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Transmission : un champ d’innovation

Peut-on innover en matière de transmission des entreprises agricoles ? Jean-Marie Séronie, responsable du groupe Veille Éco du réseau Cerfrance a piloté des réflexions nationales sur ce sujet. Il répond par l’affirmative.

Pourquoi la transmission mobilise-t-elle votre attention ?

Jean-Marie Séronie : La transmission des exploitations agricoles est un sujet majeur pour l’avenir de l’agriculture. Les CerFrance s’y sont toujours intéressés, faisant des propositions fiscales et juridiques permettant de moderniser la gestion de l’entreprise agricole. Quel jeune n’a pas connu les affres de la négociation d’un prêt avec son banquier immanquablement qualifié de frileux ? Quel quinquagénaire sans successeur familial n’est pas inquiet sur la façon dont il va pouvoir céder l’entreprise dans laquelle il a tant investi financièrement et affectivement depuis plus d’un quart de siècle ! Le sujet de la transmission suscite immanquablement de l’émotion et des interrogations.

Quels sont, pour vous, les enjeux de la transmission d’entreprise agricole ?

Jean-Marie Séronie : Les capitaux nécessaires sont de plus en plus importants dans un contexte bancaire beaucoup plus rigoureux. Les entreprises agricoles se complexifient ; les actifs à transmettre sont de plus en plus variés avec, notamment, des biens non physiques comme les contrats. Le salariat prend une place croissante, et les cessions se font de plus en plus souvent hors du cadre familial. En outre, face aux évolutions des marchés, de la société et de la réglementation,  l’agriculteur sait qu’il devra en permanence adapter son entreprise à un environnement instable.

Quels freins à la transmission identifiez-vous ?

Jean-Marie Séronie : J’en vois principalement trois. Premièrement, l’ampleur des capitaux nécessaires devient telle que les banques ne pourront plus intégralement financer les reprises. Deuxièmement, l’immobilisation de ressources dans le foncier sera de plus en plus un handicap à l’adaptation économique rapide. Troisièmement, notre droit rural, par certaines rigidités souvent créées dans les années soixante, freine l’agilité des entreprises.

Qu’entendez-vous par là ?

Jean-Marie Séronie : Des droits, liés à la personne dans le code rural, peuvent être perdus lors d’un passage en société. Le statut du fermage est par exemple contraignant pour faire une location gérance. Les baux sont non cessibles sans l’avis des propriétaires. Autre frein : le contrôle des structures. Sur certains points, la loi d’avenir pour l’agriculture est un retour en arrière. L’agriculteur devra être actif, c’est à dire transpirer sur son exploitation, s’il veut prétendre aux aides. S’il délègue les travaux, il n’aura plus droit aux soutiens. Par contre, une personne qui n’a pas le statut d’agriculteur au sens juridique du terme n’aura pas droit aux soutiens.

Quelles innovations imaginez-vous en matière de transmission ?

Jean-Marie Séronie : Au cours de la conférence du Space, des agriculteurs témoigneront de leurs démarches innovantes. Pour notre part, nous montrerons comment des fonds d’investissements peuvent participer aux financements. Parmi les adaptations à imaginer, nous avons proposé la cessibilité des baux, la possibilité d’introduire en agriculture la location-gérance d’exploitation. Pour le foncier, nous pensons à la location-vente ou au crédit-bail immobilier. Toutes ces innovations permettraient des portages financiers et des transmissions progressives. De même, il existe une autre disposition juridique peu connue : la « fiducie-sécurité », un crédit-vendeur au repreneur avec la garantie de la banque. Si la fiducie-sécurité était assouplie, elle permettrait de sécuriser des cessions. Innover aujourd’hui réclame de moderniser des outils, mais surtout d’imaginer de nouveaux raisonnements et de nouvelles façons de faire.

Prenez date !

Les CerFrance du Grand Ouest organisent une conférence-débat, le jeudi 18 septembre, de 14 h 30 à 16 h (salle A Espace Europe au Space, Parc des Expositions à Rennes) sur le thème : « Transmission d’entreprise : innovons ». Les enjeux de la transmission des exploitations évoluent… Imaginons des schémas de transmission et de financements innovants. Avec la participation de :

  • Jean-Marie Séronie, directeur général CerFrance Manche et Responsable du groupe Veille Éco du réseau CerFrance ;
  • Anne-Yvonne Hénot, responsable conseil CerFrance Finistère et membre du groupe Veille Éco du réseau CerFrance ;
  • Philippe Denis, directeur adjoint CerFrance Loire-Atlantique ;
  • Lionel Guéguen, directeur des activités comptables, CerFrance Finistère ;
  • Gérald Evin, Président de Labeliance Invest ;
  • et le témoignage exclusif de deux agriculteurs.

Que conseillez-vous à un exploitant qui veut préparer sa transmission ?

Jean-Marie Séronie : Si l’exploitant a des enfants dont un potentiel repreneur familial, je lui conseille, dès 45 ans, de réfléchir à sa stratégie d’entreprise et d’organiser son patrimoine. Avant de démarrer avec un de ses enfants en association, il est préférable que le jeune ait vécu une ou des expériences professionnelles au préalable. Dans le cas où l’exploitant n’aurait pas de successeur familial, il a tout intérêt à organiser la structure juridique et capitalistique de l’exploitation afin de conserver des fonds dans l’entreprise qui faciliteront la transmission. Quel que soit le cas de figure, je préconise aux agriculteurs, quand c’est financièrement possible, de ne pas tout investir dans leur exploitation pour diversifier leurs investissements. CerFrance


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