Mieux pour le climat, mieux pour le revenu

C’est d’abord parce que ces mesures rimaient avec gain économique que le Gaec Guines, à Rives-du-Couesnon (35), s’est engagé dans la réduction de son empreinte carbone. Les paiements permis par le marché du carbone sont « un bonus. » « Nous sommes entrés dans la démarche Carbon Dairy en 2013 par curiosité, pour savoir où nous nous placions en termes d’émissions de gaz à effet de serre sur notre exploitation. On commençait à en entendre parler… », souligne Jean-Philippe Guines, éleveur avec son frère Loïc et un salarié à Rives-du-Couesnon (35). L’élevage compte 105 vaches laitières sur une SAU de 130 ha dont 70 ha très séchants. La ferme est convertie en bio depuis 2020. Le premier bilan avec l’outil Cap’2ER avait affiché une empreinte carbone de 0,81 kg éq. CO2/L de lait alors que la moyenne des fermes se situe à 0,90. « Nous étions déjà en système herbager avec moins d’intrants. La moyenne d’étable se situait à 7 500 L/an en 2013. » Sur la base du volontariat, les éleveurs décident de mettre en place plusieurs leviers pour réduire leur impact carbone, « des actions qui nous permettaient en même temps d’améliorer la rentabilité de l’exploitation. » Le groupage des vêlages a été instauré progressivement. « Aujourd’hui, les naissances se passent sur 2,5 mois, de février à mi-avril, juste avant la pousse de l’herbe, à un moment où le travail est moins dense. » La quantité d’herbe pâturée a été accrue, passant de 30 à 40 ares/VL. « Toutes les surfaces accessibles restent en permanence en prairies qui peuvent durer 7 à 10 ans. Nous sommes passés de paddocks de 3 jours à 1 jour. Un meilleur suivi de l’herbe, des fauches précoces et davantage d’autonomie alimentaire ont généré l’économie de 40 tonnes de correcteur. » La production des vaches a légèrement baissé à 7 000 L. Autre levier d’action, la fosse a été couverte, permettant une baisse des quantités d’eau dans le lisier. Résultat au bout de 4 ans, ces mesures ont permis d’abaisser l’empreinte carbone de 18 %. « La simulation économique réalisée en 2013 prévoyait un gain de revenu de 11 000 €/an. C’est sans doute plus finalement », fait remarquer Jean-Philippe Guines. « Cette performance économique est logique : une meilleure gestion de l’herbe a permis d’améliorer l’efficacité alimentaire. L’âge au premier vêlage a aussi été réduit de 26 à 24 mois. » Un groupe AEP qui agit pour le climat autour de Fougères L’éleveur avait participé à un groupe AEP local sur 4 ans (Agriculture écologiquement performante, démarche portée par la Région) travaillant sur l’autonomie en protéines. Aujourd’hui, la SAU comporte 10 ha de maïs ensilage, 10 ha de luzerne, 7-8 ha de trèfle violet et des prairies, avec une part d’affouragement en vert. « Nous n’utilisons plus du tout de correcteur azoté. » Accompagné par la Chambre d’agriculture, « notre groupe s’est lancé en 2018 sur une autre thématique : »Agir pour le climat, le revenu et la qualité de vie en élevage laitier.« Sur le Gaec, nous avons réalisé un nouveau diagnostic Cap’2ER en 2019 avec pour objectif la vente de crédits carbone. Un autre calcul sera réalisé en 2024. Je suis entré sans grande conviction dans la démarche mais finalement, de nouveaux leviers d’action ont été identifiés », souligne Jean-Philippe Guines. Les éleveurs s’orientent désormais vers du croisement 3 voies, Holstein-Jersiais-Rouge scandinave, pour « avoir des vaches plus rustiques, adaptées au pâturage. Elles produiront un peu moins mais feront davantage de taux. La réduction du méthane sera notamment liée à un passage de 30 % de renouvellement à 20 %, soit 10 génisses de moins par an. » 2 km de haies vont venir s’ajouter aux 5 km existants. Une prime de 15 000 € au bout de 5 ans « Notre objectif est de réduire l’empreinte carbone de 500 t en 5 ans. Sur le marché du carbone, nous devrions vendre ces crédits à hauteur de 30 €/t ; 15 000 € vont nous être versés. C’est un bonus, de toute façon nous aurions sans doute réalisé ces évolutions. Outre les entreprises qui achètent des crédits carbone, l’élevage améliore son image avec de telles démarches », déclare l’éleveur ajoutant que « des leviers existent pour tous les systèmes, intensifs, herbagers, bio. À chacun de trouver les siens sachant qu’ils sont le plus souvent source de revenu supplémentaire. »

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