- Illustration Une Pac bretonne à 500 millions

Une Pac bretonne à 500 millions

Dans le cadre de la différenciation, la Bretagne cherche à obtenir la gestion de la quasi-totalité des aides Pac pour les agriculteurs bretons. À la clé, un budget d’un demi-milliard d’euros par an.

Du discours aux actes. Le 21 juin 2018, à Quimper, près de 50 ans après le Général de Gaulle, sur la même place Saint-Corentin, Emmanuel Macron appelait à un acte 2 d’un « pacte breton » afin de renforcer la décentralisation de cette « région exemplaire qui réussit ce qu’elle entreprend ». Dans la longue liste des thèmes abordés par le président de la République : l’agriculture et la Pac. Dont cette phrase : « Je serai le défenseur d’une Pac où nous aurons clarifié notre organisation entre ce qui relève de l’État et des régions et je suis prêt à ce que le gouvernement confie aux régions les aides aux investissements pour la prochaine Pac, ce sera plus clair et plus efficace ».

Débattu en février 2020

Un an et demi plus tard, place aux actes. D’autant que la Région est séduite par l’idée de se voir octroyer la gestion de l’enveloppe bretonne de la Pac qui s’élève potentiellement à un demi-milliard d’euros par an pour la période 2022-2028 (ou 2023-2029 si un second report de la réforme est acté). « Dans le cadre de la différenciation (NDLR : la gestion décentralisée de la Pac), la Bretagne demande la gestion du 1er pilier de la Pac », explique Olivier Allain, vice-président du Conseil régional en charge de l’agriculture, en soulignant qu’il s’agit là « d’une décision du chef de l’État ». Avant d’insister sur la pertinence de cette disposition : « Nous mesurons régulièrement l’efficacité des politiques publiques pour orienter et accompagner la transition des exploitations agricoles ».

Lundi dernier, la Région a procédé à l’audition des différentes organisations professionnelles agricoles et associations bretonnes pour recueillir leur avis et leurs propositions sur le sujet. Dans le calendrier, ce projet de « régionalisation » de la Pac sera débattu en février 2020 à Rennes.

Divergences syndicales

« La FRSEA ne se positionne pas car il y a beaucoup d’incertitudes, notamment en cette période de renouvellement de la Commission européenne nommée sous le signe du « Green deal », résume Thierry Coué, son président, avant de s’étonner du projet puisque « la France a déjà arbitré la gestion du premier pilier de la Pac ». Et de s’interroger sur l’orientation de la prochaine politique agricole européenne : « De quel verdissement va-t-on parler, notamment dans la perspective d’une maîtrise du budget agricole européen influencée par un Brexit dont les contours ne sont pas encore connus ».

De son côté, la Confédération paysanne soutient pleinement le projet de la Région. « Pour la Pac en cours, nous avons été trop déçus. À commencer par le paiement redistributif qui, de 150 €/ha est tombé à 100 €/ha, puis à 50 €/ha. Nous voulions également qu’une partie des aides du premier pilier soit fléchée vers la MAE. Au final, par rapport aux meilleurs scénarios, la Bretagne perd 100 M€ par an », estime Jean-Marc Thomas, président de la Confédération de Bretagne qui se montre favorable à l’idée que la Région prenne la main sur le budget Pac, « à condition que notre projet puisse prendre une part significative ». C’est-à-dire, que soit actée une aide minimum de 5 000 € par actif et un plafonnement des aides à 20 000 € par actif. Jean-Marc Thomas réitère également la demande de transfert du 1er vers le 2e pilier, nécessaire pour financer les MAE et pour assurer « un équilibre des aides entre un agriculteur conventionnel, un bio ou un herbager au niveau actuel de 12 000 € par actif ».

Pour la Coordination rurale, « régionaliser la Pac n’est pas une priorité ». Sans « s’opposer frontalement » au projet de la Région, le syndicat exprime des craintes sur la future gestion qui pourrait « se faire au détriment des agriculteurs : car, si les MAEC ont été globalement bien gérées, il y a eu quand même quelques couacs. Or, dans le cadre de la Pac il s’agit de gérer 500 millions d’euros ». À cette différenciation bretonne, la Coordination rurale aurait préféré « redonner une vision générale à la Pac inscrite dans un cadre européen et qui insiste sur la régulation, sur les distorsions de concurrence plutôt que de se focaliser sur les attentes sociétales ».


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