuée, au besoin, le mardi vers 8 heures. Les animaux détectés le lundi matin sont inséminés le lundi soir, puis le lendemain matin. Les dernières IA sont faites le mercredi, dans la matinée ». 80 % des truies et des cochettes sont en chaleur le dimanche soir. En moyenne, 2,7 IA sont effectuées par truie.

Pas de cases de maternité vides

Lors des inséminations, un verrat est bloqué devant cinq truies. Les doses de semence, reçues le vendredi et le lundi matin, sont stockées à plat, sans retournement, à 17°C. Elles ne sont pas réchauffées, simplement placées à température ambiante une heure avant les inséminations. Les vulves sont nettoyées et déinfectées avec un produit non-spermicide.  « J’insémine avec des sondes classiques en mousse, sur lesquelles j’applique un gel lubrifiant. Je branche 7 à 8 truies à suivre et je reviens débrancher la première. Les sondes restent 5 minutes en place, ce qui limite le refoulement. Les doses sont maintenues à l’aide de serre-flancs ». 55 animaux sont inséminés par bande, avec un objectif de 48 mises-bas. « Je vends les truies supplémentaires, après échographie. Toutes les cases de maternité doivent être pleines ».

Pesée individuelle des porcelets à la naissance

L’éleveur déplorait, à une certaine période, le fait d’avoir des truies un peu trop grasses à l’arrivée en maternité. Depuis, les rations (alimentation en soupe), sont définies par les mesures d’épaisseur de lard dorsal. Globalement, un flushing est effectué après le sevrage, à 4,8 kilos d’aliment gestante, les vendredi, samedi et dimanche. Les rations descendent ensuite à 2,5 kg, avant de remonter autour de 4 kg le vendredi suivant, jusqu’à l’échographie. Ensuite, en salle de gestantes et jusqu’à un mois avant la mise-bas, les truies reçoivent 2,7 kg d’aliment. Trois semaines avant l’entrée en maternité, elles ont 3,7 kg d’un aliment mixte , comprenant 20 % d’aliment de type allaitante. Dans cette période, les cochettes ont 3,3 kg du même aliment mixte. L’objectif du mélange est de favoriser la croissance des porcelets, qui tous pesés individuellement à la naissance, au moment des soins. Ils pèsent, en moyenne entre 1,30 et 1,35 kg. Avant l’apport d’aliment allaitante, le poids moyen à la naissance était de 1,20 kg.

Plus de 13 sevrés par portée

Les chaleurs des cochettes sont repérées en quarantaine. « L’objectif est d’inséminer des animaux qui ont déjà été vus en chaleur et qui ont une épaisseur de lard dorsal de 14 mm au minimum ». L’âge moyen à la première saillie est de 269 jours et les mises-bas ont lieu à 385 jours. Sur l’ensemble des animaux, la fertilité est de 96,6 %, les nés totaux de 16,72 par portée et les nés vifs de 15,20. Au final, 13,17 porcelets sont sevrés par portée. Des résultats qui interpellent Thierry Pécheul, responsable de la filière porcine d’Amélis : « Si des techniques plus sophistiquées existent, elles sont aussi plus chères. Sur cet élevage, l’économique prime sur l’innovation, avec d’excellents résultats ». Bernard Laurent[nextpage title=”Amélis met des moyens supplémentaires dans la recherche”]

« Même si notre cœur de métier reste l’insémination, nous développons un travail de recherche en partenariat avec les organismes de sélection », explique Thierry Pécheul, responsable de la filière porc d’Amélis.

[caption id=”attachment_4152″ align=”aligncenter” width=”300″]Thierry Pécheul, responsable de la filière porc d'Amélis et Anthony Pichot, conseiller d'élevage Thierry Pécheul, responsable de la filière porc d’Amélis et Anthony Pichot, conseiller d’élevage.[/caption]

La sélection génomique, en premier lieu, qui nécessite de collecter un grand nombre de données phénotypiques sur divers critères tels que les aplombs ou la santé des animaux. « Nous avons créé un réseau d’une cinquantaine d’éleveurs chez lesquels nous réalisons des essais de nouveaux dilueurs, de sondes et de monitoring (capteurs de température des truies, de toux, de déplacements…).

L’exemple du bovin

À terme, on peut imaginer la diffusion d’appareils permettant de détecter les chaleurs ou des problèmes de santé comme chez les bovins ». Plusieurs capteurs, désormais utilisés en routine chez les bovins, (colliers, podomètres, bolus équipés de sondes) permettent de détecter l’activité de rumination, le suivi de la température de l’animal ou du vagin ou encore l’activité motrice (suractivité pour les chaleurs, sous activité pour les problèmes de santé…). Un projet d’alliance entre Cobiporc et Amélis (2,6 millions de doses de semences vendues) est en cours de finalisation, comme l’ont annoncé les 2 CIA  fin septembre 2014. « L’objectif de l’alliance est de mutualiser les moyens de production et de logistique, mais aussi de recherche et développement, dont les budgets sont de plus en plus importants  ».  [nextpage title=”Les phéromones du verrat sont perçues à plusieurs mètres”]
Dans les grands troupeaux, il faut éviter de stimuler plus de truies qu’on ne peut inséminer en 15-20 minutes (blocage du verrat adapté). Le moment idéal d’insémination se situe 5 à 20 minutes après la présentation du verrat. Sinon, le risque est d’inséminer des truies déjà en période réfractaire (période de moindre expression des chaleurs) et d’avoir une moindre fertilité. La période réfractaire dure une heure environ. Il faut être vigilant s’il y a un couloir central entre des truies d’une même bande.

[caption id=”attachment_4153″ align=”aligncenter” width=”300″]Dans les grands troupeaux, il faut éviter de stimuler plus de truies qu'on ne peut inséminer Dans les grands troupeaux, il faut éviter de stimuler plus de truies qu’on ne peut inséminer en 15-20 minutes[/caption]

Dans certains élevages, la détection est réalisée avant de commencer les inséminations (deux périodes distinctes). Il faut donc attendre au moins une heure avant de représenter le verrat devant les truies (période mise à profit pour déjeuner ou préparer la semence). Le nombre de doses nécessaires est connu. Dans d’autres élevages, on détecte et on insémine en même temps. Le verrat doit être avancé progressivement, sachant que même s’il est bien bloqué devant 4 à 5 truies, il stimule également les truies voisines (odeur ou vision). Les phéromones sont perçues à plusieurs mètres. Certaines truies sont plus réceptives à certains verrats qu’à d’autres, d’où l’intérêt d’avoir deux verrats souffleurs et de les présenter aux truies l’un le matin, l’autre le soir en période de stimulation, après sevrage.  [nextpage title=”Les dilueurs surfent sur la vague « sans antibios »”]
Il n’y a pas encore d’alternative à l’utilisation de dilueurs contenant des antibiotiques pour conserver la semence jusqu’à l’insémination. Ce n’est probablement qu’une question de temps.

Les dilueurs actuels, qui permettent de conserver la semence à 17°C, contiennent des antibiotiques qui inhibent le développement des bactéries responsables de la dégradation de la semence dans le temps. Malgré les mesures d’hygiène draconiennes prises dans les centres d’insémination, au moment des prélèvements et du conditionnement, la semence n’est pas stérile ! L’objectif, à court ou moyen terme, serait  de se passer des antibiotiques pour contribuer à la lutte contre l’antibiorésistance, enjeu majeur de santé humaine. « Depuis plusieurs années, les fournisseurs, CIA et chercheurs s’interrogent  sur les risques potentiels et cherchent des alternatives », confie Sylviane Boulot, de l’fip. Vers quelles solutions s’orientent-ils ? « Certains imaginent livrer de la semence à 4°C pour limiter le développement des bactéries. Mais ce n’est pas aussi simple que de conserver des médicaments au frigo. Il faut modifier les dilueurs pour éviter les chocs thermiques aux spermatozoïdes ».

[caption id=”attachment_4154″ align=”aligncenter” width=”300″]Malgré les mesures d'hygiène prises dans les CIA, la semence n'est pas stérile Malgré les mesures d’hygiène prises dans les CIA, la semence n’est pas stérile.[/caption]

D’autres procédés sont en cours d’évaluation.  « Une technique consiste à filtrer les spermatozoïdes pour les séparer des bactéries et des champignons, par centrifugation de la semence (gradients de densité). Les spermatozoïdes se retrouvent dans une zone et les germes dans une autre. La séparation est alors possible ». On peut aussi imaginer l’incorporation de substances ayant un pouvoir de conservation.

Congélation

Les centres d’insémination, qui recherchent les meilleures techniques de conservation, continuent de travailler sur l’amélioration de l’hygiène en amont pour limiter le nombre de bactéries dans les doses. La congélation des semences est réservée au transfert de génétique (entre pays). La fertilité est moindre qu’avec des doses classiques, mais le but est simplement de transférer des gènes. La technique n’est pas (encore) transposable aux élevages conventionnels. La mise en place est compliquée, avec un protocole de décongélation contraignant. La semence est plus fragile et doit être mise en place au plus près de l’ovulation. Même si cette technique présente l’avantage d’un approvisionnement facile pour l’éleveur (stockage de la semence sur l’élevage), elle restera cantonnée aux besoins de la génétique pendant quelques années encore.[nextpage title=”Un mélange de semences au service des performances”]

Utilisant la semence Armada depuis avril 2014, Jérémy Mainguy a vu les résultats de son élevage s’accroître aussi bien en fertilité qu’en porcelets nés vivants par portée.

Installé en mai 2013 à la suite de ses beaux-parents à Caro, Jérémy Mainguy conduit un élevage naisseur engraisseur (total) de 190 truies, avec un salarié. À son installation, une maternité et un bâtiment gestantes neufs ont été créés, et le post-sevrage rénové.

[caption id=”attachment_4155″ align=”aligncenter” width=”300″]Franck Piederrière, commercial Gènes Diffusion, Nicolas Jaglin, directeur commercial, et Jérémy Mainguy, éleveur à Caro De gauche à droite : Franck Piederrière, commercial Gènes Diffusion, Nicolas Jaglin, directeur commercial, et Jérémy Mainguy, éleveur à Caro.[/caption]

En parallèle, l’éleveur a renouvelé l’ensemble du cheptel, souhaitant mettre en place de la génétique Youna et Piétrain Gènes +. L’ensemble des bâtiments a été intégralement nettoyé et désinfecté pour accueillir les 200 cochettes.

Des résultats très positifs

Au printemps dernier, pour améliorer ses performances, le producteur a opté pour Armada, mélange de semences des meilleurs reproducteurs (voir ci-dessus). La fertilité est passée de 84,1 % à 91,7 %, et le nombre de nés vivants par portée, de 12,4 à 13,7. Des progrès spectaculaires. « Aujourd’hui, pour 44 places en maternité, 48 truies sont inséminées. 2,5 IA sont réalisées par truie », informe l’éleveur.

Le troupeau est conduit en 4 bandes, avec un sevrage à 28 jours. Les truies sont sevrées le mercredi matin et reçoivent de la lumière toute la journée. Elles sont lavées le vendredi matin, puis déparasitées. À partir du vendredi soir, deux verrats souffleurs – des Piétrains Gènes + achetés – passent dans le couloir central de la verraterie (truies bloquées), un le matin, l’autre le soir. Côté alimentation, « les truies sont à la diète le mercredi et reçoivent 4 kg d’aliment gestante le jeudi jusqu’au samedi. Le dimanche, elles mangent moins avec la venue en chaleur. » Tout l’élevage est alimenté via une machine à soupe.

+2 % en fertilité et +0,6 nés totaux/portée

Armada est un mélange de semences des meilleurs reproducteurs de chaque organisation de sélection. « Des doses de 3 à 5 verrats de la meilleure génétique sont assemblées, ce qui permet de cumuler les qualités de chacun pour des performances plus sûres et régulières », explique Nicolas Jaglin, directeur commercial Gènes Diffusion. Par ailleurs, cette semence est plus concentrée dans une dose qui reste de 85 ml. « Et chaque éjaculat est systématiquement analysé par PCR pour garantir l’absence de SDRP. Des sérologies sont par ailleurs effectuées tous les 15 jours sur les verrats de nos centres. » Ayant mis en service ce nouveau produit fin 2013, Gènes Diffusion commence à avoir du recul. « Sur plus de 21 000 truies inséminées en Armada, la progression moyenne est de 2 % en fertilité. Et sur 5 400 mises bas, le nombre de nés totaux est supérieur de 0,6 en moyenne. » Certes le coût est supérieur de 8 % à celui de la semence classique. « Mais pour une dépense supplémentaire de 2,5 €/truie/an, le gain possible est de 60 €/truie/an », chiffre Nicolas Jaglin.

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Gain de temps avec les sondes d’auto-insémination

Dès le départ, Jérémy Mainguy a fait le choix de la semence Gédis (auto-insémination) commercialisée par Gènes Diffusion, pour ses inséminations du week-end, avec 20 doses commandées. « Cela permet de réduire le temps de travail et on peut inséminer seul. Le reste de la semaine, comme nous sommes deux, nous utilisons des blisters. En moyenne sur l’élevage, 2,5 IA sont pratiquées par truie : la première est faite 12 h après l’immobilisation, la deuxième à 36 h, et si la truie est toujours en chaleur, une 3e IA est réalisée à 60 h », note le producteur qui projette d’augmenter la part de Gédis de ¼ à ¾ des doses utilisées. Et de préciser : « J’insémine 30 truies par heure en Gédis. Avec les blisters, 20 truies sont passées en 1 heure, et souvent avec deux personnes. »

Avant insémination, la vulve des truies est lavée avec une lingette nettoyante et désinfectante. « La sonde Gédis se réchauffe à l’intérieur de la truie jusqu’à la fonte du bouchon de cire. Pompant la semence, la truie s’auto-insémine. En deux à trois minutes, les doses sont vidées. C’est également plus sûr au niveau sanitaire », précise Franck Piederrière, commercial Gènes Diffusion. Aujourd’hui, le Gédis, produit 100 % français, représente près de 70 % des ventes de Gènes Diffusion. Agnès Cussonneau[nextpage title=”Les nouvelles technologies, au service des commandes”]

Commander des doses d’insémination et suivre l’historique de ses commandes d’IA permet aux éleveurs de gagner en réactivité. Ce service se poursuit jusqu’à la livraison des doses sur l’exploitation.

« L’informatique et les nouvelles technologies, il faut s’y mettre. C’est un gain de temps quand on les maîtrise », assure Olivier Billon, un des quatre associés de la SAS Billon, à Log Éguiner (29).

[caption id=”attachment_4156″ align=”aligncenter” width=”300″]Olivier Billon, éleveur à Loc Éguiner (29) Olivier Billon, éleveur à Loc Éguiner (29) ajuste chaque jour sa commande de doses d’IA avec son smartphone, en fonction de son stock et des truies qui sont à inséminer le lendemain.[/caption]

Dans cet élevage de 950 truies, 1,4 km de fibre optique permet de connecter tous les ordinateurs sur un serveur pour coordonner tous les automatismes d’un atelier à un autre. Aussi, c’est tout naturellement au milieu de ses truies que l’on retrouve le responsable de l’atelier reproduction, ajustant sa commande de doses d’insémination sur son smartphone, en fonction de son stock d’IA et des animaux en chaleur.

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L’exploitation

  • 4 associés et 5 salariés
  • NE 950 truies sur site
  • Autorenouvellement
  • 80 ha
  • Fabrication des aliments à la ferme
  • Traitement des effluents

Un suivi sécurisant de la commande

Depuis début octobre, avec une nouvelle application chargée sur son téléphone portable, l’éleveur a été séduit par la souplesse de la prestation* proposée par Cobiporc. Avec une conduite à la semaine, un planning de base est établi, pour l’insémination hebdomadaire de 52 truies, avec 90 doses livrées le lundi matin, 40 le mardi matin et 20 le vendredi après-midi, pour les IA du week-end. Mais les commandes supplémentaires sont dorénavant facilitées et sécurisées. « Plus besoin de téléphoner, plus d’horaires à respecter, le service est disponible 24 heures/24… La prise de commande est de plus confirmée avec la réception instantanée d’un SMS », explique l’éleveur. Cette trace écrite sécurise la gestion de l’atelier reproduction, elle permet d’avoir un suivi des doses et du nombre commandé et d’y revenir facilement si besoin, en modifiant ou annulant la manipulation.

Être averti à la livraison des doses d’IA

Outre la confirmation de la commande par SMS, Daniel Rouillé, un des 4 associés du Gaec Lagarde à Meillac (35), responsable de l’atelier des 200 truies NE, apprécie d’être averti par SMS de la livraison des doses sur son élevage. « C’est plus de confort. Finis les allers-retours inutiles au local de dépôt, je peux me consacrer sereinement à une autre tâche en attendant la livraison. » Un code-barres a été attribué à l’élevage. Au dépôt du colis, le livreur a la certitude du lieu de livraison (local, élevage). La connexion du code-barres du colis avec celui de l’élevage génère l’envoi d’un SMS à l’éleveur sur son téléphone portable. « À la réception de ce dernier, je peux récupérer rapidement mes doses pour les placer à la bonne température et organiser mon chantier d’IA. »

Arrêt du prélèvement à la ferme

Mais l’informatique ne fait pas tout… Et côté technique d’élevage, le savoir-faire des éleveurs et des salariés est toujours requis. Depuis la mise en place des bandes de 50 truies gestantes en 2012, le suivi individuel des animaux est croissant au début de l’allotement autour du distributeur automatique de concentrés (Dac). Pour maintenir les critères techniques, le poste prélèvement à la ferme, en place depuis 1985 dans l’élevage, a été supprimé, libérant une personne à temps partiel. Optimisation de la main-d’œuvre, meilleur suivi des animaux… Un défi à relever avec l’investissement de 30 000 euros lié à l’achat de doses d’IA à l’extérieur.

Le meilleur suivi de la gestation a permis d’avoir des portées plus vigoureuses et plus homogènes, et des poids de porcelet plus importants. Les pesées systématiques à la naissance sont réalisées.
Les pratiques liées à l’IA n’ont pas changé. Les journées ne commencent plus par le prélèvement de la semence, mais directement par des IA. La biosécurité des centres d’IA est pour l’éleveur un gage de garantie, « une sécurité supplémentaire, face à une pression sanitaire importante. »

 Carole David

* Cobitrace est un service gratuit proposé par Cobiporc, en cours de déploiement sur le Grand Ouest. Accessible par téléphone, internet ou smartphone.[nextpage title=”L’intra-utérine fait place à l’auto-insémination”]

Un gain de temps… Sylvain Sérandour plébiscite l’auto-insémination. Il a adopté, en début 2013, le « Neosem » sur son élevage de 550 truies.

Les 550 truies Naïma de LA SARL de la Ville Quinio, à Tréveneuc (22), conduites en 10 bandes avec un sevrage à 21 jours, n’ont pas levé le pied au changement de technique d’insémination. Elles ont sevré, sur la dernière année, 12,86 porcelets par portée ou 32,38 par truie productive, avec une belle régularité au niveau du rang de portée (pas de baisse de prolificité en deuxième portée).

[caption id=”attachment_4158″ align=”aligncenter” width=”300″]Sylvain Sérandour, (à droite), avec Jean-Luc Farard, responsable équipe commerciale et Romain Brard, responsable commercial Cobiporc Sylvain Sérandour,
(à droite), avec Jean-Luc Farard, responsable équipe commerciale et Romain Brard, responsable commercial Cobiporc.[/caption]

Le nombre de nés totaux a légèrement baissé, suite à un passage de leptospirose. « La technique d’insémination n’y est pour rien », assure l’éleveur. Pas question de remettre en cause le Neosem, un procédé d’auto-insémination, qui, selon lui, permet d’inséminer en deux fois moins de temps.

Sucre et huile de foie de morue pendant le flushing

Des mesures d’épaisseur de lard (ELD) sont effectuées à trois reprises dans le cycle de la truie au sevrage, en sortie de verraterie et à l’entrée en maternité. Quatre programmes alimentaires sont définis. Chaque animal est alimenté en fonction de l’un ou l’autre de ces programmes, selon son ELD. (allotement en verraterie par vanne, puis système Selfifeeder à sec, en gestante). Après le sevrage, un flushing est réalisé. En moyenne, les truies reçoivent 3 kg d’aliment gestante le jeudi, 4,5 kg le vendredi, 3,5 kg le samedi puis 2,5 kg jusqu’au jeudi. Une courbe classique en « U » s’ensuit, avec une remontée dans les dernières semaines avant la mise bas. Pendant le flushing, elles consomment de l’huile de foie de morue pendant 5 jours et deux fois 200 grammes de sucre les vendredi et samedi avant les inséminations.

2,5 IA par truie

Les 50 truies de la bande, qui ne reçoivent aucune injection systématique d’hormones après la mise bas, sont sevrées le mercredi matin. Le verrat (deux mâles souffleurs présents sur l’élevage) est présenté aux truies dans la foulée, puis une fois par jour jusqu’au jeudi suivant. Les doses de semence sont livrées les vendredi soir, les lundi et mardi matin. « Les 7 à 8 truies qui sont en chaleur le samedi sont inséminées le dimanche matin. Il n’y a pas de passage dans l’élevage le dimanche soir.

[caption id=”attachment_4157″ align=”aligncenter” width=”300″]Rafal Szarek, salarié de la SARL de la Ville Quinio Rafal Szarek, salarié de la SARL de la Ville Quinio.[/caption]

Ces truies ont une 2e IA le lundi matin puis une 3e le mardi matin. Celles qui sont détectées le dimanche sont inséminées le lundi matin puis le mardi matin. Enfin, celles qui viennent en chaleur le lundi matin sont inséminées dès le soir puis le mardi matin. Ensuite, des IA sont réalisées sur les truies toujours en œstrus le mercredi matin ». En semaine, les inséminations sont réalisées à deux personnes. Le verrat est bloqué devant 6 à 7 truies. En moyenne, 2,5 IA sont réalisées par animal.

10 % des doses de Cobiporc

Le Neosem représente 10 % des doses de semences livrées par Cobiporc, l’intra-utérine 70 % et les sondes classiques 20 %. Sa vidange se fait automatiquement en respectant le rythme d’absorption de la semence par la truie. L’éleveur gagne donc en rapidité et en qualité de travail. La réserve de semence est située à l’extérieur de la truie, ce qui permet un contrôle permanent du niveau de la vidange. Il n’y a donc pas de risque de retirer la sonde trop tôt. Des parties sécables sur la sonde permettent d’ajuster le Neosem aux différentes morphologies des truies. La largeur des collerettes (accroche dans la truie) et la mise en place d’un réducteur dans la sonde ont permis d’abaisser la vitesse de vidange. En conséquence, bien que l’IA soit en légère pression (du fait du ballonnet), il n’y a pas de refoulement.

Observation des chaleurs en quarantaine

L’arrêt du « Régumate » pour les cochettes a lieu le mercredi. « Les premières IA ont lieu le lundi, matin ou soir. Ensuite, j’applique la règle des 12-24-36 heures pour les IA suivantes ». Les cochettes, de deux âges différents, arrivent sur l’élevage par lots équivalents à trois bandes. « Les chaleurs sont repérées en quarantaine. Les premières à être inséminées sont les plus lourdes de celles qui sont déjà venues en chaleur. » Les mises bas ont lieu à 360 jours d’âge, de moyenne. Les cochettes affichent une meilleure fertilité que les  truies : 96 % contre 90 %. Bernard Laurent[nextpage title=”Le sexage de la semence reste en suspens”]

L’idée de sexer la semence est séduisante. Produire seulement des femelles pour ne pas avoir à castrer les mâles. Ou des mâles pour gagner en performance, avec une détection fiable des odeurs sexuelles.

Même si la méthode de sexage de la semence existe, elle semble encore loin de se répandre dans les élevages. De nombreux porcelets issus de sperme sexé sont déjà nés en Amérique du Nord et en Europe. Par contre, la technique n’est pas applicable à grande échelle. Elle est basée sur le marquage de l’ADN des chromosomes des spermatozoïdes et leur analyse par fluorescence. Comme les spermatozoïdes mâles Y ont environ 5 % d’ADN en moins, ils sont moins fluorescents que les spermatozoïdes femelles X. Le tri se fait grâce à un cytomètre de flux, après lecture de la fluorescence (rayon laser). Les spermatozoïdes X et Y sont séparés par un champ électrique. Les spermatozoïdes sexés sont endommagés ce qui entraîne une forte réduction de la fertilité et de la taille de portées. De plus, le procédé est très long. Il faut une dizaine d’heures pour réaliser une dose sexée à 1 milliard de spermatozoïdes. Le défi est d’améliorer la technique de sexage et de travailler sur la mise en place de petites quantités de spermatozoïdes. Certaines entreprises travaillent sur l’accélération du process.

[caption id=”attachment_4159″ align=”aligncenter” width=”300″]Dans l'espèce bovine, les semences sexées sont diffusées dans de nombreux élevages conventionnels Dans l’espèce bovine, les semences sexées sont diffusées dans de nombreux élevages conventionnels.[/caption]

Spermatozoïdes femelles agglutinés

La recherche se poursuit sur la protection et la conservation des spermatozoïdes. Des méthodes alternatives apparaissent dans les laboratoires de recherche, comme le marquage membranaire ou des techniques d’agglutination des spermatozoïdes, porteurs des mêmes chromosomes sexuels, technique développée en Suède. « Ce sont malheureusement les spermatozoïdes femelles qui s’agglutinent. Les mâles restent libres », indique Sylviane Boulot. Or, la filière rechercherait en priorité à produire des femelles (meilleure alternative à la castration) ; aucune méthode de détection des odeurs sexuelles des mâles n’étant encore fiable à 100 %. Compte tenu de l’enjeu économique, peu de publications existent sur le sujet. Les échéances d’application “terrain” sont difficiles à estimer. La technique ne sortira que lorsqu’elle sera vraiment au point. Dans l’espèce bovine, le sexage intéressait et ne s’appliquait qu’à la sélection des reproducteurs il y a 5 à 6 ans. Aujourd’hui, les semences sexées sont diffusées dans de nombreux élevages conventionnels. Elles ne sont pas encore aussi performantes que les semences classiques et sont souvent réservées aux génisses, plus fécondes. Bernard Laurent


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