14922.hr - Illustration 24 heures dans la peau de chevriers
Valérie et Éric Bizette, en compagnie de leur apprentie Léa (à gauche), dans leur chèvrerie de 1 000 m2, construite en 2020.

24 heures dans la peau de chevriers

La mise bas représente une phase charnière dans un élevage caprin.

Après une accalmie au niveau travail durant les deux mois de tarissement, la saisonnalité de la production caprine induit une période de mises bas en février/mars tant attendue, mais souvent intense et parfois redoutée…

200 mises bas et 360 cabris en 10 jours

À l’EARL La Pelleraie Rivière, à Quédillac (35) où Valérie et Éric Bizette gèrent un élevage de 400 chèvres Alpines chamoisées, les mises bas de la moitié du troupeau viennent de se terminer, celles des 80 chevrettes démarrent. Lors des échographies fin novembre, « le bilan était on ne peut plus positif : 97 % des chèvres étaient pleines, et cerise sur le gâteau, avec une fourchette de dates de mises bas de 10 jours. Le mois de février s’annonçait intense ! », relaie Valérie Bizette, qui vit le démarrage de sa troisième saison laitière. « C’est pourtant intéressant quand le travail est groupé : la gestion des lots de chèvres et de chevreaux est certes plus facile, mais il faut être suffisamment nombreux pour y faire face : chez nous, au moins 3 personnes pour 200 chèvres sont nécessaires. Et surtout, tout doit être organisé en amont pour être prêt le jour J : préparer la nurserie, le stock de matériel et de lait en poudre, les barrières à disposition pour gérer les lots… », poursuit-elle. Car sur cette période, la vie s’arrête… ou presque. Pas le temps d’aller faire les courses. Encore moins d’avoir une vie sociale.

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L’aménagement d’anciennes porcheries permet l’engraissement des chevreaux durant
un mois sur site.

Dans la chèvrerie de 7 h à 21 h

7 h : démarrage de la journée. « Je commence par faire un tour d’horizon, voir où on en est dans la stabulation. Il arrive qu’un ou 2 chevreaux gambadent déjà, même si la plupart du temps, les chèvres attentent notre arrivée pour les naissances », explique Éric Bizette. Et là une enquête digne de Sherlock Holmes commence : trouver leurs mères, dont les stigmates de la naissance se sont effacés, pour pouvoir les mener en salle de traite… Les chevreaux reçoivent ensuite les soins adéquats (désinfection du nombril, identification, pose d’un tip-tag à l’oreille dont le numéro est annoté sur le registre des naissances avec la filiation) avant d’être retirés des lots avant chaque traite.
7 h 30 : Valérie entre en scène pour la traite du matin. Si d’ordinaire cela dure 90 minutes, la séparation du colostrum allonge la traite. Les fraîche mises bas arrivent en dernier. « On leur met un bracelet de couleur à la patte, pour gérer la phase non commercialisable (7 jours). À chaque jour sa couleur ! » Pendant ce temps-là, la ration est distribuée à la mélangeuse (ensilage de maïs, luzerne déshydratée en brins longs et concentrés). « L’attention est de mise, y compris pour le suivi de l’alimentation. À 3 kg MS ingérée au pic de lactation par chèvre et par jour, la précision se joue à quelques centaines de grammes. Si on rate ce pic, la chèvre ne rattrapera pas sur la campagne… »

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Moments attendrissants lors d’une mise bas.

10 h. Il faut veiller à ce que les nouveau-nés absorbent leur dose de colostrum. Ensuite, « il faut soigner les chevrettes et chevreaux nés les jours précédents, assurer leur apprentissage de la louve, les amener jusqu’à la tétine si besoin, les stimuler pour aller boire… C’est un travail chronophage qui demande une patience légendaire. C’est sûrement ce qui me plaît le moins », avoue Éric Bizette.
De 11 h jusqu’à la fin de l’après-midi, la surveillance est de rigueur : « Notre précise est requise dans le bâtiment : être disponible pour intervenir si besoin et apporter les soins aux chevreaux. »
16 h 30. L’heure de la traite du soir sonne, un peu plus tôt que d’habitude, vu sa durée rallongée, d’autant plus pour le lot des chevrettes, qu’il faut « dompter » en salle de traite. Avec au préalable, le retrait de tous les chevreaux de boucherie, les chèvres fraîche mises bas à changer de lot…
20 h. Dernier tour de chèvrerie et ramassage des derniers-nés avant l’extinction des feux dans la stabulation, suivie rapidement du repos du chevrier !

« Vivement l’année prochaine »

« Les journées sont longues et parfois stressantes. On ne fait pas de vieux os le soir ! Mais j’adore cette période. C’est un vrai plaisir de voir toutes ces naissances, quand cela se passe bien. C’est un travail fatigant, avec beaucoup de manipulations d’animaux », analyse Éric Bizette, après une semaine de ‘pause’ pour se ressourcer avant le 2e rush, avec l’arrivée du lot des chevrettes. Valérie Bizette rajoute : « C’est, en effet, un travail éreintant mais on s’y attend, on peut donc préparer cette phase et anticiper de nombreuses tâches au préalable. Mais, même si on aime ça, et qu’on attend l’année prochaine pour revivre ces bons moments, cela fait du bien quand ça s’arrête ! »

Du porc au lait de chèvre

Ancienne vendeuse, Valérie Bizette a rejoint son mari sur l’exploitation en 2020, après un BPREA. Les chèvres ont remplacé l’atelier d’engraissement porcin. Le troupeau laitier est géré en deux lots : 200 chèvres qui sont mises à la reproduction en saillie naturelle chaque année en septembre et 200 chèvres maintenues en lactation longues, traites toute l’année, sans jamais revoir le bouc après leur première gestation.

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