Plongée dans la saga Oberthür

oberthur-imprimerie - Illustration Plongée dans la saga Oberthür
C’est l’histoire d’une épopée industrielle, mais aussi familiale et sociale qui est actuellement racontée à l’Écomusée rennais. L’imprimerie Oberthür fait partie intégrante de l’histoire de la ville.

En pénétrant la salle d’exposition à l’ambiance tamisée, le visiteur s’immerge tout de suite dans l’histoire industrielle de l’imprimerie Oberthür, longue de près de 140 ans. Au centre de l’exposition, de nombreux outils témoignent des différentes techniques d’illustration (gravure, lithographie…), de typographie, de façonnage (pliage, couture, collage…) utilisées selon les époques. Une mise en scène qui rappelle le grand atelier de l’imprimerie situé faubourg de Paris à Rennes.

Mais c’est surtout le côté humain qui est mis en lumière dans l’exposition. La famille Oberthür d’un côté, les ouvriers de l’autre. Tout commence avec François-Charles Oberthür dont le père tenait un atelier de gravure à Strasbourg. Il découvre la lithographie auprès d’Aloys Senefelder, son inventeur, qui travaille quelque temps avec son père. En 1838, il arrive à l’imprimerie rennaise Marteville & Landais et devient rapidement l’associé de Landais, puis son successeur en 1852, avec à l’époque 18 ouvriers.

L’almanach du facteur, un produit phare

« Il à été précurseur sur la technique de la lithographie. Et propose aux facteurs un almanach agrémenté d’images et d’informations, plus soigné que la version qu’ils distribuaient alors. C’est lui qui en a fait un produit de consommation de masse, porté par le vaste réseau des facteurs », raconte Alison Clarke, conservatrice à l’Écomusée. Le premier almanach Oberthür est paru en 1854. Par la suite, un grand nombre de modèles a suivi. Jusqu’à 13 millions d’exemplaires ont été vendus en 1927. Égayant l’intérieur des foyers français jusqu’à aujourd’hui, ce produit a fait la renommée de l’entreprise. D’autres productions ont contribué au succès économique : affiches et étiquettes publicitaires, livres, documents administratifs et fiduciaires.

Un fondateur paternaliste

Initialement adepte d’une politique dure, François-Charles Oberthür s’oriente vers le paternalisme après la longue grève des ouvriers qui touche l’imprimerie en 1865. « Il crée une école d’apprentissage pour former des ouvriers qualifiés en nombre suffisant, un service médical gratuit, une société de gymnastique, un système de retraite et d’épargne… »
En une seule génération, l’imprimeur est passé de simple artisan à notable influant dans de nombreuses sphères à Rennes. Il décède en 1893. Sa politique sociale a été poursuivie par son fils aîné Charles, en désaccord avec son frère cadet René qui reprend l’entreprise en 1924, à la mort de son frère. Ce dernier introduit notamment l’offset en 1929 qui remplacera progressivement les presses lithographiques. À sa liquidation en 1983, l’imprimerie compte 1 300 salariés, 950 deviennent chômeurs. Elle se scinde alors en trois entreprises indépendantes.

Collectionneurs de papillons et de coléoptères

Les visiteurs de l’exposition peuvent aussi découvrir le mode de vie de cette famille bourgeoise détentrice d’un riche patrimoine bâti. Les deux fils du fondateur sont devenus des entomologistes reconnus et sont constitué deux grandes collections de papillons et de coléoptères, représentées dans la muséographie. Joseph Oberthür, le fils de Charles, médecin, a été aussi un illustrateur animalier célèbre.

Témoignage d’un ancien d’Oberthür

André Lelièvre fait partie des « anciens d’Oberthür ». Il y est entré comme apprenti en 1962, âgé alors de 15 ans. « Dans l’école de l’imprimerie, nous suivions des cours techniques et pratiques, mais aussi l’enseignement des matières générales comme le français et les mathématiques », se rappelle-t-il. « J’y ai obtenu un CAP Conducteur de machines à imprimer offset, qui a été créé à l’initiative de l’école Oberthür en 1966, suivi de deux années de perfectionnement. »

En plus de son poste de conducteur offset dans l’entreprise, André Lelièvre occupe des responsabilités dans le syndicat CGT, en tant que délégué du personnel, puis du comité d’entreprise. À la liquidation, il est licencié. Avec deux autres collègues, il crée l’imprimerie du Rimon 4 mois plus tard à Domloup à l’époque. « Nous avons construit notre fonds de commerce grâce à notre savoir-faire et à la renommée d’Oberthür. Les trois branches de l’entreprise nous passaient des commandes. Notre réactivité nous a permis de nous développer. » En retraite depuis 10 ans, l’imprimeur se rappelle de « l’esprit de famille qui régnait au sein de l’entreprise Oberthür, de la solidarité, et du dialogue maintenu avec les cadres dans les moments difficiles. »


L’exposition temporaire « Oberthür, imprimeurs à Rennes » est présentée jusqu’au 28 août. – Écomusée du Pays de Rennes, Ferme de la Bintinais Route de Châtillon-sur-Seiche 35200 Rennes Tél : 02 99 51 38 15 www.ecomusee-rennes-metropole.fr


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