De gauche à droite : Jörg Altemeier (Tonnies), Francis Kint (Vion) et thierry Meyer (Bigard). - Illustration Porc : la mention d’origine incomprise à l’étranger
De gauche à droite : Jörg Altemeier (Tonnies), Francis Kint (Vion) et thierry Meyer (Bigard).

Porc : la mention d’origine incomprise à l’étranger

Étiquetage, campagnes médiatiques négatives, marché chinois, embargo russe, Brexit. Trois représentants de l’industrie européenne de la viande de porc en débattent.

« Nous avons besoin de la mention d’origine pour consolider notre marché interne ». Les propos de Thierry Meyer, directeur de la filière porc du groupe Bigard, à l’assemblée générale d’Inaporc, suscitent l’incompréhension chez ses deux concurrents allemand et belge. « Je ne comprends pas cette motivation », répond Jörg Altemeier, directeur adjoint de Tonnies. « Mais nous nous adaptons à la demande des consommateurs des pays dans lesquels nous souhaitons vendre de la viande. En investissant ». Tonnies s’est allié récemment au groupe français Avril (Abera).

[caption id=”attachment_20462″ align=”aligncenter” width=”600″]De gauche à droite : Jörg Altemeier (Tonnies), Francis Kint (Vion) et thierry Meyer (Bigard). De gauche à droite : Jörg Altemeier (Tonnies), Francis Kint (Vion) et thierry Meyer (Bigard).[/caption]

« Ainsi, nous pouvons vendre de la viande de porcs nés, élevés, abattus et transformés en France ». Même son de cloche chez Francis Kint, directeur de Vion. « C’est incompréhensible. Cette opération rend les flux plus compliqués et entraîne des surcoûts. C’est une forme de protectionnisme ». Autre point de discorde : la distorsion de concurrence au niveau social liée à l’embauche de travailleurs détachés des pays de l’Est dans les abattoirs allemands. « Il n’y a pas une grande différence », ose l’Allemand de Tonnies. « C’est un problème d’efficacité industrielle ».

Ouvrir les abattoirs ?

L’offensive médiatique contre les procédés d’abattage divise l’Allemand et le Français, favorable à la discrétion pour ne pas heurter l’opinion. « Il faut montrer la mort de l’animal, ne pas la cacher », assure Jörg Altermeier. « Nous vivons à l’heure d’internet et des caméras cachées. Nous ne pourrons pas tout contrôler. Il faut donc prendre les devants, expliquer, informer le consommateur sur les pratiques dans nos usines. C’est ce que nous faisons en Allemagne ».

Difficile, en effet, de lutter régulièrement, avec un temps de retard, contre les vidéos diffusées par les associations de défense des animaux, dont la dernière date de quelques jours, en France. D’autres images seraient en réserve… Les trois professionnels de la viande se retrouvent sur de nombreux points. À commencer par la nécessité de segmenter et de différencier les produits pour répondre aux demandes des consommateurs et enrayer la baisse tendancielle des ventes en rayon. Plus de qualité pour l’Allemand, plus de bien-être animal pour le Belge.

« À condition que ces signes de qualité ne soient pas seulement apposés sur les viandes fraîches mais aussi sur les charcuteries pour que la plus-value espérée s’applique à l’ensemble de la carcasse ». Avis aux salaisonniers. Le responsable du groupe Vion évoque l’une des initiatives prise aux Pays-Bas. « Nous avons rédigé un cahier des charges avec une ONG de défense des droits des animaux. 160 producteurs se sont engagés ». Les initiatives semblent se multiplier dans ce sens. Le « sans antibiotiques », de la naissance à l’abattage, et non plus seulement après sevrage, fait son apparition en France.

Eldorado chinois ?

La solution à l’embargo russe fait l’unanimité. « Il faut chercher un accord à deux ou trois pays européens et pas à l’ensemble des 27. Ce marché reste essentiel pour écouler les abats et le gras ». Dans cette industrie de désassemblage, chaque pièce apporte son écot à la valorisation de la carcasse. Même si les Chinois importent toujours des pieds, ils consomment de plus en plus de pièces nobles. « Ils devront nécessairement importer », juge Jörg Altermeier.

« C’est un marché viable pour la prochaine décennie car ils n’ont pas les moyens techniques de répondre à l’augmentation de leur demande interne ». 1 % de consommation en plus chez eux représente 550 000 tonnes de viande, soit le quart de la production française. « C’est une pompe pour le monde entier. Personne n’aurait pu imaginer que le surplus mondial soit aspiré par la Chine en quelques mois », indique Thierry Meyer. « Mais, attention, il faut travailler sur notre marché interne. Cet épisode de forte importation chinoise ne va pas toujours se répéter ».

Le Brexit n’affole pas les professionnels. « Le Royaume-Uni est déficitaire. Ils vont continuer d’importer même si la viande doit être plus chère ». Les négociations de libre-échange avec les Etats-Unis et avec les pays d’Amérique du Sud (Mercosur) inquiètent bien plus les trois experts. « L’agriculture ne doit pas servir de monnaie d’échange. Nous n’avons pas les mêmes normes ». Tous plébiscitent le niveau sanitaire atteint par la filière européenne, véritable atout dans la compétition internationale. Une faiblesse fait également l’unanimité : le poids de la réglementation en Europe.

Une forte demande chinoise jusqu’en début 2017
Les problèmes sanitaires ont limité la production en Chine. La demande est toujours très forte, les prix restent à un niveau élevé de 2,55 €/kg vif. Le marché devrait se maintenir au moins jusqu’au nouvel an chinois, en janvier 2017, car la consommation atteint un pic à cette période. À moyen terme, le déficit en matières premières, l’augmentation de la consommation et la recherche de qualité sanitaire devraient maintenir un bon niveau d’importations.
Les autorités ont cependant la volonté de relancer la production, sans que l’on connaisse réellement l’impact, et de réguler le marché en constituant des stocks (opération qui explique la période actuelle d’importations). La concurrence est exacerbée. Les importations d’Amérique du Nord repartent. De nouveaux agréments ont été accordés à des entreprises russes, suédoises et polonaises. Leur suspension est toujours un risque : en 2016, un abattoir espagnol a été déclassé et il faut du temps pour retrouver les droits d’entrée. C’est à ce niveau que le travail d’Inaporc est essentiel. Fanye Men,chargé de mission à Inaporc


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